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Un sonar de dauphin comme moteur de recherche

A l’université de Hawaï, un spécialiste des dauphins a décidé de créer un moteur de recherche pour Internet. Encore un? Oui, mais il utilise le mode de repérage des mammifères marins pour trouver l’info.Par David Groison

Depuis quinze ans, Herbert Roitblat vit à Honolulu. Il y étudie les dauphins, leur façon de se repérer, d’appréhender le monde. Lorsqu’un dauphin a faim, il émet des ultrasons à l’aide de son sonar. Ces signaux parcourent la vaste mer. S’ils percutent un objet ?” un poisson, un rocher, une algue ?”, ils lui reviennent en écho. Le dauphin ne traite pas isolément les différents éléments de l’écho (amplitude, fréquence). ” C’est l’ensemble du signal, et non des critères spécifiques, qui lui permet de comprendre le message “, explique Herbert Roitblat. Le dauphin sait ainsi qu’un poisson, et non un rocher, se trouve à deux mètres droit devant lui, et non à quatre mètres sur la gauche.Fort de ces observations, le chercheur hawaïen a conçu un moteur de recherche qui repose sur le même principe. L’internaute, lui, n’est pas à la recherche de poisson, mais de bonnes informations. Il veut, par exemple, se renseigner sur un modèle de Jaguar construit en 1956. Les ultrasons de l’internaute sont les mots-clés qu’il soumet au moteur de recherche. L’écho en retour est un ensemble de documents, plus ou moins pertinents, trouvés sur le Web. Et ce qui remplace le cerveau du dauphin est un programme informatique qui analyse l’ensemble des documents pour en extraire ceux qui correspondent à la requête.Le système de Herbert Roitblat ne procède pas étape par étape, mais en logique floue, comme un vrai cerveau. A l’image du dauphin qui analyse le signal dans son ensemble, le programme analyse la totalité du document, pas la seule présence du ou des mots-clés, pas plus la fréquence d’un hyperlien judicieux ou la pertinence d’un indice de popularité du site. Non, le système définit un profil sémantique (un modèle de phrase ?” par exemple interrogatif ou affirmatif ?”, le niveau de langue ?” soutenue ou familier ?”, etc.) qui prend la forme d’une série de coefficients et qui définit un contexte. Ainsi dans la masse de documents où figurent Jaguar ou 1956, le moteur identifie ceux qui parlent bien des voitures anglaises construites cette année-là. Dans les réponses filtrées, plus de félin ou d’équipe de football américain homonymes.Quand le dauphin cherche un poisson, il lance des ultrasons au hasard. Mais il donne un sens à sa recherche : il sait bien qu’il est à l’affût d’un poisson à croquer et non d’un beau rocher où se prélasser. L’internaute, lui aussi, doit donner un sens à sa requête. Comment savoir lorsqu’il tape ” Jaguar ” et ” 1956 “, que c’est de voiture qu’il parle et non de l’équipe de foot ? Actuellement, Herbert Roitblat résout le problème avec des moteurs spécifiques, dans notre exemple un moteur dédié aux automobiles. Mais ce n’est qu’un début. ” Le procédé global est très efficace “, note Henry Lieberman, chercheur au MIT (Massachusetts Institute of Technology). Pour une même requête, ce moteur de recherche ” donne de meilleurs résultats que les classiques Altavista ou Yahoo”. Il y a fort à parier que Herbert Roitblat ne résistera pas longtemps à l’appel du large et qu’il plongera bientôt dans le grand bain du Net.Pour en savoir plus : www.dolphinsearch.comProchaine chronique le mardi 4 juillet

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David Groison, journaliste