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Remettez-moi ça !

De start-up en holdings, journal de bord d’un cadre de la nouvelle économie. Il se confie sous pseudo pour parler ?” et parfois crier ?” plus librement…

Toute forme de vie, même celle que nous menons au bureau, a tendance à se reproduire. Et pas seulement au sens figuré. Cet éternel retour du “même” emprunte parfois le chemin le plus souterrain pour arriver à ses fins : la voie génitale. Les mystères de la vie de bureau sont insondables, mais pas la libido de ma directrice générale. Je vous ai en effet raconté récemment comment j’avais retourné ma veste ?” et les sous-vêtements de notre chère numéro 2 ?” en croquant la pomme avec cette faiseuse professionnelle de pépins. Ce à quoi j’aspire en fait, au-delà du plaisir volé sur la moquette onctueuse de son bureau, c’est à donner naissance à d’autres étreintes, qui assouviront ad libitum notre faim de combat.Car ici, nous ne connaissons et ne voulons connaître que ça : la castagne bureautique. Et faire l’amour avec un collègue, que le Kama-sutra et la hiérarchie le placent ou non au-dessus de vous, ce n’est que continuer le combat par d’autres moyens. C’est l’éponge du soigneur qui revigore le boxeur envapé. Charlotte et moi en avions la prescience : sans cet épisode sexuel, notre haine aurait molli ! Alors que là, nous repartons sur de solides bases pour nous entretuer. Dès le lendemain de nos exploits, elle me snobait, et m’humiliait de plus belle lors du comité de direction. Ce qui m’a permis de la détester plus encore. Et de nous exposer à la haine de Roland, notre boss, qui la désire depuis le début. Nous pouvions ainsi garder nos bonnes habitudes… Mais cela ne résout pas tout le problème : comment retourner sur la moquette avec Charlotte, qui semble ne plus vouloir de moi ? Comment sauver ce processus de guerre ? En frappant le mâle supposé dominant, Roland. Ce qui me vengera au passage de l’humiliation qu’il m’avait fait subir, il y a trois semaines, lorsque j’avais émis des doutes sur sa dernière lubie : le fameux cimetière virtuel pour chiens, Anoschersamis.com, que nous avons lancé à grand fracas, et qui saigne allégrement tous les gogonautes en deuil de leur chère bête. Charlotte voulant se faire valoir auprès de Roland pour rentrer à nouveau en grâce, j’ai usé du chantage. “Je te trouve une idée géniale, mais seulement si tu cèdes à nouveau à ton désir pour moi !”Osé, n’est-ce pas ? Mais elle croit si peu en mes idées qu’elle a dit oui. Erreur ! J’ai pondu un concept qui a définitivement assuré le succès du site. En montant de vieux films envoyés par les clients en deuil, puis en les passant par un logiciel de retouche, nous pouvions leur proposer ce nouveau service (1 000 francs l’inscription) : “Redonnez vie à votre chien défunt en le regardant courir sur Anoschersamis.com ! Grâce au ” streaming ” vidéo et à nos effets spéciaux, il gambadera et jappera à nouveau, pour des siècles des siècles.” J’ai soufflé à Charlotte un système de ponction supplémentaire (9 francs la minute) pour visionner par tranches ce qu’ils avaient déjà payé. Roland a adoré. Charlotte a donc été obligée de tenir parole sur la moquette… Et comme j’avais, à dessein, déverrouillé la porte du bureau, Roland nous a vus. Il a détesté. J’étais donc vengé, et il allait inévitablement se venger de cette vengeance. Cest ainsi que se reproduit la vie de bureau…

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La rédaction