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TV sur ADSL : déboires et réussites

La France n’a pas inventé la télévision par ADSL, mais elle a su démarrer les bons services au bon moment : la greffe prend. Nous avons (encore ?) un petit leadership mondial en la matière.

Nous ne remercierons jamais assez Free d’avoir, le premier, cru à l’opportunité d’une offre triple sur ADSL (téléphonie IP + Internet + TV) dès 2003. Une offre “tout compris” qui a
coïncidé avec le passage sous la barre des 100 euros du prix du raccordement d’un abonné à un DSLAM compatible vidéo au point d’accès téléphonique.Le culot de Free a en effet obligé France Télécom à réagir en moins de deux mois avec un modèle économique différent, centré “opérateur télécoms” : “Je propose
et je fais payer la liaison ADSL compatible vidéo aux utilisateurs avec le démodulateur associé ; vous, opérateur de télévision, proposez et faites payer votre bouquet de chaînes ; pour tout le reste, nous sommes
indépendants.”
L’arrivée de France Télécom oblige aujourd’hui 9Telecom et bientôt Cegetel à suivre. TPS n’ayant rien à perdre dans l’affaire, il s’est immédiatement associé à France Télécom. Canal Satellite, lui, a, depuis, emboîté le pas, avec un
opportunisme encore plus large que celui de TPS.Par rapport à tout ce qui a pu être dit en septembre et novembre derniers, lors du lancement des offres de Free et de France Télécom, qu’est-ce qui a changé ? Incontestablement, l’offre de Free a énormément plu aux
“amateurs éclairés de technologie”.Son modèle économique associe en effet pour 30 euros par mois une offre (partielle) d’opérateur télécoms, de FAI, de média (l’équivalent d’Astra ou Eutelsat pour le satellite) et d’opérateur télévision (style TPS, Canal Satellite ou
câblo). Revers de la médaille, Free ne peut pas être bon en tout et il y a des couacs, même s’ils ne sont pas rédhibitoires.Par exemple, les coupures, chez Free, cela existe : il faut parfois débrancher et rebrancher la prise de la Freebox pour que “ça remarche”. Des coupures existent aussi en téléphonie.
Certains programmes TV, gratuits à l’origine, sont maintenant payants. Toujours dans l’offre de Free, un bouquet de programmes TV sans TF1, M6 et Canal+ a quelque chose d’un peu frustrant. Ce qui peut décevoir mais est pardonné grâce au prix
imbattable de l’offre. Tout, en outre, s’améliorera pour ce qui concerne le matériel, les fournisseurs de Free nous le promettent.A côté de cela, l’offre de la grande dame France Télécom est clairement réservée à une élite puisque l’opérateur historique ne propose pour sa part qu’un service vidéo sur ADSL avec un modem, comme si les particuliers qui reçoivent un
satellite devaient louer 16 euros par mois leur antenne parabolique et leur décodeur. Mais la qualité de service semble beaucoup plus forte chez France Télécom grâce justement à la structure “qualité de
service”
de son réseau.Free n’arrivera à cette qualité que dans la durée. Notons que les boîtiers-décodeurs de Free et de France Télécom souffrent d’un défaut commun : prise Péritel oblige, le boîtier doit être placé près du téléviseur, donc presque
jamais près d’une prise téléphonique. Le Wi-Fi vidéo étant assez loin de l’étape commercialisation, cela oblige à tendre un fil téléphonique supplémentaire pour relier le boîtier-décodeur à cette prise. Ce qui n’est pas très apprécié.

Une opportunité pour TPS et groupe Canal+

Pour les non-abonnés à TPS, notons que le téléviseur devra à moyen terme rester connecté à l’antenne TV terrestre traditionnelle pour recevoir TF1 et M6, qui ne font partie que de l’offre TPS (peut-être, d’ailleurs, la Free box
intégrera-t-elle ultérieurement un tuner –“terrestre” pour que toutes les chaînes gratuites puissent être gérées à partir du même boîtier).De façon évidente, TPS se considère aujourd’hui comme concurrent de Free et ne veut pas qu’il diffuse son bouquet ; le groupe Canal+ est, lui, plus souple : il verrait bien Canal+ ou même Canal Satellite dans l’offre de
Free. En tout cas, TPS comme Canal Satellite applaudissent à l’arrivée de la TV sur ADSL : en gros, 50 % des foyers en France (12 millions), en habitat isolé, peuvent recevoir facilement un satellite et 40 % de ces foyers
reçoivent déjà un bouquet payant : le potentiel de croissance pour arriver à un taux de pénétration de 70 % est encore fort mais les derniers abonnés seront les plus durs à convaincre.Seulement 3 % à 4 % des foyers en immeuble, par contre, sont abonnés à un bouquet satellite payant ; le potentiel de croissance est donc dans ce cas important. Or c’est justement pour les immeubles que l’ADSL offre les
meilleures performances (les points de raccordement téléphonique sont alors souvent à moins de 2 km). Une complémentarité idéale que les deux opérateurs de télévision payent aujourd’hui encore cher à France Télécom (nous soupçonnons que ce sont
eux qui règlent les 100 euros du raccordement de l’abonné sur le DSLAM).* Rédacteur en chef d’ Electronique International HebdoProchaine chronique mardi 13 avril

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Jean-Pierre Della Mussia*