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Du sable et du Wi-Fi au Mali

Une poignée de passionnés d’informatique, quelques boîtes de conserve, un peu de Wi-Fi et beaucoup d’astuce : l’ONG Geekcorps implante Internet au c?”ur du désert malien.

Connecter les tribus touarègues du désert malien au reste du monde et leur permettre de développer leur appartenance au pays où ils vivent : c’est l’objectif du programme de création de radios communautaires actuellement mis en place par l’ONG Geekcorps dans le nord du Mali.‘ Les radios communautaires se sont révélées un remarquable moyen d’apporter la stabilité à une région, constate Matt Berg, directeur de l’ONG. Nous avons inventé un type d’émetteur pas cher, facile à fabriquer avec les matériaux disponibles localement, et nous avons transmis les plans à une entreprise malienne, qui a également été formée pour en assurer la maintenance. ‘ Dans un pays secoué par des vagues récurrentes de rébellion au sein des populations nomades, cette initiative est un des fers de lance du programme de pacification lancé par l’Usaid (agence américaine pour le développement international).

Un PC adapté au désert

A Bourem Inaly, un village où l’on n’accède depuis la capitale Bamako qu’après deux jours de trajet sur une piste défoncée et une balade en pirogue d’une demi-heure sur le fleuve Niger, Aboubacrine Touré, le directeur de Radio Beeray, est une star. Tous les dimanches soirs, il présente le Journal des journaux, une émission d’actualités d’une heure. C’est grâce à la connexion par satellite fournie par l’Usaid et avec le navigateur Firefox que ce journaliste local peut se connecter à Internet pour y glaner des informations inédites concernant à la fois le village et la région.Son meilleur allié ? Un ‘ PC du désert ‘, spécialement développé par Geekcorps en partenariat avec le fabricant de composants taïwanais Via pour résister aux chaleurs extrêmes. Eh oui, au printemps au Mali, on atteint facilement 50?’C au compteur… Etanche et dépourvu de ventilateur pour ne pas accumuler la poussière, le PC du désert dispose à la place d’un tuyau d’aération destiné à évacuer la chaleur. Le système d’exploitation Linux a été configuré pour limiter le nombre d’enregistrements sur le disque dur. De plus, cet ordinateur a été énergétiquement optimisé, puisqu’il consomme moins d’énergie qu’une ampoule de 60 W, soit environ dix fois moins qu’un PC dernier cri. Un facteur non négligeable dans une région où l’électricité est fournie principalement par de coûteux panneaux solaires. Et pour réduire encore le coût de fonctionnement de l’installation, la connexion satellitaire a été couplée à un logiciel chargé de limiter la bande passante…

Des services numériques

Une fois le programme de radio monté grâce au logiciel, il peut être envoyé par Internet à d’autres stations de radio situées dans des régions encore plus retirées : ‘ Avec une connexion à bas débit, un tel transfert de données prend du temps, et il coûte relativement cher, explique Wayan Vota, le directeur de Geekcorps pour le monde entier. Mais beaucoup moins de temps que s’il fallait faire le trajet en transports ! ‘Car si certaines régions du Mali disposent d’une connexion par fibre optique fournie par l’opérateur télécoms national avec un débit de 64, voire 128 kbit/s, la plus grande partie du désert reste hors réseau.Pour remédier à ce problème, Geekcorps est aussi à l’origine du programme Last mile initiative (projet pour le dernier kilomètre). Dans les villages isolés comme Faraba, l’ONG a accompagné l’installation de quatre ‘ cybertigis ‘ (marchands de services numériques), des kiosques Internet où les Maliens peuvent numériser, imprimer des photos (un service particulièrement populaire), consulter une version française de l’encyclopédie Wikipedia, et envoyer des mails vocaux, un outil plus adapté à une population encore largement analphabète que les mails écrits.

De relais en relais

Un PC du désert et un téléphone mobile Nokia 770 permettent de faire le lien entre ce cybertigi de Faraba et le Clic (Centre local d’information et de communication), un cybercafé installé dans le contexte plus urbain et connecté de Ouelesse-bougou. Et au-delà de Faraba, c’est le ‘ mototigi ‘, un système de transport à moto, qui prend le relais pour transporter des documents imprimés, mais aussi des données via une clé USB jusqu’aux communautés les plus reculées.Pour inaugurer et faire connaître l’existence du kiosque de Faraba au sein de la communauté, une soirée cinéma en plein air a été organisée avec la projection du film Kirikou, de Michel Ocelot. Un succès ! Car l’objectif du projet est aussi de permettre au directeur du kiosque de développer une activité autonome et commercialement viable, très rapidement après son implantation.

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Judith Bregman