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Pour Renato Soru, patron de Tiscali, la crise est un banquet

L’opérateur italien se voit bien en numéro 1 de l’accès internet en Europe. Et le marasme actuel favorise sa boulimie d’achat.

Renato Soru, padre padrone (père-patron) de Tiscali, résume son ambition sans détour : arriver tout en haut de l’affiche sur le web et surtout, ne jamais s’y prendre les pieds. Ambitieux, audacieux, obstiné, l’homme a du répondant. Il rêve de casser à son profit le marché de l’internet et donc de décrocher rapidement le titre de premier opérateur européen. Pour lui la crise actuelle tombe à pic. Il n’a qu’à se baisser. Avec la débâcle des modèles gratuits, les sociétés internet sont à ramasser.L’aventure commence en 1997 avec la création de Tiscali, une petite société qui veut jouer des coudes parmi les ogres des télécommunications transalpins, Telecom Italia et Omnitel. Un an plus tard, les services de téléphonie Tiscali couvrent la Sardaigne et deux grandes villes, Rome et Milan. En 1999, Tiscali lance Tiscali Freenet, le premier ISP (Internet Service Provider) gratuit en Europe. Le groupe, à l’image de son fondateur, dénote un appétit féroce. Aujourd’hui, Renato Soru, à l’étroit en Italie, rêve de déferler dans toute l’Europe. À la fin de l’an 2000, un grand cru, Tiscali a complété le rachat de sociétés du secteur internet et de télécommunications en France, en République Tchèque, en Suisse et même en Belgique. Avec un accès internet intégré, un portail et toute une gamme de services dans les secteurs de l’e-commerce et de la transmission de données informatiques et vocales, Tiscali peut cette fois se mesurer aux plus grands. En janvier 2001, le rachat de Libertysurf, conduit de main de maître, permet au Bill Gates sarde de tenter le triple saut périlleux en partant à l’assaut du néerlandais World Online. L’opération est un véritable succès car les 1,6 milliard d’euros (plus de 10 milliards de francs) récupérés à cette occasion vont permettre au groupe d’envisager de nouvelles acquisitions un peu partout en Europe. Elle permet aussi à Tiscali d’être désormais présent dans quinze pays européens et de détenir des licences téléphoniques dans dix pays membres de l’Union européenne.Refusant d’écouter les Cassandre qui prédisent en permanence un ralentissement de l’engouement des entrepreneurs pour le marché de la nouvelle économie, le groupe passe la cinquième vitesse pour développer ses activités. La combinaison de Tiscali et de World Online débouche sur des synergies pour optimiser le réseau des deux entreprises et l’offre de produits. Elle garantit en outre à ce ” tycoon ” en pleine croissance une clientèle solide. Tiscali se présente désormais comme un partenaire de choix pour les annonceurs et les sociétés de l’e-commerce. Quant à la plateforme des services concernant l’accès au net par la téléphonie mobile, elle permet de voir l’avenir en rose et surtout de fidéliser la clientèle. Le bilan du groupe est flatteur. Pour preuve, le chiffre d’affaires est compris entre 415 et 470 millions d’euros pour 2000 tandis que Renato Soru prévoit une hausse de 120 % pour 2001. Et la possibilité de dégager des bénéfices sérieux.Aujourd’hui, il déclare que “ le shopping n’est pas encore terminé, nous voulons encore et toujours le leadership.” L’homme est de plus en plus audacieux et rêve maintenant d’occuper la troisième position en Grande-Bretagne après avoir annoncé le rachat du fournisseur d’accès britannique Line One pour 100 millions d’euros. Encore une broutille pour Soru qui s’est offert il y a quelques jours à peine l’allemand Surfeu pour 89,6 millions d’euros. Et tandis que ses confrères baignent dans une expectative morose, le padre padrone de Tiscali refuse de se laisser contaminer par la mauvaise ambiance. “ Il s’agit d’une crise uniquement financière, qui n’a rien à voir avec la révolution industrielle du web “, a-t-il indiqué récemment au quotidien financier de Milan, Il sole 24 ore. En ajoutant : “Malgré la crise, nous avons doublé en un an notre chiffre d’affaires sur la publicité“. Beau pied de nez à Yahoo. Et il garantit une économie de 20 millions d’euros sur les charges structurelles pour Line One d’ici à la fin de l’année sans envisager de coupes au niveau du personnel ni de restructurations pour optimiser les dépenses.L’acquisition de Line One garantit au total à Tiscali 16 millions de clients navigateurs en Europe dont 7 millions actifs. Cela lui permet de placer la barre un peu plus haut pour faire récupérer au groupe une partie de sa valeur en Bourse. Car Tiscali qui était coté à 12 milliards de lires (6,2 milliards d’euros) en mars 2000 a chuté à 5 milliards. Un chiffre que Soru entend rapidement faire revoir à la hausse.

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Ariel F. Dumont à Rome