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Perspectives de croissance de l’économie française

À ce jour, on pronostique une croissance d’environ 2,5 % (entre 2,1 % et 2,8 %) pour l’an prochain. Ce taux ne permet pas d’envisager une…

À ce jour, on pronostique une croissance d’environ 2,5 % (entre 2,1 % et 2,8 %) pour l’an prochain. Ce taux ne permet pas d’envisager une réduction du chômage aussi massive que dans un passé récent. La France renouera-t-elle bientôt avec une croissance à 3 % ou plus, contre 2,2 % en 2001 ? Probablement pas, pour des raisons tenant au comportement de la demande et de l’offre.À court terme, l’activité dépend de la vigueur de la demande. La consommation, ferme jusqu’à présent, pourrait faiblir si, comme l’indiquent de récents sondages, le moral des Français fléchissait. La conjoncture mondiale pèse sur nos exportations malgré la sous-évaluation de l’euro. Dès lors, l’investissement ne paraît pas devoir rebondir. Les chances de relance reposent sur les allégements fiscaux prévus dans les prochains mois. Mais la marge de man?”uvre de l’État s’est rétrécie, faute d’avoir su réduire le déficit public.À plus long terme, les conditions de l’offre sont déterminantes. Le taux de croissance de l’économie dépend en effet directement de la variation du nombre des heures de travail fournies par la population active et des gains de productivité par heure travaillée. À cet égard, les études menées aux États-Unis, dont l’avance sur l’Union européenne est patente, incitent à dresser un bilan nuancé des performances de la ” nouvelle économie ” et de sa contribution à la croissance.

Rentabilisation lente

Si l’on met provisoirement de côté l’évolution de la masse des heures de travail, c’est sur la productivité horaire de ce travail que le diagnostic doit porter. Or, il a fallu bien des années avant que l’équipement en matériel informatique n’exerce d’effets perceptibles sur le PIB américain. Sa croissance ne s’est accélérée que de 1995 à 1999, sous l’impulsion des investissements en informatique et matériels périphériques, puis du développement de la production de logiciels et de matériels de communication. La composition du capital productif s’en est alors trouvée modifiée.Mais la productivité et la rentabilisation des ordinateurs dépendent d’un ensemble d’investissements intellectuels et organisationnels complémentaires, lents à concevoir et à mettre en place, et qui sont mal appréhendés en comptabilité : logiciels d’exploitation et d’application, bases de données, apprentissage de nouvelles pratiques de travail, décentralisation des procédures de décision, reconfiguration des entreprises et des filières de production.D’autres considérations relativisent la contribution des TIC à la croissance de la productivité du travail. Ainsi, l’accélération entre 1995 et 1999 est due à une expansion cyclique alimentée par la demande plutôt qu’à un changement de tendance durable. Aux États-Unis, les gains de productivité les plus spectaculaires se sont concentrés sur l’industrie des biens manufacturés durables, mais ne se sont guère propagés vers les 88 % restants du PIB. L’avalanche d’informations bute sur la barrière naturelle du temps nécessaire à l’esprit humain pour en tirer parti. Les services livrés par internet dupliquent souvent des prestations offertes sur d’autres supports. Ainsi, pour le moment, la nouvelle économie n’a pas entraîné d’effets perceptibles au niveau du produit final.Autre raison de douter d’une forte reprise de la croissance en France : la généralisation des 35 heures entraînera une diminution nette des heures travaillées en dépit de la création d’emplois et malgré son soutien financé sur fonds publics.
*professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine, directeur du centre détudes et de recherches sur la dynamique des organisations

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Alain Bienaymé*