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2. Des puces superpuissantes

La course à la vitesse est relancée : en concevant des processeurs cadencés à 600 GHz, les chercheurs doivent relever des contraintes physiques jusqu’alors inconnues. Et pour cela, les techniques de fabrication doivent
évoluer.

Un ordinateur dans un seul circuit intégré

Un banal processeur vendu dans le commerce aujourd’hui contient plus de transistors qu’un ordinateur complet d’il y a cinq ans. Sans tenir compte des prises, on pourrait donc faire tenir les principaux éléments d’un PC
(processeur, mémoire, modem, circuit graphique) dans une seule puce et fabriquer ainsi un ordinateur miniature, les interfaces physiques étant déportées. Appelés System on a chip (Soc), les systèmes de ce type sont déjà bien
avancés. ST Microelectronics a ainsi développé une plate-forme destinée aux téléphones mobiles. Le Soc est relié à un bus doté de nombreuses interfaces : USB, clavier, lecteur de cartes MMC. Si les systèmes de type Soc se développent dans le
futur, on pourrait imaginer que tout un chacun soit équipé d’une carte au format carte de crédit embarquant un ordinateur miniature, carte qu’il suffira d’insérer dans un terminal (disposant d’un écran, d’un clavier, de lecteurs de supports de
stockage externes et d’une connexion réseau) pour pouvoir travailler. Les données, elles, seraient stockées sur le réseau.

Des transistors sans silicium

Un peu plus de 600 GHz. C’est la vitesse du transistor développé par des chercheurs de l’Université de l’Illinois, ce qui permet de réaliser 600 milliards d’opérations à la seconde. Composant de base des processeurs, les
transistors remplissent un rôle d’interrupteur : en appliquant un courant sur l’une de leurs électrodes (la grille), on peut contrôler le courant entre deux autres électrodes (la source et le drain). Pour atteindre cette vitesse record, les
chercheurs ont abandonné le silicium, habituellement utilisé pour la fabrication des transistors, et ont opté pour l’indium. Comme le silicium, l’indium est un semi-conducteur, c’est-à-dire qu’il laisse passer du courant dans certaines conditions, à
l’inverse des isolants, qui empêchent les électrons de circuler et des conducteurs qui laissent le passage totalement libre. L’indium utilisé a été en quelque sorte ‘ moléculairement modifié ‘ : sa
structure a été contrôlée pour augmenter la vitesse de déplacement des électrons, mais aussi leur permettre de parcourir des distances plus longues. L’indium a la cote dans les labos de recherche, puisqu’il a aussi été employé par Intel et Qinelic.
Le but, là encore : réaliser un transistor plus rapide mais surtout, consommant beaucoup moins d’énergie (un dixième d’un transistor au silicium). Pour parvenir à leur fin, les deux sociétés ont employé un mélange d’indium et d’antimoine qui
rend les transistors difficiles à contrôler au-delà d’une température de -200?’. Ennuyeux… Les chercheurs ont dû isoler l’indium antimoine avec des couches du même semi-conducteur mélangé avec de l’aluminium. Dans ce cas, les électrons sont
confinés dans la tranche de semi-conducteur non mélangé à de l’aluminium, par un phénomène appelé ‘ puit quantique ‘ (ou ‘ quanium well ‘ en
anglais).

La course à la finesse de gravure

Tous les 18 moins, le nombre de transistors que l’on peut intégrer dans un microprocesseur double. Cette loi, énoncée en 1980 par Gordon Moore, l’un des fondateurs d’Intel, et appelée deuxième loi de Moore, s’est vérifiée depuis
1973. Mais à quel prix ! Car doubler le nombre de transistors sur une surface inchangée implique forcément de graver des transistors plus fins dans des usines toujours plus chères. La technique de gravure des processeurs n’a pas véritablement
évolué depuis dans années : elle consiste à projeter des ultraviolets sur une couche de résines. Un masque bloque la lumière en certains points pour créer le circuit de transistors. Les ultraviolets peuvent sans problème graver les processeurs
vendus dans le commerce aujourd’hui, à l’aide de masques dont la finesse est de 90 nm (nanomètres, un milliardième de mètre). Ils sont aussi employés pour graver les processeurs à 65 nm qui commencent à arriver. En revanche, ils ne
pourront guère aller plus loin. En effet, lorsque la longueur d’onde d’un trait lumineux est quatre fois supérieure à la finesse du masque, il n’est plus possible d’obtenir un tracé correct. Avec des ultraviolets, dont la longueur d’onde est de
193 nm, il n’est pas donc pas possible de passer sous une finesse de gravure de 48 nm. Et pourtant cela sera nécessaire entre 2008 et 2010 pour respecter la loi de Moore. Les ultraviolets pourraient être remplacés par des rayons X
‘ légers ‘, aussi appelés ultraviolets ‘ extrêmes ‘ (leur longueur d’onde est de l’ordre de 20 nm), ou des rayons X plus classiques (1 nm de
longueur d’onde). Mais cela impliquerait de construire de nouvelles usines. Les ingénieurs d’IBM ont trouvé une solution : faire passer le rayon ultraviolet à travers une goutte d’eau, placée entre la source du trait lumineux et le masque. Plus
dense que l’air, l’eau abaisse la longueur d’onde des ultraviolets à 135 nm, ce qui permet de graver une finesse de 34 nm. Presque suffisant pour atteindre une finesse de 32 nm qui sera nécessaire en 2011. Et ça marche : un Power
PC fonctionnel a été conçu en utilisant cette technique.

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Alain Steinmann