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Une méconnaissance du droit généralisée

La nature des relations qui s’établissent entre donneurs d’ordres et prestataires et l’ignorance de la loi concourent à maintenir le risque de l’illégalité.

Prestataires, donneurs d’ordres et même avocats le reconnaissent : le délit de marchandage est méconnu, les peines encourues le sont encore plus, et la faute est commise en parfaite bonne foi.” Certaines SSII semblent avoir une ignorance totale de la règle sociale, affirme Eric Desforges, juriste à la direction des affaires juridiques et immobilières de Fiat France. J’ai vu des cas où elles écrivaient elles-mêmes les contrats qui nous faisaient des risques pénaux à tous les deux. “Difficile, pour un juriste, de convaincre son interlocuteur si celui-ci travaille de la même façon depuis trente ans. “Les SSII s’imaginent à chaque fois que l’on veut négocier le prix”, commente Eric Desforges. “Elles sont plus préoccupées par leurs relations avec le client, leur image de marque, que par les contrats, estime Jean-Luc Gardie, fondateur de Web-Profils. En dessous de cinq cents salariés, elles n’ont pas de conseiller juridique.”Le juriste sera toujours vu comme un empêcheur de tourner en rond par les opérationnels, celui qui ralentit la machine et nuit à la rentabilité. De son côté, d’un point de vue pratique, un juriste d’entreprise peut difficilement revoir tous les contrats de prestations pour vérification, encore moins faire le même cours de droit à chaque fois. Au moins, il peut s’atteler à la rédaction d’un contrat standard, une manière de limiter les dégâts.

Solution : que les SSII deviennent vraiment des sociétés de travail temporaire ?

Même les quelques condamnations peinent à servir de signal d’alarme. Un donneur d’ordres obligé d’embaucher vingt informaticiens après requalification du contrat de prestation ne va certainement pas l’ébruiter, histoire d’éviter de donner des idées à des salariés de ses autres prestataires. De même qu’on imagine mal un ou deux informaticiens engager une action en justice pour se faire embaucher. Leur carrière chez l’ancien client ne démarrerait pas dans la meilleure des ambiances.En revanche “soixante-dix informaticiens disposent d’une force de frappe suffisante, avertit Jean-Marc Lavallart, avocat associé au cabinet Lamy-Lexel. Ils auront un poids chez le client”. Pour clarifier tout cela, il y aurait bien une solution : que les SSII deviennent vraiment des sociétés de travail temporaire, spécialisées dans l’informatique.Trop simple. “A cause de l’image qu’elles se font de leur propre activité, a constaté Eric Desforges, les SSII ne veulent pas. L’intérim, pour elles, c’est pour les activités manuelles. Elles pensent faire un métier noble, de col blanc.”

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Arnaud Devillard