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Ils traquent les internautes pas Net !

Internet peut servir de support aux pires crimes. Mais, depuis le fort de Rosny, une division spéciale de la gendarmerie veille et frappe !

Si la plupart des internautes surfent tranquillement sur Internet, quelques-uns s’en servent pour commettre crimes et délits. Pour eux, l’anonymat relatif du Web est l’occasion d’attirer leurs proies en toute impunité.En France, à la gendarmerie nationale, la division de lutte contre la cybercriminalité a pour mission de chasser cette nouvelle race de malfaiteurs. La cellule travaille en collaboration avec les autres services de gendarmerie, mais aussi avec les polices étrangères. L’opération ‘ Arc-en-ciel ‘, qui a abouti à l’arrestation de 166 personnes le 12 octobre dernier, précisément le jour de notre visite, en est le parfait exemple. Tout a commencé sept mois plus tôt. Telefono Arcobaleno, une association italienne de protection de l’enfance, envoie un courrier électronique à la division. Celui-ci signale un fichier à télécharger sur un site français contenant plus de 2,5 millions d’images et environ 30 000 vidéos pédopornographiques.Les gendarmes contactent le site concerné et obtiennent l’adresse IP de l’individu ayant posté ce lien et, dans la foulée, les 21 000 logs correspondant aux 10 000 internautes qui ont téléchargé le fichier en question.Dans une première étape, il a fallu trier les différentes adresses IP. En effet, celles-ci fournissent, sous la forme de codes, de précieuses informations, notamment le pays, le FAI, et le propriétaire de l’ordinateur.

310 suspects pris au filet

Une fois le tri effectué, les gendarmes ont fait suivre à leurs homologues étrangers les adresses IP les concernant. Et ils se sont concentrés sur celles provenant d’internautes français. Ils ont ensuite réclamé auprès des FAI les noms et adresses des abonnés correspondant aux adresses IP relevées. Malgré la bonne volonté des fournisseurs, le retour des informations a été long. Ce qui est préférable pour le lieutenant Karine Beguin, chef du département de surveillance Internet : ‘ Quand un FAI a une cinquantaine d’adresses à identifier, mieux vaut qu’il prenne un mois pour nous répondre plutôt que de se tromper de ligne et de nous orienter vers le mauvais abonné. ‘En temps normal, une fois que le patronyme et l’adresse postale de l’internaute sont connus, la division de lutte contre la cybercriminalité remet les informations au parquet local, qui engage les poursuites. Ici, les 310 suspects étant répartis sur l’ensemble de la France, l’équipe de Rosny-sous-Bois a coordonné les interventions des différentes brigades. Il fallait que toutes les arrestations aient lieu au même moment afin d’éviter que certains suspects prévenus à l’avance par les autres ne vident leurs disques durs, ou ne s’enfuient à l’étranger.

Ils se lançaient un bébé

Toutes les affaires ne durent pas si longtemps. Certaines se règlent en quelques jours, comme celle d’un ‘ happy slapping ‘ (scène filmée avec téléphone portable) raciste, en août dernier. Lors d’une visite sur un forum consacré à la vidéo, le lieutenant Béguin tombe sur un message évoquant une partie de basket comique, avec un titre qui lui met la puce à l’oreille. Elle la regarde et découvre ‘ deux individus blancs en train de se lancer, à travers un hall d’immeuble, un bébé noir de 18 mois. A un moment donné, l’enfant est récupéré in extremis à quelques centimètres du sol ‘. S’agissant visiblement d’un cas de violence sur mineur, et pour éviter que les faits ne se répètent et se terminent en drame, elle contacte le site de partage de vidéos qui héberge le film. Celui-ci communique l’adresse IP de l’internaute qui a posté les images. Cette dernière est envoyée à son fournisseur d’accès, qui transmet en retour ses coordonnées. Quatre jours plus tard, les auteurs de la vidéo sont arrêtés. L’enfant, lui, est en bonne santé.Pour leurs patrouilles sur le Web, les gendarmes disposent de nombreux outils informatiques. Notamment ‘ Log-P2P ‘, un logiciel qui traque, jour et nuit, sur les réseaux peer-to-peer, les images à caractère pédopornographique. Ainsi que des petits assistants, développés en interne, qui lancent des requêtes automatiques sur les différents moteurs de recherche.Ces outils, aussi puissants soient-ils, ne remplacent pourtant pas le flair de l’enquêteur. Ainsi, au mois de mai dernier, l’un des gendarmes de la division tombe sur une vente de tortues, apparemment anodine, sur un site de petites annonces. Ce qui lui paraît louche, c’est le prix élevé et les informations postées manquant de précisions par rapport à d’autres annonces similaires. Il demande l’aide de l’OCLAESP ?” une sous-direction de la gendarmerie luttant contre les atteintes à l’environnement ?” pour identifier les tortues en question. Il s’agissait en fait d’animaux appartenant à des espèces protégées dont certaines vivent à l’état sauvage en France.

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Stéphanie Chaptal