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Yahoo sème le doute sur le modèle gratuit

Face à la défection de nombreux annonceurs en ligne, Yahoo, comme nombre de sites attachés aux seuls revenus de la publicité, redécouvre à son corps défendant les vertus du modèle payant.

Le 7 mars, Tim Koogle, le président du premier portail mondial, remet sa démission. Le 13 mars, c’est au tour d’Anil Singh, le directeur des ventes et du marketing, de quitter l’entreprise. Les déboires de Yahoo, l’icône des sites généralistes, projettent une lumière crue sur tous ceux qui assoient leur croissance sur le marché publicitaire. Ses difficultés ” vont avoir un impact sur tous les grands acteurs en ligne “, prédit John Corcoran, l’analyste de la banque CIBC, en citant MSN, NBCi, Ebay, Amazon, Priceline…Safa Rashtchy, l’expert de US Bancorp Piper Jaffray, s’inquiète pour sa part du sort des portails plus modestes, très dépendants de la publicité online, comme Exciteathome, Altavista, Terra Lycos ou encore Starmedia. ” Ils seront frappés encore plus fort “, assure-t-il.

Baisses en cascade

Chose promise… Jeudi 8 mars, à peine 24 heures après la révision à la baisse de ses prévisions de chiffre d’affaires pour le 1er trimestre, l’action du moteur de recherche Terra Lycos chutait de 6 points, le titre CNET, site d’informations technologiques, perdait 11 % de sa valeur et Doubleclick, l’expert en marketing sur internet, reculait de 9 points. Dans la foulée, Starmedia était montré du doigt par l’analyste de Crédit Suisse First Boston. La performance 2001 de ce réseau de portails destiné au public espagnol et portugais serait, annonça-t-il, 20 % inférieure aux prévisions.Seul le géant AOL-Time Warner semble résister à la contagion. “ Peu importe ce que les autres disent, toutes les entreprises ne souffrent pas “, a déclaré publiquement Bob Pittman, directeur financier du groupe. Avec un certain succès : ” AOL sera sans doute touché, mais moins que les autres “, juge ainsi John Corcoran. Car le groupe est beaucoup moins dépendant des annonceurs du web. Quand Yahoo réalise 80 % de son chiffre d’affaires dans la publicité en ligne, le même poste chez AOL-Time Warner ne représente que 24 % du total. L’empire multimédia se nourrit du câble, des abonnements à internet, de ses ventes de magazines… et digère beaucoup mieux le ralentissement d’une partie de ses recettes. En plus, souligne John Corcoran, AOL-Time Warner dispose d’une ” clientèle payante “. Les 28 millions d’abonnés à AOL versent leur écot tous les mois. On leur vendra donc plus facilement de nouveaux services. La vieille fracture entre les tenants de la gratuité et du payant s’ouvre à nouveau.Les 185 millions de visiteurs mondiaux revendiqués par Yahoo sont, eux, de vieux habitués de la gratuité. Et lorsque la direction du portail, désireuse de diversifier ses rentrées, leur propose soudainement un service personnalisé payant, ils se rebiffent.
Si vous demandez deux à trois dollars par mois pour fournir des services sur mesure, le client se fâche et s’en va “, dit Safa Rashtchy, en s’appuyant sur la piteuse expérience passée de Yahoo. Quand la société a réclamé à ses fidèles de 25 cents à 1,20 dollar (de 0,27 à 1,3 euro) pour inscrire des objets à vendre aux enchères, 90 % des offres ont disparu.Il paraît donc difficile de parier sur les seuls nouveaux services payants pour combler l’éventuelle disparition des bandeaux. Mieux vaut encore tabler sur la pub. Mais pas celle des start-up, si l’on en croit les analystes. “J
e compte sur une réduction de 80 % des rentrées de dot-com en 2001 chez Yahoo “, écrit Lanny Baker, de la banque Salomon Smith Barney. Safa Rashtchy constate ” une baisse de 35 à 40 % des dépenses marketing des dotcom au premier trimestre “. Et l’expert de US Bancorp, Piper Jaffray, de se tourner vers les représentants de la vieille économie : ” À un certain moment, Yahoo devra s’aligner sur les demandes des entreprises traditionnelles, et ne pas se contenter de leur offrir des bannières ou du sponsoring “, dit-il.

Le retour des anciens

Les chantres de la nouvelle économie devront faire preuve d’ouverture et de souplesse pour séduire ceux qui sont encore riches ?” les annonceurs traditionnels. Encore faut-il ” que ces publicités marchent “, note Tomas Isakowitz, de la société de Bourse Janney Montgomery Scott, en suggérant un enrichissement du contenu média de Yahoo pour séduire ces prospects. Là encore, les professionnels citent en exemple AOL-Time Warner. Le géant, selon Lanny Baker, réussit à prélever 90 dollars (100 euros) par an en publicité et e-commerce sur chacun de ses abonnés, quand Yahoo doit se contenter d’à peine 12 dollars. Ce faible niveau de recettes expliquerait pour beaucoup, le départ de Tim Koogle.”Les usagers de Yahoo sont aussi nombreux que tous les lecteurs de journaux, qui génèrent 40 milliards de dollars de publicité par an “, s’emporte Lanny Baker. L’analyste de Salomon Smith Barney redécouvre l’efficacité des médias classiques. Et suggère fortement à Yahoo, en quête d’un nouveau président, de simplement puiser dans ce vivier. D’autres pointent vers l’étranger : l’international ne pèse aujourd’hui que 15 % du chiffre d’affaires maison. ” Il faut en extraire le jus “, conclut John Corcoran. Bref, beaucoup de pistes à explorer. Mais vite.Qui parvient à séduire les internautes confirmés ?













































 
   45,30% 
     
   37,20% 
     
   32% 
     
   30,80% 
 
Nombre d’internautes “ confirmés “* ayant visité le site (connexion en 1998 et avant).
* Utilisateurs connectés à internet depuis plus de deux ans.

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Caroline Talbot, à New York