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Walter Butler (Butler Capital Partners) : ” Même dans ses excès, Internet a levé des tabous “

Ancien inspecteur des Finances, Walter Butler estime que l’éclatement de la bulle Internet laissera des traces. Mais, selon lui, elle a été aussi bénéfique aux entreprises.

Walter Butler, le condottiere de l’immobilier et de la pub des années 1990, est aujourd’hui investisseur dans les nouvelles technologies. Ses cibles : des sociétés au business ” lisible “, réalisant entre 50 et 750 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Nouvel Hebdo : Quelle part attribuer au capital-risque dans le krach des ” technos ” ?

Walter Butler :
La responsabilité est assez bien partagée. Nous avons tous commis des erreurs ou des excès. Il est vrai que le phénomène de gonflement de la bulle financière a été exceptionnel. En quinze ans de métier, je n’avais jamais vu ça. Le cycle de vie d’une société en portefeuille se réduisait à dix-huit mois, au lieu de quatre ou cinq ans en temps normal. Le capital-risque en a profité, et il est difficile de le lui reprocher.Quelles leçons le capitalisme français en a-t-il tirées ? Je crois que la bulle Internet laissera des traces durablement, y compris au sein des grandes entreprises. De très grands groupes ont été déstabilisés, ce qui n’est pas spécialement positif, mais aura permis de lever un certain nombre de tabous. Des patrons de grands groupes ont soudain vu leur rejeton gagner plus d’argent qu’eux-mêmes. On ne peut pas parler d’un mai 1968 mais, chez certains, une petite révolution s’est tout de même opérée. Internet, jusque par ses côtés aberrants, a incité l’économie traditionnelle à se bouger. Même la veuve de Carpentras, perdante en Bourse, a indirectement gagné grâce à ce phénomène. Et le capital-risque, a-t-il, lui aussi, appris quelque chose de l’éclatement de la bulle ? Si l’on doit absolument faire son mea culpa, la profession a commis un péché de jeunesse. Les fonds, relativement nouveaux en France, recevaient 300 dossiers par trimestre, et n’avaient pas la capacité de gérer ces flux. Et puis c’est humain : nous avons tous été sensibles à la mode des start-up. Où en est le capital-investissement en France ? Les sommes investies ont progressé très vite. De 1,22 milliards d’euros investis en 1996, nous sommes passés à 5,36 milliards l’année dernière, et 2001 devraient être à nouveau un bon cru. La France a acquis la première place en Europe continentale, devant l’Allemagne. Y a-t-il toujours de l’argent. Et si oui, pour quels types de projets ? Il y a beaucoup d’argent disponible, et en même temps, il n’y en a pas. Cet argent reste caché, notamment pour les petits projets. Or il est impératif d’aider à la base les créateurs. Dans capital-risque, il y a ” risque “. Des secteurs entiers sont jetés aux orties, vraisemblablement à tort. Aujourd’hui, on ne jure plus que par la technologie pure. Mais il faut bien reconnaître que, dans ce domaine ?” comme dans le militaire ?” la domination américaine est écrasante.Vous-même êtes réputé pour investir à contre-courant. Quels territoires suscitent votre appétit ? Nous ne nous désintéressons pas a priori des sociétés de contenu, de l’e-commerce et des places de marchés, tous ces secteurs qui ne sont plus vraiment à la mode. La distribution en ligne a aussi, à mon avis, un avenir immense, qui pose d’ailleurs de sérieuses questions à de très grands secteurs.Que représente aujourd’hui l’univers des nouvelles technologies, au sens large, dans votre portefeuille ?Environ 5 %. Mais je compte bien augmenter cette part, qui devrait passer à 10 % à terme. Nous regardons de près les bonnes affaires, qui ont actuellement des problèmes de trésorerie ou de gestion. Rester opportunistes est notre leitmotiv. Mais, nous investissons aussi dans des SSII comme Osiatis.Regardez-vous également des sociétés qui sont déjà cotées en Bourse ? De plus en plus. Notre philosophie, dans ce cas, est de faire des offres amicales, mais rarement pour quelques pour-cent seulement. Nous voulons être des partenaires de référence.Quelles méthodes de valorisation préconisez-vous ? Oh, il n’y a pas qu’une seule méthode, il n’y a pas non plus de règles. Nous investissons réellement à long terme (cinq ans en moyenne), sur des projets d’entreprise cohérents. Nous souhaitons obtenir des rendements sensiblement supérieurs à ceux de la Bourse.

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Jean-Jérôme Bertolus et Jean-Michel Cedro