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WikiLeaks au cœur d’une nouvelle polémique avec l’affaire Dutroux

Le site spécialisé dans la révélation de documents sensibles publie les auditions du pédophile belge Marc Dutroux et celles de personnes entendues qui n’ont pas été mises en cause.

Il n’y a pas si longtemps, WikiLeaks était en proie à des difficultés financières menaçant son existence même. Apparemment, le site spécialisé dans la révélation de dossiers secrets très sensibles semble aller mieux. Il continue ses activités et occupe même de plus en plus le paysage médiatique. Cet été, il s’est retrouvé dans le collimateur du Pentagone pour avoir publié des documents sur les opérations de l’Otan en Afghanistan. Amené à être hébergé par le Parti pirate en Suède, il fait scandale cette semaine, en Belgique, en révélant des documents confidentiels concernant l’affaire Marc Dutroux.

WikiLeaks a mis en ligne le résumé d’auditions du pédophile belge arrêté en 1996, jugé en 2004 et condamné à la prison à perpétuité. Ce document, qui compte 1 235 pages (en français, au format PDF), fait partie du dossier constitué en 2005 avant d’être transmis au juge d’instruction. Etrangement, il ne s’agit pas de l’une des dernières « fuites » du site (« leaks » signifie « fuites » en anglais) ! Ce dossier y figure depuis le 17 avril 2009. Mais le procureur général de Liège a fait part de ses critiques hier sur la RTBF. Depuis, la polémique enfle dans le pays.

D’autant que l’origine du dossier mis en ligne est plutôt sulfureuse. C’est un journaliste luxembourgeois, Jean Nicolas, qui l’a fourni. A une époque, selon la RTBF, il le vendait contre 30 euros sur son site L’Investigateur. Ce qui lui avait valu un mandat d’arrêt international pour vol.

Des critiques de la presse

Ce n’est pas tout. Non seulement WikiLeaks ravive une affaire, vécue comme un drame national à l’époque, mais aussi, comme à son habitude, il a publié les documents bruts de décoffrage. Autrement dit, avec quantité d’informations personnelles (téléphones, adresses, relevés bancaires), de détails de l’enquête, de témoignages, de noms de personnes. Y compris de personnes simplement entendues à l’époque et qui n’ont pas été mises en cause. Ou de personnes dont le témoignage n’a pas été pris en compte.

Pour le procureur, l’initiative de WikiLeaks relève d’une « d’une publication malheureuse, parce que les documents publiés viennent d’un dossier qui est toujours couvert par le secret d’instruction », le père de l’une des victimes de Marc Dutroux est également monté au créneau.

La méthode de WikiLeaks, un temps salué comme un modèle d’indépendance et d’audace, atteindrait-elle ses limites ? Ce nouveau coup d’éclat intervient à un moment où le site commence à essuyer des critiques, même du côté de la presse. La Croix a publié par exemple un article titré « WikiLeaks, une organisation opaque coutumière des révélations ».

Sur Mediapart, le blogueur Olivier Cimelière pose la question : « WikiLeaks, renaissance du journalisme ou imposture médiatique ? ». Quant à Reporters sans Frontières, il a dénoncé « l’incroyable irresponsabilité » du site – qu’il soutient par ailleurs – lors de la révélation des documents sur la guerre en Afghanistan. Ceux-ci contenaient des noms de civils afghans qui collaborent avec les Alliés dans la lutte contre les talibans, au risque d’en faire des cibles. Amnesty International et d’autres ONG ont également critiqué WikiLeaks.

Dans le même temps, le fondateur du site, Julien Assange, devait faire face à une opportune accusation de viol par la justice suédoise. Laquelle a retiré ses charges le jour même, tout en indiquant poursuivre son enquête.

Et vous, que pensez-vous de WikiLeaks ?

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Arnaud Devillard