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Offres gratuites ou illimitées : le coup de poker des FAI

Pour appâter l’internaute, les FAI prennent désormais tous les risques. Deux sortes d’offres, plutôt alléchantes, sont apparues ces derniers mois. Certains FAI ont lancé des forfaits…

Pour appâter l’internaute, les FAI prennent désormais tous les risques. Deux sortes d’offres, plutôt alléchantes, sont apparues ces derniers mois. Certains FAI ont lancé des forfaits dits ” gratuits-gratuits “, comprenant l’accès à Internet et un nombre fixe d’heures de communications pour… zéro franc. D’autres ont misé sur des forfaits payants, donnant droit à un nombre illimité d’heures de communications : la plupart s’y sont cassé les dents (lire encadré). Ainsi, quelques jours après le lancement de son forfait illimité, World Online a dû faire machine arrière : submergé par une forte demande, le FAI ne pouvait plus suivre. Son PDG dénonçait alors la non-rentabilité du modèle du forfait illimité. Or, contre toute attente, AOL France propose un forfait illimité pour 199 F par mois, et même 99 F par mois avec un engagement de deux ans. “C’est un gros coup commercial pour tenter de concurrencer Wanadoo et rassurer un actionnariat fragile [Cegetel doit bientôt se retirer du capital d’AOL France, Ndlr], commente Roland Montagne, consultant à l’Idate et auteur de l’Atlas mondial de l’Internet. Le forfait illimité est vraiment très risqué, car il est imprévisible. AOL a tout de même pris des précautions en testant son offre dans 2 000 foyers et en faisant de gros efforts d’infrastructure. Si AOL échoue, les autres FAI ne réussiront pas non plus”. Pour le FAI, le principal danger de l’illimité est que l’internaute ne prenne même plus la peine de déconnecter son ordinateur après utilisation. One. Tel l’a constaté à ses dépens en voyant son réseau complètement saturé. Le dimensionnement technique et logistique des accès illimités, dont dépend la qualité de service, est a priori particulièrement difficile à évaluer. Et les revenus financiers du FAI – la publicité sur son portail, les partenariats éventuels avec des sites de e-commerce, et un faible pourcentage du coût des communications locales reversé par France Télécom – ne suffisent pas forcément à faire face aux imprévus.

Les forfaits gratuits ont de l’avenir


Le géant Wanadoo refuse, quant à lui, de céder aux sirènes des offres d’accès illimité. “L’illimité permet aux internautes assidus de surfer 24 h/24 à moindre coût. C’est en quelque sorte l’ADSL du pauvre, plaisante Morald Chibout, directeur du marketing de Wanadoo. Nous ne voulons pas jouer sur ce terrain et nous préférons garantir une haute qualité de service à nos abonnés.”Le FAI avoue quand même garder un ?”il vigilant sur ce marché.
D’après Roland Montagne de l’Idate, le concept des forfaits ” gratuits-gratuits ” est beaucoup plus pérenne : le dimensionnement technique du réseau est alors plus facile à prévoir. Mais il faut définir un modèle économique solide pour assurer ses arrières. Le jeune FAI Oreka, dont l’offre ” 18 heures gratuites ” a fait grand bruit, pense avoir trouvé le modèle idéal : “Nous n’acceptons que 2 000 nouveaux clients par jour, pour ne pas surcharger notre infrastructure, explique David Bitton, PDG d’Oreka. Nos revenus proviennent à 100 % de la publicité. En se connectant, l’internaute arrive automatiquement sur le site d’un annonceur et des bandeaux publicitaires sont placés sur la barre de navigation qui l’accompagne jusqu’à sa déconnexion : les revenus publicitaires sont donc directement proportionnels au temps de connexion à notre réseau.”

Venu d’outre-Atlantique, ce modèle novateur en France a de quoi séduire, mais il a ses limites. Ainsi, l’internaute qui souhaite aujourd’hui s’abonner à Oreka obtient un forfait de 4 heures, qui ne passera à 18 heures que dans trois mois. La liste d’attente est longue : sur 400 000 inscrits, seuls 250 000 sont des abonnés actifs. Oreka doit donc faire vite pour renforcer son infrastructure et son service commercial.Les FAI n’ont pas l’expérience et la maturité nécessaires pour lancer des forfaits illimités. Les formules gratuites ont, en revanche, de beaux jours devant elles, si les FAI définissent un modèle économique sûr et s’ils font preuve d’une réactivité suffisante pour renforcer rapidement leur infrastructure en cas de besoin. En attendant, l’internaute fait les frais de leurs mauvais dimensionnements. C’est pourtant lui qui décidera de l’avenir du ” gratuit-gratuit “.

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JULIE DE MESLON