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PRISM : la chancelière Merkel ne remet pas en cause la surveillance américaine

Habituée à collaborer avec les services américains, l’Allemagne fait profil bas face aux révélations du programme de surveillance Prism. Et cela d’autant plus que ses services secrets ont un projet similaire dans les cartons.

En Allemagne, le scandale de surveillance Prism n’a pas provoqué des réactions très violentes chez les politiques. Interrogée lors d’une émission télévisée, la chancelière Merkel s’est dite « surprise » par les révélations sur le programme Prism, sans pour autant le remettre en cause : selon elle, les services secrets doivent faire leur travail, en raison de la menace terroriste. Néanmoins, elle s’est quand même montrée quelque peu irritée quant à l’étendue présumée de ce programme et soulignait que cette surveillance devait se faire de manière « mesurée ».  

Une affaire embarrassante

Elle a assuré par ailleurs qu’elle réclamerait plus de transparence sur le sujet, lorsqu’elle recevra le président Obama mercredi. Les citoyens doivent savoir ce que l’on fait avec leurs données, a-t-elle dit: « il faut évidemment que cela soit clair: ce qui est utilisé et ce qui ne l’est pas ». De son côté, la Maison Blanche a déjà indiqué vouloir dissiper les inquiétudes de Berlin au sujet du programme de surveillance d’internet. Mais pour les citoyens, il n’est pas certain qu’il faille attendre grand-chose de cette future discussion, car on sent bien que cette affaire est plutôt embarrassante.

Selon le magazine Der Spiegel, paru ce dimanche, le malaise de la classe politique allemande s’explique de deux manières. La première est historique. Durant la guerre froide, l’Allemagne a été un allié important face au bloc soviétique. La République fédérale a donc toujours eu tendance à fermer l’œil quant aux opérations de renseignement effectuées sur son sol par les services américains. Ces derniers, en contrepartie, n’hésitaient pas à transmettre des informations intéressantes à leurs homologues allemands. En somme, un partenariat gagnant-gagnant.

Une nouvelle plate-forme d’« enquête technique »

L’autre raison est une question de bon sens : le gouvernement allemand peut difficilement critiquer quelque chose qu’il aimerait pouvoir faire lui-même. En effet, selon le Spiegel, les services secrets allemands (BND) prévoient une extension considérable de leur surveillance des communications sur internet. Le journal évoque la création d’un programme secret de 100 millions d’euros sur les cinq prochaines années, grâce auquel seraient créés jusqu’à 100 nouveaux emplois dans le service d’ « enquête technique ».

Interrogé sur le sujet lors d’une conférence de presse lundi, un porte-parole du gouvernement allemand, Georg Streiter a déclaré que « ce programme était en cours de réflexion ». Pressé de questions, il a refusé de donner des détails: « le programme n’a pas été entériné. Je ne vais pas vous dire ce que prépare le BND ». M. Streiter a cependant confirmé un élément de l’article du Spiegel: pour l’instant, il est prévu de transférer « 5 millions d’euros » du budget du BND à l’amélioration du combat contre les cyber-attaques, a-t-il dit.

Réaction timorée en France aussi

En France, les réactions politiques face aux révélations Prism ont également été très timorées. Fleur Pellerin, ministre déléguée à l’économie numérique, en a profité pour vanter le cloud souverain. Et c’est à peu près tout. Il faut dire qu’en France, on travaille aussi énormément sur la surveillance du Net. L’Etat français a, par exemple, initié le projet de « plate-forme nationale d’interception judiciaire », dont le maître d’œuvre est Thales. Son coût est évalué à 45 millions d’euros. La course à la surveillance du Net est bel et bien lancée !

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Gilbert Kallenborn, avec AFP