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Scott McNealy reprend en mains le destin de Sun

Déficit, démissions en série : le géant de l’informatique en réseau compte sur son tonitruant fondateur pour rebondir.

Dans le monde des affaires aux États-Unis, Scott McNealy est célèbre, très célèbre même, pour trois raisons. En premier lieu pour son côté “grande gueule”?” un talent qui fait le bonheur des journalistes et qui s’exerce, le plus souvent, au détriment de son ennemi juré, Bill Gates, fondateur et désormais “architecte en chef des logiciels” de Microsoft. Au sein du club très fermé des patrons de grandes entreprises américaines, Scott McNealy fait aussi partie des tout meilleurs golfeurs. Il pratique le sport comme les affaires, avec une remarquable agressivité. Le “driver”, le club qui permet d’expédier la petite balle blanche le plus loin ?” mais qui est aussi le plus difficile à manipuler ?”, est son arme préférée. Le numéro 1 mondial de la discipline, Tiger Woods, est un ami personnel. Enfin, Scott McNealy est surtout l’auteur de l’une des plus belles épopées de la Silicon Valley de ces vingt dernières années, celle de Sun Microsystems.

Ses serveurs, son Java

En deux décennies, le modeste “Stanford University Network”, fondé dans la célèbre université californienne par une poignée de jeunes gens ambitieux, est devenu l’un des titans de l’informatique de réseaux. Son langage Java est l’un des principaux supports d’internet. Ses serveurs, qui tournent sur une variante exclusive d’Unix, sont l’un des outils de référence du monde des télécommunications. Sun, dont les nombreux “campus” autour de son siège de Santa Clara donnent une idée de l’ubiquité, emploie plus de 43 000 personnes, pèse près de 22 milliards de dollars (24,14 milliards d’euros) en Bourse et a réalisé 18,25 milliards de dollars de chiffre d’affaires l’an dernier.Et pourtant, le groupe qui a transformé Scott McNealy en milliardaire traverse aujourd’hui de sérieuses turbulences. Ses deux débouchés privilégiés ?” internet et les télécommunications ?” se sont pour une large part volatilisés au cours des deux dernières années. La stratégie.Net de Microsoft, la montée en puissance d’IBM, la percée de Dell sur le marché des serveurs équipés de puces Intel et de logiciels Microsoft ont fait au même moment grimper la pression concurrentielle. Sun Microsystems a bouclé à la fin du mois de mars son quatrième trimestre déficitaire consécutif et la perte nette cumulée de l’entreprise dépasse les 700 millions de dollars. Au Nasdaq, son action qui avait atteint un sommet de 64 dollars en septembre 2000 en vaut à peine plus de six aujourd’hui.Et c’est le moment entre tous qu’ont choisi quatre des principaux dirigeants du groupe pour annoncer leur départ. Le directeur financier Mike Lehman, le patron des services informatiques Larry Hambly et celui des serveurs John Shoemaker tireront leur révérence dans les mois qui viennent. Mais c’est incontestablement la démission du numéro deux, le “Chief Operating Officer ” Edward J. Zander, qui fait le plus mal: sa simple annonce a provoqué le 1er mai une chute de cours de l’action Sun de 15 % en une séance. Vendeur policé et efficace, connu pour son calme en toutes circonstances, Edward Zander était perçu comme le parfait complément du volcanique PDG.

N1, le défi McNealy

À 47 ans, voilà donc Scott McNealy contraint de se réinstaller dans le fauteuil de patron opérationnel laissé vacant par Edward Zander, pour se mettre en quête d’un quatrième titre de gloire : avoir su réinventer Sun, le tirant ainsi de l’un des plus mauvais pas de son histoire. On s’en doute, Scott McNealy est sûr de son succès. Mieux : il a un plan, qui tient en une lettre et un chiffre, N1. C’est ainsi qu’est pour l’instant désignée en interne une stratégie mêlant logiciels et “hardware” destinée à faire en sorte que toutes les ressources informatiques d’une entreprise, qu’il s’agisse d’ordinateurs de bureau sous Windows, de serveurs Sun, de routeurs Cisco ou de plateformes Linux, puissent fonctionner ensemble, à la manière d’un ordinateur unique…La partie n’est pas gagnée d’avance. Les analystes de Goldman Sachs s’attentent à voir le chiffre d’affaires de Sun dégringoler d’environ un tiers cette année. On attend non seulement de Scott McNealy quil parvienne à relever le défi, mais aussi à reconstituer autour de lui une solide équipe dirigeante. Pour rassurer Wall Street. Et aussi pour préparer sa succession.* à New York

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Thomas Maurice*