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Numérique terrestre : l’acte II a commencé

Qualité technique, lancement de chaînes locales, originalité des services interactifs… pourraient être mis en avant comme éléments de différenciation positive de la TVNT, payante comme gratuite.

Situation financière inextricable pour les plateformes de TVNT (télévision numérique terrestre) anglaises et espagnoles, d’un côté ; intérêt confirmé des Français pour le même support ; sous l’apparent paradoxe se dessine peut-être simplement la confirmation d’un schéma dans lequel le développement de la TVNT, future “télévision par défaut”, se fait d’abord sur le segment gratuit, avant la montée en puissance d’offres payantes nettement différenciées. On peut rappeler qu’en Grande-Bretagne comme en Espagne, la TVNT a été positionnée sur le terrain des offres payantes câble et satellite, avec l’abonnement aux bouquets par les opérateurs ITV Digital et Quiero TV comme moteur unique de développement de l’initialisation.À ce trait commun se sont ajoutés des facteurs spécifiques. D’abord, faute d’assurer le “simulcast” (la reprise en numérique) des chaînes historiques, la promesse de Quiero TV est devenue difficilement lisible : comment expliquer qu’on offre plus et mieux quand on ne garantit pas pour commencer la reprise de l’existant ? Le souvenir de la bataille que Canal Satellite a livrée en France contre la diffusion exclusive des chaînes publiques par TPS situe l’enjeu. Ensuite, tout à son positionnement frontal contre B Sky B, ITV Digital a diffusé jusqu’à 7 chaînes par multiplex, pour pousser à son maximum le nombre de programmes affichés ; la qualité de réception s’en est trouvée dégradée en conséquence, avec une couverture limitée à 60 % de la population.Deux informations récentes, que le commentaire des pertes abyssales accumulées par ITV et Quiero TV ont eu tendance à occulter, suggèrent un repositionnement parallèle de la TVNT. La première, c’est le démarrage, début avril, de la diffusion numérique en clair des cinq chaînes nationales espagnoles (TVE1, TVE2, Antena3, TV5 et Canal+), et le lancement en juin de deux nouveaux programmes nationaux gratuits (Veo TV et Net TV) spécifiques à la TVNT. La deuxième est relative à la commercialisation effective, depuis la fin mars, des décodeurs d’entrée de gamme (99 livres, soit 161 euros) prioritairement destinés à recevoir les 14 chaînes en clair, en Angleterre.

Du gratuit pour une TVNT de masse

D’une optique de “double saut” dans laquelle la TVNT cumulait virages technologique (passage au numérique) et économique (conversion généralisée à la pay TV), Anglais et Espagnols semblent revenus à une vision plus séquentielle : la “massification” de la TVNT se fait sur l’offre gratuite ; la population des foyers initialisés constitue une base de prospection ciblée aux distributeurs de bouquets payants (positionnés de manière complémentaire aux offres câble et satellite). Prescience et/ou résultat d’une volonté politique de prise en compte du plus grand nombre, l’équilibre défini par les pouvoirs publics français ?” égalité de programmes libres d’accès et payants ?” fait de l’offre gratuite un vecteur essentiel de développement ; et les Français interrogés par NPA Conseil et Opinionway semblent encourager cette orientation avec une motivation déclarée forte à s’équiper pour la réception des chaînes gratuites (63 %), et un intérêt plus nuancé pour l’offre sur abonnement (45 %).Augmenter l’attrait ressenti pour cette dernière supposera de faire apparaître des éléments de valeur ajoutée, à côté de la spécificité subie de la TVNT : le nombre limité de chaînes disponibles. L’argument prix est incontournable ; quand B Sky B propose, à prix équivalent, deux fois plus de chaînes, l’échantillon du baromètre NPA Conseil et Opinionway situe en deçà de 10 euros le prix d’abonnement acceptable pour un bouquet dune douzaine de chaînes thématiques. Qualité technique et commerciale du service, lancement des chaînes locales, originalité des services interactifs… pourraient aussi être mis en avant comme éléments de différenciation positive de la TVNT, payante comme gratuite. Il reste aux opérateurs une année pour arrêter leur politique et peaufiner leurs argumentaires.*consultant Nouveaux Paysages Audiovisuels

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Philippe Bailly*