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Rien n’est trop beau pour séduire les start up

Décidément, rien n’est trop beau pour séduire les start up. Les fournisseurs informatiques ont commencé par leur octroyer des réductions royales – jusqu’à 75 %. Ils…

Décidément, rien n’est trop beau pour séduire les start up. Les fournisseurs informatiques ont commencé par leur octroyer des réductions royales – jusqu’à 75 %. Ils leur concoctent désormais des programmes spécifiques pour accompagner leurs premiers pas : aide à la rédaction de business plans, appui logistique, mise en relation avec des grands comptes, programmes marketing, financements personnalisés, voire apport de capital. Autant de services qui sont habituellement davantage du ressort des incubateurs et des accélérateurs que de celui des constructeurs ou des éditeurs.Cette confusion des genres n’alarme pas les structures traditionnelles d’aide aux jeunes pousses. “Tant mieux si IBM ou Hewlett-Packard s’intéressent aux start up : ils rachèteront les éditeurs que nous avons soutenus”, se réjouit Philippe Hayat, président de l’incubateur Kangarro Village. Les besoins semblent trop importants pour redouter la concurrence. “Sur le millier de projets intéressants qui sortent chaque année, poursuit-il, nous n’en sélectionnons que dix.”

La prise de participation nest plus taboue

La net économie a bousculé bien des schémas établis et les grands noms de l’informatique ont dû repenser leur rôle. Ils ne rechignent plus à traiter avec des start up n’ayant que quelques semaines d’existence. Avoir levé ses premiers fonds n’est plus un préalable pour intéresser un grand de l’informatique. La qualité du projet prend le pas sur toute autre considération financière. Même la prise de participation dans le capital des clients n’est plus un sujet tabou. Certains fournisseurs, comme la société de services PricewaterhouseCoopers, se sont d’ailleurs dotés d’un fonds d’investissement propre. IBM préfère encore avancer masqué, via les fonds d’investissement qu’il finance. “Ce n’est pas notre métier que d’évaluer les sociétés “, justifie Virginie Haas, responsable pour la France et le Benelux du programme Netgen d’aide aux fournisseurs de services internet, loueurs d’applications en ligne et autres dot com. Hewlett-Packard reconnaît, pour sa part, investir dans le capital de ses clients. Mais uniquement lorsqu’il s’agit de projets stratégiques pour son activité. Si ces prises de participation restent exceptionnelles – les faillites de quelques start up renommées incitent à la prudence -, elles traduisent néanmoins le profond changement des relations qui lient fournisseurs informatiques et start up. Parmi les grands constructeurs impliqués dans internet, seul Sun se démarque radicalement de ses concurrents. Il s’en tient à une relation commerciale classique et refuse de se poser en partenaire. “Notre mission n’est pas de faire du ” pouponning “, argumente Eric Mahé, responsable marketing France de Sun Developper Connection, mais de livrer des outils d’infrastructure.”A l’opposé, Hewlett-Packard estime que son métier traditionnel a été complètement transformé par internet. “L’infrastructure n’est plus qu’une commodité, au même titre que l’énergie “, estime Robert Lasserre, responsable commercial pour l’Europe des e-services. HP se positionne désormais plus comme un fournisseur de services internet que comme un fournisseur d’outils. Et, de ce fait, il n’hésite plus à s’impliquer dans le projet de ses clients. Ce qui l’amène à se prononcer sur la pertinence de leur modèle économique. Dès lors, la seule prise en compte des contraintes techniques ne suffit plus et le constructeur doit aussi verrouiller les aspects commerciaux et financiers. Ce dernier point est d’ailleurs essentiel. Et, à écouter Hewlett-Packard, les start up en redemandent. “On nous propose souvent d’investir dans les projets que nous avons validés “, indique Robert Lasserre. Et lorsque les start up ne sont pas demandeuses, c’est HP qui prend les devants. “Notre premier tour de table était déjà clos quand HP nous a demandé d’entrer au capital “, se rappelle le directeur financier d’une start up.

Le ” billet bleu ” plus recherché que le billet vert

Le soutien financier d’un fournisseur informatique est un signal fort envoyé au marché. Bien sûr, l’entrée au capital est vue comme le must par nombre de start up. Toutefois, certains entrepreneurs craignent des conflits d’intérêt à moyen ou long terme (voir ” L’avis d’expert ” de Pierre Cuny). Mais compter un grand constructeur parmi ses partenaires financiers apporte indiscutablement une caution. L’éditeur français Sharing Technologies a bénéficié de prêts de la part d’IBM. Pour son PDG, Pascal Ollivier, c’est une aubaine, qu’il résume par une formule choc : “Un “dollar bleu” a plus de valeur qu’un dollar vert.” A choisir, il préfère être financé par IBM, familièrement appelé Big Blue, plutôt que par un capital-risqueur anonyme. Et même si sa société se teinte en bleu, cet inconvénient est mineur au regard des différents avantages attendus : meil-leure visibilité sur le marché et développement plus rapide du chiffre d’affaires.Les grands noms de l’informatique ont de sérieux atouts pour séduire les start up. Ils bénéficient notamment d’une aura qui dépasse largement leur marché d’origine : les marques informatiques sont aujourd’hui parmi les mieux valorisées, tous secteurs d’activité confondus. De plus, leur compréhension globale des projets internet leur permet de bâtir des plans de financement originaux.Hewlett-Packard a ainsi mis en place des plans de remboursement indexés sur le niveau d’activité. La start up Outrade. com, qui s’est lancée dans la location de services de messagerie internet, a été l’une des premières à en bénéficier en France. HP a fourni les serveurs et les équipes pour déployer le serveur de messagerie de Software. com. Mais il ne se paiera que lorsque l’activité de la start up française commencera à décoller. Il arrive aussi à IBM de recourir à ces pratiques et de se rémunérer sur les résultats.Cette implication dans la réussite des clients impose néanmoins de nouvelles contraintes. “Ce n’est pas un problème de travailler avec des clients ayant des activités concurrentes, nous nous imposons toutefois une règle de transparence.”Et, dans la mesure du possible, le constructeur va chercher à mettre en avant une synergie entre ses clients pour bâtir son fameux écosystème. Le fournisseur ne met pas seulement en relation les start up entre elles : il ouvre aussi les portes des grands comptes. “Sans IBM, je n’aurais jamais pu traiter avec General Motors “, analyse Pascal Ollivier. Les grands constructeurs ont leurs entrées dans les plus grandes entreprises. Et ils n’hésitent pas en faire bénéficier les jeunes pousses qu’ils placent sous leur aile. La start up Magic Axess, qui vient de s’équiper à tarifs préférentiels en matériel chez Sun, compte ainsi sur son fournisseur pour lui ouvrir les portes de clients – à l’étranger, notamment.Ces nouvelles relations de partenariat que tissent constructeurs et clients se limitent aujourd’hui aux start up. A l’avenir, elles pourraient être étendues à l’ensemble des clients. Les jeunes pousses constituent le laboratoire d’expérimentation des nouvelles pratiques des grands constructeurs dans la net économie.

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Olivier Roberget