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Voteriez-vous pour leur site ?

Deuxième épisode de notre exploration des cybertribunes de candidats à la présidentielle du printemps prochain: cette semaine, l’extrême gauche. Olivier Besancenot, le candidat de la Ligue communiste révolutionnaire, ne révolutionne pas le web. Facteur de son état, il ne dénigre pas pour autant les e-mails. De son côté, Arlette Laguillier, égérie de Lutte ouvrière, préfère les caméras aux modems…

Camarades bidouilleurs
LCR

Parler avec le webmestre de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) n’est pas une mince affaire. Quinze jours d’attente ! Éternelle méfiance des partis révolutionnaires face à la presse bourgeoise ? Pas du tout ! Fred Speelman, créateur du site de la LCR et de Rouge (le magazine de l’organisation), assure que ce délai n’était dû qu’à la carte prépayée de son téléphone portable, qu’il n’avait pas assez d’argent pour renouveler… Actuellement en stage de graphisme 3D (son futur métier), ce trentenaire a lancé www.lcr-rouge.org en 1997. “J’étais maquettiste à Rouge, et je ne connaissais pas grand-chose à internet. J’ai donc potassé des bouquins.” Bouts de ficelle aujourd’hui encore : “Le site, qui reçoit entre 3 000 et 5 000 visites par mois, a un budget vraiment très modeste ?” environ 750 euros [5 000 francs, ndlr] par an ?” auquel il faut ajouter l’achat d’une petite caméra numérique qui sert à filmer les meetings et les manifs. En janvier, nous lancerons www.2002electionspresidentielles.net, un site consacré à notre candidat, Olivier Besancenot. Plus tard, mon rêve, ce serait de monter une télé de la LCR sur le web…

Le bureau politique ne se vexe pas

Rue Richard-Lenoir à Montreuil, métro Robespierre (ça ne s’invente pas), le siège national de la Ligue communiste révolutionnaire et de Rouge est presque impossible à trouver. Pas d’adresse sur l’immense porte blindée, pas de sonnette visible… Quelqu’un finit par réagir aux coups insistants que nous frappons sur cet huis peu engageant, en nous expliquant que la Ligue est parfois attaquée, et que le blindage s’impose… Nous accédons aux bureaux en passant par l’imprimerie du parti, un vieux bâtiment industriel au bord de l’épuisement. Le bureau d’Alain Krivine, leader historique de l’organisation trotskyste, est d’un dénuement total, comme celui des responsables du site, Delphine et Madjid, aidés dans leur tâche de réactualisation quotidienne des pages par Corinne, Charlotte et Amaelle, journalistes à Rouge. Ils sont jeunes (entre 23 et 33 ans) et chaleureux. Militants certes, mais pas obtus : “Notre site pourrait être plus interactif, et malgré notre forum ouvert à tous, il reste encore à le rendre plus accessible aux non-militants.”Autonomes dans leur travail, ils précisent : “On tient compte des desiderata des membres du bureau politique. Mais, lorsqu’il nous arrive de les envoyer balader, ils ne se vexent pas, et ils nous laissent faire.” Au métro Robespierre, on ne rêve plus de faire rouler les têtes…

Arlette reste en classe touriste
LO

D’abord, on croit à une blague. On se dit qu’il doit s’agir du site d’un fan du parti, qui a bricolé quelques pages tout seul dans son coin. Des kilomètres de déclarations et de discours militants livrés en bloc. Sans photo, sans même une illustration, ni l’ombre d’un forum. Mais non, ce n’est pas un fan isolé, il s’agit bien du site officiel de Lutte ouvrière (LO), www.lutte-ouvriere.org. On pense alors que cela ne peut être qu’une page temporaire, que LO nous concocte pour bientôt un site aussi punchy qu’Arlette devant les micros, et que demain “l’Internationet” sera le genre humain… On décroche alors son téléphone pour solliciter une interview de la passionaria des meetings mais, après de nombreuses tentatives, on fait chou blanc chez les rouges.Succédant à la période des “Promis, on en parle à Arlette”, vient le temps des “On verra, mais ces jours-ci, Arlette est au Parlement européen”, avant le couperet final : “Cette interview à propos d’internet, vous savez, nous ne sommes pas sûrs de vous l’accorder.” Et rencontrer votre webmestre, ce serait possible ? “Notre… comment dites-vous ?” Webmestre : le responsable du site. “Ah oui… écoutez, hummm… À dire vrai, on ne sait même pas qui s’en occupe.” Quelques jours après, coup de grâce : “Nous ne sommes pas au point sur internet, nous préférons ne pas en parler.” Dommage, répondons-nous, vos amis de la LCR ne sont pas spécialement au point, mais, eux, ils ont accepté d’en parler. Dernière fin de non recevoir. Il ne reste plus qu’à tirer le rideau rouge. Mais imaginer Le Nouvel Hebdo parler de la LCR et pas de LO nous valut, in extremis, un coup de fil du webmestre fantôme, François Rouleau, 51 ans, prof de math, et plutôt méfiant. Mais qui joua finalement franc jeu : “Notre site n’est pas sophistiqué, c’est vrai. Nous voulions que les gens munis d’un navigateur ancienne version, ou d’un modem lent, puissent accéder à nos pages sans problème. Nous nous sommes donc passé des fioritures qui ne sont pas accessibles à tout le monde. Car nous n’avons qu’une priorité, le contenu.” Madame Laguillier s’implique-t-elle personnellement dans le site de LO ? “C’est le site de l’organisation, pas celui de la candidate, que nous ferons plus tard. Donc, pour le moment, Arlette n’est pas vraiment dans le coup.” C’est le moins qu’on puisse dire…

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Gilles Chenaille