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Brut de brut !

Le format de fichier Raw est souvent présenté comme LA solution miracle aux difficultés posées par la photographie numérique. Une sorte de panacée aux petits problèmes d’équilibre de la balance des blancs, de l’exposition ou du bruit numérique. Las, si le Raw apporte de nombreuses solutions aux petits tracas quotidiens, il complique sérieusement les manipulations sur un ordinateur et pose la question de la pérennité des images. Alors faut-il céder aux sirènes du Raw ?

En naviguant dans les menus de votre appareil photo (compact haut de gamme ou reflex) et plus particulièrement dans les options d’enregistrement des images, peut-être aurez-vous remarqué la présence d’un mode Raw parmi les différentes versions de compression et de qualité de JPeg. Que se cache-t-il derrière cette appellation ? Littéralement traduit de l’anglais par ‘ brut ‘, le mode Raw enregistre effectivement une image ‘ brute ‘ du capteur. Pour comprendre cette notion, un petit rappel technique est indispensable.

De la technique… juste ce qu’il faut

Sans trop entrer dans des considérations techniques, rappelons que le niveau de détail d’une image numérique dépend en partie de l’espace de valeur binaire dans lequel celle-ci est codée. Plus celui-ci est important, plus l’image comporte de détails. Par exemple, une image enregistrée sur 12 bits contient plus d’informations qu’une image enregistrée sur 8 bits. Pour se rendre compte de la différence, il suffit de modifier l’affichage de votre ordinateur. Sélectionnez un affichage en 256 couleurs (affichage 8 bits : 2 exposant 8 = 256). Les images et les icônes apparaissent moins lissées et les dégradés présentent de larges aplats de couleurs. En millions de couleurs (affichage 24 bits : 2 exposant 24 = 16 777 216), les images sont bien détaillées et les contours très nets. Un capteur d’appareil numérique enregistre des valeurs de luminosité sur une plage de valeurs comprises entre 10 et 14 bits (1 024 à 4 096 valeurs). Pour obtenir une image colorée, un algorithme complexe est appliqué pour transformer cette luminance en pixels de couleur. Lors de l’enregistrement d’une image en JPeg, le logiciel interne de l’appareil applique également de nombreux paramètres enregistrés à la prise de vue (balance des blancs, réduction du bruit, exposition, etc. ) afin d’obtenir une image directement exploitable. Paradoxalement, le JPeg est un format qui ne conserve pas la totalité des données fournies par le capteur. Le format enregistre les données sur 8 bits (256 valeurs, d’où une perte d’information par rapport au fichier original enregistré sur 12 bits) et son algorithme de compression supprime également des informations.

Exploitez le plein potentiel des images

Un fichier Raw enregistre l’image directement issue du capteur (sur 12 bits avec toutes les informations) et les paramètres de prise de vue (balance des blancs, accentuation…) sont intégrés dans le fichier sans être appliqués. Dans l’absolu, travailler en JPeg et en 256 nuances par couleur est largement suffisant, l’?”il humain étant incapable d’en discerner autant. Alors pourquoi vouloir à tout prix enregistrer 4 096 valeurs et obtenir des fichiers plus volumineux ? Pour être le créateur de la meilleure image possible ! En effet, un fichier JPeg est un fichier presque définitif et prêt pour une impression directe sans modification. Retoucher ou améliorer un JPeg est toujours possible avec un logiciel adéquat, mais de profondes modifications de votre image sont très difficiles à obtenir et se font au prix d’une dégradation de celle-ci. Travaillez sur un fichier Raw revient en quelque sorte à modifier une image qui n’existe pas encore. En partant des données brutes du capteur, c’est à vous (avec l’aide d’un logiciel spécifique ou d’un logiciel de retouche qui sait traiter le Raw) de créer ou de développer votre image. Si le logiciel utilise les données de prise de vue (enregistrées dans le fichier) pour créer la prévisualisation de votre image, vous pouvez intervenir sur tous ces facteurs (balance des blancs, exposition, accentuation, réduction du bruit…) avant l’enregistrement et la création de l’image finale. Seul le paramètre de la sensibilité n’est pas modifiable, l’augmentation du signal devant probablement s’effectuer avant l’enregistrement du fichier.

Idéal pour les têtes en l’air ?

Appliquer les paramètres de la prise de vue… après la prise de vue, voilà un concept plus qu’intéressant pour les plus étourdis d’entre nous. En effet, qui n’a pas oublié, un jour, de modifier la balance des blancs (si celle-ci n’est pas positionnée en automatique) en changeant d’endroit et donc d’éclairage ? Qui n’a pas oublié de recaler le correcteur d’exposition et sous-exposé de fait toute une série d’images ? En pratique, réaliser des photos au format Raw permet de s’affranchir de nombreux réglages. Les seuls paramètres qui ont encore de l’importance lors de la prise de vue sont la sensibilité (réglages ISO) et les modes à priorité d’ouverture ou de vitesse. Vous avez ensuite toute la latitude pour réinterpréter les paramètres calculés par le boîtier, à savoir la balance des blancs, le rendu colorimétrique, l’accentuation ou la réduction du bruit. Attention, les possibilités du format Raw ne dispensent pas le photographe d’une bonne exposition. Il est donc impératif de surveiller l’histogramme de vos photos pour capturer un maximum d’information lumineuse (histogramme en forme de cloche sans débordement aux extrémités). Bien sûr, la solution la plus plaisante pour le photographe averti et pressé semble évidente et s’appelle Raw + JPeg. Cette possibilité qu’offrent certains boîtiers (généralement les reflex) allie les avantages des deux formats. Le JPeg permet d’utiliser très rapidement un cliché, tandis que la version Raw peut être utilisée ultérieurement pour développer tout le potentiel de l’image et pour l’archivage.

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Renaud Labracherie