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Oracle tente un blitzkrieg sur les progiciels

Alors que Peoplesoft cherche à mettre la main sur JD Edwards, Oracle se lance dans une man?”uvre d’extrême urgence en déclenchant une OPA hostile contre Peoplesoft. Une décision aussi surprenante que téméraire.

Plusieurs années de déploiement, une durée de vie atteignant aisément les dix ans, les mastodontes que sont les progiciels de gestion intégrée (PGI) assurent aujourd’hui les
fondations des systèmes informatiques. Mais, autant ces applications sont prévues pour résister, autant leurs éditeurs se lancent dans une bataille d’une rare violence.Lundi 2 juin, Peoplesoft annonçait son intention d’acquérir amicalement JD Edwards, créant ainsi le numéro deux mondial des PGI, derrière l’intouchable SAP. Mais, ce
vendredi, Oracle, a créé la surprise en lançant une OPA hostile de plus de cinq milliards de dollars sur Peoplesoft. Un feuilleton technologico-boursier qui ne fait que commencer.Oracle justifie son attaque par la prudence. ‘ Nous proposons une acquisition de consolidation de nos deux compagnies, a déclaré, lors d’une conférence de presse, Larry Ellison, le PDG d’Oracle.
Au contraire, le plan de JD Edwards et Peoplesoft est beaucoup plus risqué, puisqu’il consiste à s’attaquer à de nouveaux marchés. ‘ Larry Ellison affirme aussi avoir été contacté, il y a un an, par
Craig Conway qui lui avait proposé une fusion Peoplesoft-Oracle, refusée alors faute d’accord sur la structure.Un discours qui ne convainc pas les analystes. A leurs yeux, l’éditeur est d’abord une compagnie ayant besoin de rebondir. ‘ Les applications Oracle ont eu du succès initialement, explique
Philippe Nieuwbourg, directeur de recherche chez Marcom Génération. Mais, depuis un an et demi, leur part de marché ne cesse de diminuer. ‘

Oracle derrière Peoplesoft depuis 2001

En France, selon le cabinet PAC, Oracle aurait même perdu sa deuxième position depuis 2001, au profit de Peoplesoft. Une fusion entre les deux sociétés ne créerait toutefois pas un mastodonte des applications d’entreprise dans
l’hexagone.Leurs parts de marché cumulées s’élèveraient, selon PAC, à 20 %, loin des plus de 40 % de SAP. En France, les ventes sont en effet réparties entre de très nombreux éditeurs. ‘ Les gros PGI représentent
80 % du chiffre d’affaires dans les grands comptes, mais juste 30 % dans les entreprises moyennes,
poursuit Philippe Nieuwbourg. La plupart des acteurs ont moins de 100 références. ‘Le marché des PME est d’ailleurs devenu le nouvel
eldorado pour les éditeurs. Ce n’est toutefois pas Peoplesoft qui aidera Oracle à s’y implanter en force, puisque les clients de la société se trouvent avant tout au sein des grands
comptes.Des clients que l’annonce d’Oracle doit sérieusement inquiéter. Lors de sa conférence, Larry Ellison a bien affirmé que les utilisateurs actuels de Peoplesoft ne seront pas forcés de migrer vers les applications Oracle. Mais a
ajouté qu’‘ il est difficile de migrer de Peoplesoft 7 vers
Peoplesoft 8, si difficile que des clients Peoplesoft sont passés à Oracle e-business suite. ‘
Quant au service après-vente des produits existants, il a été étendu, mais sans calendrier précis. Une absence de garantie alarmante pour des produits censés rester en place au minimum une dizaine d’années. Quant au nouveaux clients, il
ne leur sera plus vendu de produits Peoplesoft.Ce scénario reste hypothétique. Les silences de Peoplesoft et de JD Edwards (dont l’acquisition serait remise en cause en cas de succès d’Oracle) laissent en effet présager d’une opposition ferme de ces deux sociétés. Le conflit se
règlera donc en Bourse, où Oracle doit encore faire ses preuves.Les 5,1 milliards de dollars proposés par l’éditeur ne devraient pas suffire. Ils représentent en effet 16 dollars par action Peoplesoft alors que celle-ci, depuis l’annonce d’Oracle, a progressé de plus de 20 % pour
osciller entre 18 et 19 dollars.Une inconnue de plus dans une stratégie bien mystérieuse. ‘ L’initiative d’Oracle me donne plus l’impression d’une réaction, estime Philippe Nieuwbourg. Il y a un vrai effet
Larry Ellison, l’homme aime bien se faire mousser. ‘
Un pari que le flamboyant PDG d’Oracle devra justifier la semaine prochaine.

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Ludovic Nachury