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Dans les coulisses de Prince of Persia

À Montréal, au Québec, le temple du jeu vidéo est en pleine effervescence… La nouvelle production à gros budget d’Ubisoft sort dans quelques semaines.

Rainbow Six, Splinter Cell, Assassin’s Creed, Far Cry, Prince of Persia… tous ces hits planétaires ont été développés au sein du studio Ubisoft de Montréal. Fondé en 1997, le studio est le deuxième au monde par sa taille, avec un effectif de deux mille personnes. Afin de fournir la main-d’?”uvre nécessaire au développement de productions toujours plus ambitieuses, l’éditeur a créé à Montréal en 2005 sa propre école de formation aux métiers du jeu vidéo. Essentiellement fréquentée par les Québécois, elle est ouverte aux étudiants du monde entier qui viennent suivre ici une formation d’un an pour une somme dérisoire, seulement 200 dollars canadiens, soit 150 euros. Un atout essentiel selon Philippe Turp, le directeur du campus, qui permet de sélectionner les étudiants sur leur talent et non sur leur compte en banque.À l’issue de la formation, la moitié des étudiants seront embauchés par Ubisoft et rejoindront le studio de Montréal. Avec la possibilité de travailler sur les plus grosses productions du groupe, comme Prince of Persia, dont le nouvel épisode sortira en décembre prochain, après trois ans de développement. Cet opus, le plus ambitieux de la série, a monopolisé cent soixante artistes et programmeurs travaillant en étroite collaboration sous la conduite du game designer, le metteur en scène. De nombreuses séquences animées, notamment les cinématiques, ont été réalisées dans le studio de Motion Capture d’Ubisoft, l’un des plus importants au monde. Là, des acteurs professionnels, et parfois les animateurs 3D eux-mêmes, ont enfilé les combinaisons bardées de marqueurs photosensibles afin de mimer les attitudes et mouvements des personnages principaux. Outre l’image, le son occupe une part très importante dans Prince of Persia, comme dans la plupart des jeux d’action développés par Ubisoft. Là encore, l’essentiel de la création a été réalisé en interne. Le studio accueille, par exemple, un bruiteur professionnel qui a créé, à l’aide d’un bric-à-brac phénoménal, l’intégralité des bruitages du jeu, à l’exception des effets magiques. Quant aux grognements et cris des monstres, ils ont été fabriqués à partir de voix humaines retravaillées dans le studio d’effets sonores.

Ubisoft Montréal

Installé dans une ancienne usine textile, le studio d’Ubisoft Montréal, dirigé par Yannis Mallat, est le plus grand parmi les vingt que compte le groupe. Le site emploie près de 2 000 personnes, dont 75 % d’artistes et programmeurs qui travaillent sur une vingtaine de productions, telles Prince of Persia, Splinter Cell Conviction ou Far Cry 2. Un vrai village, avec café, restaurant, infirmerie, salle de sports et espace de détente…

Le studio de développement

Les artistes et les programmeurs de Prince of Persia sont regroupés dans un open space. Cette organisation ne doit rien au hasard. Tous les protagonistes du projet travaillent en étroite collaboration et échangent en permanence le fruit de leurs créations respectives. En effet, la moindre modification d’un point du jeu implique l’intervention de plusieurs métiers (animateur ou modeleur 3D, programmeur, level designer…).

Le studio d’effets sonores spéciaux

Chaque projet possède sa propre équipe de designers audio qui créent et intègrent au jeu la plupart des sons. Néanmoins, lorsqu’ils ont besoin d’un effet très précis, ils font appel au studio son. C’est ainsi qu’ont été créés les sons de certains monstres de Prince of Persia, notamment le Hunter, l’un des quatre boss du jeu. Pour cela, les concepteurs d’effets sonores ont fait appel à Sébastien Croteau, un artiste de death metal qui maîtrise le chant de gorge. Ils ont enregistré plus de 600 de ses onomatopées qu’ils ont ensuite retravaillées pour créer les 266 sons différents du Hunter.

Le bruiteur

Sons et bruitages sont de plus en plus nombreux et variés dans les jeux d’action. Pour apporter cette diversité, les studios font appel à Tchae Measroch, un bruiteur professionnel. Les scènes sont projetées sur l’écran pour lui permettre de créer les sons les plus adaptés à la situation. Si rien ne remplace le contact de deux épées pour recréer l’ambiance des duels de Prince of Persia, Tchae utilise aussi des objets beaucoup plus étonnants pour d’autres productions. Ainsi, un bidon d’huile d’olive suffit à recréer le son d’une planche de surf sur la neige tandis qu’une poignée de porte simule à merveille le bruit d’une arme qu’on recharge.

Le labo play test

Dès le début d’une production, Ubisoft fait appel à des consommateurs pour tester leurs réactions, et vérifier notamment que la difficulté n’est pas trop forte, que la prise en main est intuitive et le contenu intéressant. Pour ne pas gêner les testeurs, les développeurs assistent à ces sessions dans une salle attenante dotée de miroirs sans tain et de micros transmettant réactions et commentaires.

Le studio son

Josselin Daoust, preneur de son et mixeur, a passé près de huit mois à enregistrer tous les bruitages de Prince of Persia. Il a également mixé en Dolby Digital 5.1 les dialogues, ambiances, effets sonores et musiques qui composent les séquences non interactives du jeu. Comme le bruiteur, il dispose d’un écran de cinéma sur lequel sont projetées les scènes du jeu, afin d’assurer un calage parfait du son sur les images.

Le studio de motion capture

Le Motion Capture d’Ubisoft est l’un des plus grands studios d’Amérique du Nord. C’est ici que sont réalisées les animations les plus complexes des jeux d’action comme Prince of Persia, Far Cry 2 ou Splinter Cell Conviction. Le système Mocap se compose de 48 caméras Vicon de 4 mégapixels, capables d’enregistrer jusqu’à 240 images/s. Avec leur propre éclairage rouge, elles produisent de la vidéo à très haut contraste. Comme elles ne distinguent que les éléments très réfléchissants, les personnes ou objets (ici un fauteuil roulant) sont équipés de marqueurs brillants positionnés sur les points d’articulation, une cinquantaine pour animer un corps humain. Le grand nombre de caméras permet de capturer les mouvements de cinq acteurs simultanément. Les points enregistrés sont adaptés sur le modèle 3D de l’objet ou du personnage à animer.

Le campus Ubisoft

Situé au sixième étage d’une large tour de verre, le Campus Ubisoft est un partenariat entre le gouvernement du Québec qui assure le financement, le Cegep de Montréal (groupement de lycées et d’universités) et Ubisoft qui fournit les locaux, le matériel et collabore à l’établissement des programmes éducatifs. Outre les salles de classe, les étudiants disposent d’une salle de jeu, d’un espace de repos et d’une cafétéria. Fondé en 2005, le campus accueille cette année 204 étudiants dont 28 filles durant 45 semaines. Au cours des 15 premières, les étudiants découvrent les cinq métiers du jeu vidéo : modélisation 3D, animation 3D, game design, level design et programmation, avant de choisir leur spécialité. Enfin, les 15 dernières semaines sont consacrées à la réalisation d’un jeu vidéo en commun. Au final, la moitié des étudiants seront embauchés par Ubisoft, la plupart des autres partiront à la concurrence (EA, Eidos…).

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Philippe Fontaine