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Quand l’ombre des sectes plane sur le Web

Achats de liens sponsorisés, de noms de domaine, sites de promotion de médecines et de thérapies douteuses… Certains mouvements sectaires sont passés maîtres dans l’art d’utiliser Internet.

C’est en 1997, avec le suicide collectif de 39 illuminés portant des baskets Nike noires que le grand public découvrait avec stupeur l’étrange mariage des sectes et d’Internet. A l’époque les membres
d’Heaven’s Gate avaient laissé un faire-part en ligne implorant les Terriens de rejoindre le vaisseau spatial qui suivait la comète Hale-Bopp, de passage cette année-là dans
l’atmosphère…Dix ans plus tard, les mouvements sectaires se servent plus que jamais du Web pour exercer leur magistère de prosélytisme. Dans son dernier rapport annuel, paru le 2 avril dernier et remis au Premier ministre, la
mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) rappelle ainsi le danger que représente la Toile en la matière, notamment pour les jeunes
internautes. Elle y cite en particulier le culte du satanisme, auquel ils peuvent être facilement être exposés (forums, musique…)

Des praticiens peu recommandables

‘ Internet est un outil merveilleux mais où il est parfois très difficile de faire preuve d’un quelconque sens critique, explique Françoise Chalmeau, conseillère à la Miviludes. On peut y
retrouver un maquis de sites très avenants, mais en fait fort peu recommandables. ‘
C’est le cas de ces sites qui font l’apologie de quantité de médecines douces (auriculothérapie, décodage biologique, sympaticothérapie, fasciathérapie…) et qui référencent des ‘ praticiens ‘ dont les titres
académiques sont aussi ronflants qu’imaginaires.Les consulter peut parfois enclencher un engrenage dangereux. ‘ Cela va du stage de fin de semaine où l’on vous invite à participer à jeun à un séminaire dispensé par un personnage charismatique, que l’on n’ose
appeler gourou, à la proposition de voyage à l’étranger qui offre aux drogués une rupture avec la toxicomanie, moyennant quoi on se retrouve parfois à consommer de l’iboga ‘,
souligne Françoise Chalmeau. Soit une plante
considérée comme un stupéfiant depuis mars 2007.

Achats de mots-clés

Certains mouvements n’hésitent pas à jouer à fond la carte du Web. C’est le cas de l’Eglise de scientologie, qui s’en sert à des fins pédagogiques, pour promouvoir ses pratiques, mais aussi pour combattre ses ennemis. Et même, le cas
échéant, comme le soulignait récemment le site The Inquirer, pour y dénoncer d’anciens adeptes de la secte qui revendent à bas prix des électromètres sur eBay (1).Dans sa panoplie, la Scientologie utilise nombre de noms de domaine aux appellations énigmatiques (comme transparencedugouvernement.org, mentalementvotre.net ou amelioration-vie.com) qui redirigent vers des sites proposant les ouvrages
de la secte. Une autre marotte scientologue réside dans l’achat de mots-clés et de liens sponsorisés, en rapport avec l’actualité ou les requêtes des internautes.Ainsi en tapant ‘ hyperactivité ‘ sur Google, l’internaute risque fort de se voir proposer une visite sur le site de la Commission des citoyens pour les droits de l’Homme (CCDH), explique la Miviludes. A ne pas
confondre, par exemple, avec la très officielle Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme. La première n’est qu’un faux-nez de la Scientologie, en lutte contre la psychiatrie.


(1) Ces appareils permettent la mesure ou la mise en évidence de la charge électrique d’un corps. En Scientologie, ils sont utilisés
‘ pour aider à localiser les zones de détresse ou de souffrance
spirituelle qui existent au-dessous du niveau de conscience actuel de la personne ‘, indiquait en 1995 le rapport Gest fait au nom de la commission d’enquête sur les sectes de l’Assemblée nationale. Vu le prix de vente aux
fidèles, c’est aussi une source confortable de revenus pour l’Eglise de scientologie.

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Philippe Crouzillacq