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Quelle filière suivre pour quel débouché

La casquette e-business se porte bien. Dans les SSII et les agences web, mais aussi dans les grandes entreprises.

La première vague de jeunes diplômés issus des formations e-business débarque sur le marché de l’emploi. Bon nombre d’établissements ont encore peu de recul ?” voire aucun ?” sur le parcours professionnel de leurs étudiants, mais on peut déjà dresser un état des lieux. Premier constat : les entreprises traditionnelles sont plus attirantes que les jeunes pousses. Rien de très étonnant. “Nos étudiants n’ont pas le goût du risque et préfèrent généralement aller dans les grandes entreprises qui ont des moyens que n’ont pas les start-up “, explique Olivier Badot, le responsable du mastère e-business à l’ESCP. Même constat à HEC. “ Les élèves qui suivent le mastère “Net Business” travaillent toujours dans le service marketing de Danone mais avec en plus des connaissances liées à l’internet“, résume Jacques Lendrevie, co-directeur scientifique du mastère. Diplômé de l’École des mines de Nancy, Alexandre Pauly a suivi le mastère d’HEC. Il entend bien, aujourd’hui, intégrer le département interactif d’un grand groupe. “ Je n’ai pas encore d’idée précise sur la fonction que je souhaite exercer mais c’est l’avantage de cette formation, elle ouvre sur un vaste choix de métiers“, insiste-t-il. Jean-Michel Péard, autre diplômé, est devenu chef de projet chez Master foods. Sa mission : développer un portail dédié aux propriétaires d’animaux domestiques. “ Le mastère m’a énormément appris sur le plan technique et sur la conduite de projet, raconte-t-il. Comment, par exemple, faire évoluer un site dans le temps.

Aérotechnique, mâtiné e-business

euxième constat : les grands cabinets de conseil semblent friands de ces étudiants qui portent une casquette e-business. Diplômé de l’École nationale supérieure de mécanique et d’aérotechnique (Ensma), Jalal Benomar a complété son cursus d’ingénieur par le mastère de l’ESCP, car il avait l’impression de ne “connaître que la moitié de l’entreprise, ses aspects E techniques et de production “. Après un stage de 4 mois dans un cabinet de conseil, sur une mission de gestion de la relation client, il vient de signer dans cette société un contrat à durée indéterminée en tant que consultant en financement de services. “ Je ne vais pas directement faire de l’e-business mais je serai amené à aborder ces questions car tous les secteurs sont concernés“, explique-t-il. Dans la dernière promotion de l’Edhec, c’est la majeure partie des élèves qui a décroché un poste dans ces sociétés de conseil pour travailler à des missions d’implémentation de progiciels de gestion intégrés ou de gestion de la chaîne d’approvisionnement. Une petite minorité a rejoint de grandes entreprises.Autres débouchés, les agences web ou les SSII. “Les étudiants sortent plutôt avec un profil généraliste, explique Laila Damak, la responsable de la licence de commerce électronique à l’université de Bretagne Sud. Nous leur donnons un maximum d’éléments sur l’e-commerce et ils choisissent ensuite leur voie. Ils se consacrent alors à la promotion d’un site, à la gestion de base de données ou aux partenariats. ” Avec des fonctions diverses : chefs de projets, consultants en web marketing, etc.Du côté des recruteurs, ces formations répondent aux attentes d’une multitude d’entreprises qui recherchent des profils capables non seulement de maîtriser les nouveaux outils, mais surtout de réorganiser l’activité d’une entreprise. “ Il y a trois ans quand nous avons commencé à recruter dans l’e-business, il n’y avait pas de formations spécifiques, se souvient Roger Baumgartner, directeur associé du cabinet de recrutement Neumann International. Aujourd’hui, elles existent, et l’e-business, d’abord aux mains de techniciens et d’ingénieurs, est passé dans celles du marketing.” Pour lui, “ le marché a besoin à la fois de spécialistes, pour améliorer la relation client dans l’entreprise, et de consultants pour mettre en ?”uvre les différentes solutions technologiques et accompagner le changement “. Pas facile pour autant de trouver les profils adéquats car ces formations ne font qu’entamer leur percée dans le monde du travail. “Elles sont très peu connues et encore peu reconnues, assure Emmanuel Stanislas, chasseur de têtes chez Clémentine International, un cabinet de conseil en recrutement spécialisé dans les NTIC. Elles sont bien souvent perçues comme des options. Les employeurs n’imaginent pas qu’il puisse y avoir des filières classiques et n’ont pas le réflexe de faire appel à ces étudiants. ” Et pour cause : nombre de sociétés, comme Ooshop (site marchand de Carrefour) ou SNCF.com, ont constitué leurs équipes avant même que ces formations n’apparaissent.

Un CV sur trois

our l’heure donc, la prudence est de mise. “ La qualité de l’offre et celle des profils qui sortent des écoles de commerce et d’ingénieurs restent à valider, assure Jean-Christophe Laran, le directeur des ressources humaines du cabinet de conseil Deloitte Consulting France. Nous n’avons vu que peu de diplômés de ces écoles. Il est alors difficile de savoir quelle est réellement la valeur ajoutée de ces diplômés.” Malgré ces réticences, les choses commencent quand même à bouger. “ Le label e-business n’ouvre pas encore toutes les portes, explique Nicolas Barthe, le DRH de la web agency Fi system. En revanche, il y a de plus en plus de candidatures de ce type (un CV sur trois). ” À en croire les recruteurs, cette espèce rare de diplômés présente donc de sérieux atouts : connaissances techniques et de management, très vite opérationnelle, important réseau de relations dans l’e-business, etc. “ Sur dix CV, le candidat qui a fait un mastère e-business et quelques stages a de fortes chances que je le rencontre en priorité, s’enthousiasme Thierry Davignon, business développeur chez Cap Gemini Media and Networks (entité en charge notamment de la gestion de la relation client). C’est vraiment un élément différenciateur. ” Et de préciser : “Nous recherchons en effet des ingénieurs qui, au-delà d’une formation généraliste, ont suivi une option ou une formation e-business pour occuper des postes de chef de projet ou de développeur et d’expert technique. Ils doivent avoir accumulé pendant leur cursus un maximum d’expérience en informatique, réseaux, télécoms et effectué un stage (de six mois au minimum) pendant lequel ils ont travaillé au moins sur deux projets. Par exemple, la mise en place d’un portail d’achat en ligne (B to C) et un autre dédié aux distributeurs (B to B).“Pascal Griot, le directeur de Surcouf (cybermarché du groupe Pinault Printemps Redoute), a recruté l’un de ces profils. Son directeur technique est diplômé du pôle Léonard-de-Vinci. “ Sa formation l’a rendu très vite opérationnel, explique-t-il. Car il a accumulé dans son cursus une solide expérience profession- nelle dans les SSII, les agences web et les sites de commerce électronique. Il a aussi une très bonne connaissance des outils de base et une vraie culture e-business qui lui permet de dialoguer avec tous les prestataires techniques“.

Une demande forte

enoît Tiers, directeur général des opérations du Groupe Euriware, spécialisé dans les activités de conseil et d’intégration de systèmes, regrette, lui, le nombre limité de ces étudiants sur le marché : “ Il y a une demande forte de la part des entreprises, une offre faible, déplore-t-il. Or il n’est pas facile de confier à un chef de projet classique une mission d’e-business. Il s’agit en effet de nouvelles formes de vente. Ils doivent apprendre à se recentrer sur les exigences des clients. La force de ces étudiants, même s’ils doivent être formés à des solutions technologiques particulières, est d’apprendre vite.“Bon nombre d’entreprises, de tout type, envisagent de recruter, dans les prochains mois ou les prochaines années, ces diplômés : des profils généralistes bien entendu mais aussi de plus en plus de spécialistes. Comme toujours, les fonctions marketing-commerce ont le vent en poupe. “Je n’ai pas encore recruté de profils d’étudiants qui ont suivi des formations e-business mais je pourrais l’envisager dans le cadre de notre développement, explique Pierre Polycarpe, directeur d’Adecco-career.com, la filiale e-business du spécialiste de l’intérim et des ressources humaines Adecco. D’ici à la fin de l’année, le nombre d’embauches pourrait s’élever à cinquante. Parmi elles, il y a plusieurs profils de commerciaux ou de marketing. “Du côté de Fnac.com, Jean-Christophe Hermann, le PDG, recherche des candidats dans ces fonctions, avec en plus “ un gros savoir faire en ergonomie“. D’autres sociétés sont en quête de compétences plus techniques. Les diplômés de DESS ou de mastères orientés conception des réseaux et systèmes d’information (INT Evry, Supelec Rennes, etc.) ou sécurité sont très recherchés. Thales Secure Solutions entend recruter 20 à 30 personnes dans cette spécialité. “Dès leur intégration, elles peuvent démarrer sur des projets d’intégration de produits de sécurité informatique, installés directement au niveau des réseaux, des middelware et des applicatifs, explique le directeur des ressources humaines, Xavier Randreta. Elles ont toutes les bases techniques pour comprendre les architectures et spécifications techniques des systèmes d’informations de nos clients.

Double compétence et perles rares

adextan compte embaucher 20 personnes pour son pôle infrastructure et sécurité. Microsoft, lui, envisage dans les prochains mois de recruter une dizaine d’étudiants en e-business pour des postes de consultants techniques, dont 3 à 5 jeunes ingénieurs. Enfin, les personnes dotées d’une double compétence sont des perles rares, très convoitées. France Telecom pense avoir besoin de quelques milliers de personnes pour sa branche Entreprises (chargée de tous les produits et services e-business) dans les quatre prochaines années, dont une bonne moitié d’ingénieurs ou bac +5. “Nous recherchons surtout des profils mixtes, à la croisée des écoles d’ingénieurs et de commerce traditionnelles et fortement orientés e-business, explique François Baguet, le DRH de cette branche. Ils devront être capables de comprendre et d’accompagner les changements tant chez les clients qu’en interne. Ces nouveaux spécialistes travailleront surtout dans des équipes projets.“Ces formations e-business répondent bel et bien à de réels besoins des entreprises. Certaines, comme Atos Origin, n’ont d’ailleurs pas hésité à passer des accords de partenariats avec les écoles concernées. Une façon d’être perçues comme des sociétés particulièrement impliquées dans l’e-business, et surtout de se créer un nouveau vivier de compétences, rares et précieuses sur le marché de l’emploi. Alors, si le chemin à parcourir pour être reconnus par les recruteurs est encore long, ces nouveaux diplômes semblent susciter leur intérêt. L’euphorie liée à l’internet étant passée, c’est aussi avec moins d’illusions et plus de réalisme que les étudiants plébiscitent ces formations. Et c’est tant mieux. Au-delà de l’effet de mode, la formation e-business mûrit. Loin de se focaliser sur la maîtrise de quelques outils, elle a intégré l’idée d’une remise en cause complète de l’organisation même de l’entreprise. Un très bon début.

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SC