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Salon de la photo : le reflex sur la pente raide

Jusqu’ici préservé, le marché du reflex numérique sombre depuis 6 mois : entre 20 et 30% de baisse des volumes de ventes. Les causes ? Le renforcement des hybrides, un marché morose et … la coupe du monde de football.

Les smartphones ont fait du mal au marché des compacts, mais qui est en train de siphonner celui des reflex ? Très en forme depuis plusieurs années, le reflex numérique connaît depuis mai 2014 une baisse des volumes de vente encore jamais vue : entre -20% et -30% par rapport à 2013. Un effondrement qui a surpris tout le monde et qui pourrait redistribuer les cartes à moyen terme dans ce monde de la photo, pourtant très conservateur.

Les hybrides en bénéficiaires

Selon les chiffres GFK qui devraient être bientôt annoncés, l’année 2015 s’annonce aussi très difficile pour les constructeurs de reflex : l’expert européen des analyses de marché table sur une baisse de 20% pour l’année à venir, chiffre contesté par Claire-Anne Devillard, chef de groupe marketing chez Canon France, qui table « plutôt sur une baisse de 7% ». Méthode Coué ou analyse fine des tendances, peu importe, la baisse sera là.
Mais à qui profite le crime ? « En partie au marché des hybrides », explique Elise Dupuis, chef de la division photo de Sony France. En partie seulement, car les hybrides ne représentent qu’une fraction du marché reflex : en 2014, il devrait se vendre 385 000 reflex en France contre « seulement » 125 000 hybrides. Mais la hausse du marché hybride que GFK chiffre pour 2015 à environ 25% devrait renforcer la tendance que l’on voit s’établir en Asie, c’est à dire un marché hybride supérieur à celui du reflex.

Les raisons techniques

« Les gens ont intégré que les hybrides proposent la même qualité d’image que celle des reflex mais proposent de nombreux avantages », poursuit Elise Dupuis. Il faut dire qu’en moyenne, les hybrides sont 30 à 50% plus petits et légers que reflex. A 01net, nous constatons tous les jours par le biais des lancements produits : entre Panasonic, Fujifilm, Olympus, Sony, Samsung, mais aussi Nikon, l’offre est devenue pléthorique. La progression technique a été fulgurante et aujourd’hui les meilleurs hybrides tutoient largement les reflex, voire les dépassent dans de nombreux domaines. On pense au GH4 de Panasonic qui filme en 4K, à l’OM-D E-M1 qui fait le point plus vite que l’éclair. Bref, côté technique, les hybrides sont enfin légitimes.

Vases communicants et coupe du monde de football

« La baisse du marché des reflex n’est pas uniquement influencée par la migration des utilisateurs vers les hybrides », rassure Jean de Gasté, chef de produit reflex chez Nikon. « Elle est aussi liée à la conjoncture : le prix moyen de reflex est plus élevé dans une Europe en crise. Tous les acheteurs potentiels de reflex n’ont pas sauté le pas de l’hybride loin de là, puisque c’est tout le marché de la photo qui baisse. » A cette raison comptable s’ajoute une autre raison, plus surprenante : « Il n’y a pas que le marché de la photo qui souffre, toute l’électronique a souffert. Toute, sauf la télévision et pour une bonne raison : la coupe du monde de football ». L’achat d’un téléviseur amputerait logiquement le budget annuel électronique des foyers français et Européen. Loin d’être un mythe, l’effet Coupe du Monde peut avoir des effets incroyables, la qualification d’une équipe aux phases finales de la compétition pouvant conditionner l’achat ou non d’un nouveau poste. Darty, Boulanger et consorts tremblaient sans doute très fort à chaque tentative des adversaires des Bleus !

Le marché reflex encore majoritaire

Sensible à ces chiffres mais pas alarmé, Jean de Gasté de Nikon France se veut confiant. « Oui la baisse est importante, mais il faut tout de même rappeler que le marché du reflex est encore largement majoritaire ». Une vérité à court terme, mais il est évident que les deux géants du secteur que son Canon et Nikon doivent se poser des questions. Car si les deux mastodontes se partagent 90% du marché reflex, laissant à Sony et Pentax quelques miettes, elles sont à la traîne dans le domaine des hybrides.
« Je pense que le marché va continuer de se resserrer, mais les reflex et notamment le plein format vont continuer d’occuper le haut de gamme », poursuit Jean de Gasté.
Chez Canon, l’analyse est plus orientée vers la perception des produits. En s’appuyant sur une étude Ipsos, Claire-Anne Devillard nous montre, chiffres à l’appui « qu’en terme de qualité d’image, le reflex est largement plébiscité par les consommateurs », des consos qui considèrent, selon le graphique, que les bridges offrent une meilleure qualité d’image que… les hybrides ! Il est clair que côté communication, des derniers ont encore du chemin à faire…

…mais pour combien de temps ?

La confiance affichée des constructeurs de reflex se heurte tout de même aux tendances de ventes, qui vont dans le sens des hybrides, et aux résultats des tests que nous publions ici. Rares sont les reflex à vraiment innover, quand les hybrides ne cessent de nous surprendre. Une tendance qui se retrouve dans le discours de Sony : « Avec l’Alpha A7 et ses différentes déclinaisons, nous avons prouvé que les hybrides pouvaient aussi faire du plein format et intéresser les professionnels », argumente Elise Dupuis de Sony France. « Même si nous proposons toujours des reflex à nos clients et continuerons à le faire tant qu’il y a de la demande, nous le disons clairement depuis le lancement de nos premiers hybrides en 2010 : pour Sony, le futur de l’appareil à optiques interchangeables, c’est l’hybride. »

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