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L’autofocus, Comment ça marche ?

Apparu dans les années 70 sur les compacts argentiques, le système autofocus, qui assure automatiquement la mise au point, est aujourd’hui présent sur tous les appareils numériques. Retour sur une technologie de grande précision, assez méconnue.

La mise au point automatique (autofocus, en anglais) sur les appareils photo et les caméscopes est aujourd’hui devenue tellement courante, discrète et sur tout efficace qu’elle se ferait presque oublier. Pourtant, lorsque vous filmez ou prenez une photo, vous mettez en jeu, souvent sans le savoir, un système optique et mécanique d’une précision redoutable. Imaginez qu’en quelques centièmes de seconde, votre appareil doit déterminer où se trouve le sujet principal de votre photo, évaluer sa distance puis calculer et mettre en ?”uvre le déplacement des lentilles de l’objectif nécessaire pour une bonne mise au point ! Il est bien loin, le temps où le photographe devait assurer soigneusement sa mise au point manuelle grâce aux précieux indicateurs optiques présents dans le viseur, portant les noms barbares de stigmomètres ou autres couronnes de microprismes. L’autofocus, dont l’invention remonte à la fin des années 70, s’est progressivement installé sur les reflex argentiques avec le fameux Minolta Dynax 7000, en 1985, et équipe maintenant tous les appareils photo et caméscopes numériques grand public. Des technologies variées se sont succédé, mais l’arrivée des capteurs CCD comme surface sensible a notablement simplifié la donne, pour les compacts et les bridges tout du moins. L’autofocus est un automatisme devenu essentiel dans la vie du photographe, mais son fonctionnement mérite d’être mieux connu . En effet, aussi fiable soit-elle, toute fonction automatique a ses limites et comprendre son principe et ses limites permet de mieux anticiper ses erreurs éventuelles. Nous verrons en effet qu’il existe encore des cas où la bonne vieille mise au point manuelle s’avérera indispensable.

Petite mise au point

Avant d’expliquer le fonctionnement de l’autofocus, revenons rapidement sur la mise au point, car c’est bien elle qui pose tant de soucis à l’appareil et à son propriétaire. À partir d’une scène en trois dimensions, l’objectif forme une image sur la surface sensible (ici, le capteur), mais seuls les objets placés à une certaine distance seront nets. L’ensemble de ces objets forme donc un ‘ plan de netteté ‘, qui est plus ou moins étalé en avant et en arrière en fonction de la profondeur de champ. Plus les objets de la scène seront rapprochés ou éloignés de ce plan de netteté, plus ils seront flous. La mise au point consiste à rendre net un sujet en déplaçant le plan de netteté sur celui-ci. Pour cela, on fait varier la distance entre le centre de l’objectif et le capteur. Sur tous les appareils récents, c’est un groupe de lentilles mobiles spécialisées qui assure cette fonction. Selon le type de mise au point (Manuelle ou Autofocus), ces lentilles sont actionnées soit par une bague manuelle (ou, sur les compacts, par un moteur commandé manuellement), soit par le système autofocus intégré de l’appareil. La distance de mise au point peut varier de quelques centimètres en mode Macro et s’étendre jusqu’à l’infini.

Principes de base

Les types d’autofocus varient beaucoup en fonction des catégories d’appareils mais le principe de base reste le même. Le rôle d’un autofocus se décompose toujours suivant la même séquence d’action : détection du sujet, analyse de la distance, calcul, décision et action. Pour mieux comprendre la façon dont les appareils évaluent la distance du sujet, revenons un instant sur un système de mise au point… manuel, bien connu des amoureux du Leic a : le télémètre. Un boîtier équipé d’un télémètre possède deux viseurs qui donnent deux images de la même scène, avec un léger décalage du point de vue. Ce décalage, nommé parallaxe, fait que les objets ne seront pas ‘ vus ‘ selon le même angle en ces deux points. Si leur distance change, cet angle d’observation va également changer, et c’est cet effet dit de ‘ parallaxe ‘ qui va permettre à l’utilisateur de Leica de faire une mise au point correcte, en faisant coïncider les images des deux viseurs par un jeu de miroirs mobiles. C’est ce principe de triangulation qui nous permet d’évaluer les distances grâce à nos deux yeux. Fermez un ?”il et restez immobile, et vous comprendrez que les distances sont bien plus difficiles à évaluer à partir d’un seul point de vue. C’est toujours ce principe de base qui a été retenu sur les systèmes autofocus pour mesurer la distance appareil-sujet.

Mesure active, sur les compacts argentiques et caméscopes analogiques

On distingue en général deux types d’autofocus : les systèmes actifs et les systèmes passifs. Les premiers émettent un signal vers le sujet pour mesurer sa distance, tandis que les seconds se contentent d’analyser la lumière réfléchie par la scène. La mesure active était très employée sur les compacts argentiques et les caméscopes analogiques, mais devient de plus en plus rare. Son principe présente en effet certaines limites. L’appareil émet, suivant les modèles, soit un rayon infrarouge (donc invisible à l’?”il nu), soit une onde ultrasonique (inaudible). Dans le cas de l’infrarouge, l’appareil envoie un faisceau par l’intermédiaire d’un petit émetteur placé en surface. À ses côtés, une cellule réceptrice mesure l’angle d’incidence des rayons réfléchis par le sujet et permet ainsi de mesurer sa distance. Le système à ultrasons fait de même mais, ici, c’est le temps d’aller-retour de l’onde sonore qui est mesuré, à la manière du sonar utilisé par les chauves-souris. De par leur nature, ces systèmes présentent une portée limitée à quelques mètres et peuvent se révéler inefficaces à travers une vitre. En outre, le système à ultrasons peut être perturbé par des signaux parasites provenant d’autres sources et ne fonctionne pas avec certains sujets qui ne renvoient pas correctement le son. Enfin, ces autofocus actifs présentent, sur les sujets proches, un problème de parallaxe dû au fait que le récepteur est décalé par rapport à l’objectif, et ne sont capables d’analyser qu’un seul point de la scène à la fois. Seul réel avantage, ils peuvent fonctionner dans l’obscurité la plus totale.

Mesure passive interne sur les reflex

Le système passif est utilisé sur l’ensemble des reflex, aussi bien argentiques que numériques. Il permet une mesure de distance bien plus précise, sur une ou plusieurs zones de la scène, définies au préalable. Le principe est encore similaire à celui du télémètre mais, cette fois-ci, c’est uniquement la lumière émise par la scène et entrant dans l’objectif qui est analysée, d’où le nom de ‘ mesure passive TTL ‘ (pour Through the Lens). Ce système est assez complexe et nous n’entrerons pas dans les détails. Sachez cependant qu’il fonctionne grâce à des couples de capteurs CCD en barrette (composés de lignes de photosites) placés sur le plancher de la ‘ chambre noire ‘ du boîtier. Ceux-ci comparent la même zone de l’image ‘ vue ‘ sous un angle légèrement différent et à la même distance que la surface sensible, grâce à un astucieux système optique (voir schéma). Si les signaux diffèrent entre deux CCD d’un même couple, c’est que la zone analysée est floue. Le système mesure en fait le contraste de la zone, qui dépend de sa netteté, c’est pourquoi on l’appelle système à contraste de phase.L’intérêt d’une telle méthode vient du fait que le décalage des signaux sur les barrettes de CCD permet de déterminer directement et rapidement la correction à apporter à la mise au point pour retrouver une image nette. Chaque couple de CCD correspond à un collimateur dans le viseur, et donc à une zone de l’image. Les premiers reflex disposaient d’un seul collimateur placé au centre de l’image, les plus récents grimpent jusqu’à onze collimateurs dont l’orientation est variable et la répartition étudiée pour pouvoir s’adapter à tous types de sujets. Ceux-ci restent cependant regroupés vers le centre de l’image. L’acuité de ce système dépend aussi de l’ouverture maximum de l’objectif : plus les capteurs reçoivent de lumière, plus l’autofocus sera rapide.

Mesure passive externe sur certains compacts et bridges numériques

Sur certains bridges et compacts numériques, on retrouve un système optique de détection de contraste de phase, mais l’absence de miroir empêche de placer celui-ci dans le boîtier. On le trouve donc derrière une petite fenêtre placée sur le devant des boîtiers et derrière laquelle on peut distinguer les deux lentilles de champ du télémètre. La mesure est moins précise qu’avec un système TTL, en particulier sur les sujets proches, toujours à cause de la parallaxe entre l’objectif et le système autofocus.

Mesure passive avec CCD sur tous les autres appareils numériques

Sur les appareils reflex, le capteur servant à l’enregistrement de l’image est occulté par l’obturateur, qui ne se relève qu’au moment où la photo est prise.Au contraire, sur les compacts et les bridges équipés d’obturateurs ‘ électroniques ‘, le capteur reçoit la lumière en permanence, ce qui leur permet entre autres de bénéficier de la visée sur écran et d’un mode vidéo. L’idée est alors tentante d’utiliser ce capteur principal pour assurer la mise au point plutôt que de truffer l’appareil de capteurs annexes. C’est ce principe simple et économique qui est également utilisé sur les caméscopes numériques. L’absence de système optique spécifique comme sur les technologies précédentes rend néanmoins la mesure par triangulation impossible. Le capteur détecte simplement si l’image est floue ou nette en mesurant son contraste, exactement comme lorsque l’utilisateur fait la mise au point à l’?”il nu. Sur certains modèles, un système piézo-électrique fait vibrer le capteur de manière imperceptible pour faciliter cette mesure. Celle-ci reste tout de même moins précise que précédemment, mais présente toutefois un avantage : l’utilisateur peut déplacer la zone d’analyse par tout dans l’image sans avoir besoin de décaler son cadrage pour faire la mise au point sur des sujets décentrés. Cette option reste limitée aux appareils possédant un grand capteur, la quantité de lumière reçue sur les bords du capteur devant être suffisante.Second avantage, ce système mesurant à travers l’objectif, ne souffre pas du problème de parallaxe des autofocus externes sur les sujets rapprochés et peut être utilisé pour la macrophotographie.Certains compacts et bridges (Pentax, Ricoh, Olympus) ont recours à un système hybride externe/CCD, les deux s’épaulant mutuellement. Dans des conditions de prise de vue normale, l’autofocus externe (passif ou actif, suivant les modèles) ‘ dégrossit ‘ la mise au point, qui est finalisée par le capteur CCD. En lumière basse, c’est le premier qui travaille tandis que le second prend le relais en mode Macro.

Calcul et transmission mécanique

Quel que soit le système d’analyse employé, l’appareil doit ensuite calculer et mettre en ?”uvre, en fonction de la distance du sujet, le déplacement des lentilles permettant d’assurer une mise au point correcte, grâce à un moteur intégré à l’objectif. Dans le cas des reflex, les informations sont transmises à l’objectif par l’intermédiaire de contacts électroniques présents sur la baïonnette.La puissance des microprocesseurs de l’appareil détermine bien sûr la rapidité et la précision d’exécution, mais c’est surtout le type de motorisation des lentilles qui entre en jeu. Les appareils destinés au grand public sont équipés de moteurs assez poussifs et ne disposent que d’un nombre limité de positions. Sur les boîtiers et les objectifs perfectionnés, on trouve des moteurs bien plus fluides et silencieux. Le plus connu est le système à ultrasons USM, inventé par Canon, qui permet d’entraîner les lentilles sans contact physique avec le moteur, ce qui confère au système à la fois le silence, la précision et la rapidité de fonctionnement.

Limites de fonctionnement de l’AF

Chaque système de mesure, aussi perfectionné soit-il, a ses limites et la plupart des autofocus ne fonctionnent pas ou mal dans les cas suivants : scènes manquant de lumière, sujets peu contrastés (aplats uniformes), motifs répétés (grilles, tissus), reflets très lumineux. C’est pour contourner ces cas difficiles que de nombreux appareils photo sont équipés d’une lampe d’assistance qui éclaire le sujet au moment de la mesure. Souvent, c’est le flash intégré qui joue ce rôle en émettant une série d’éclairs afin de repérer le sujet. On trouve aussi une torche intégrée sur certains caméscopes qui fait également office d’éclairage d’appoint pendant la prise de vue. Malgré tout, il arrivera que votre autofocus se montre récalcitrant et vous n’aurez pas d’autre choix que de passer en mise au point Manuelle ou en mode Snapshot. Ce dernier cale en fait la mise au point sur l’infini et il peut aussi se rencontrer sous forme de mode Paysage. En mise au point Manuelle, il faudra souvent contrôler ‘ à l’?”il ‘ la netteté du sujet dans le viseur car les indicateurs de mise au point par allumage des collimateurs ne fonctionnera pas dans les cas difficiles. Hélas, les viseurs récents ne sont pas étudiés pour assurer cette fonction . On en vient alors à regretter ces bons vieux stigmomètres et couronnes de microprismes…

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Julien Bolle