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L’utilisation de l’ADN pour le calcul préfigure l’informatique de demain

La conception d’ordinateurs biologiques n’est plus une chimère de chercheur. Des processeurs à ADN sont déjà en cours d’expérimentation. Les premiers ordinateurs apparaîtront dans moins d’une décennie.

L’ADN (acide désoxyribonucléique) vient au secours de l’informatique. À terme, ce composant essentiel de la vie prendra le relais de l’électronique, quand les limites de la miniaturisation seront atteintes. Les composants biologiques se mesurent en effet à l’échelle du nanomètre, soit 10-9 m. Au croisement de la biologie, de la chimie, de la microélectronique et de l’informatique, ils font l’objet de recherches menées par une quinzaine de laboratoires et quelques industriels. Chacun tente de réaliser l’intégration de noyaux biologiques dans les ordinateurs. Une fois cette opération accomplie, la puissance de calcul des nouvelles machines sera largement multipliée par rapport à celle des ordinateurs actuels. Il y a à cela une raison simple : l’ADN exécute des opérations en parallèle. Les processeurs à ADN pourront donc effectuer plusieurs calculs simultanément, à la différence des puces actuelles, qui ne peuvent en réaliser qu’un seul à la fois.

Des milliards de brins d’ADN placés sur une feuille d’or

Dans les ordinateurs traditionnels, le calcul de toute opération est confié à un processeur et contrôlé par un logiciel qui donne toutes les instructions pour le mener à bien. Pour les futurs ordinateurs à ADN, la puissance de calcul proviendra du code génétique. Physiquement, des chercheurs ont mis au point le moyen de fixer des milliards de brins d’ADN sur une surface d’or recouverte de silicium, créant ainsi un similiprocesseur. L’ADN est synthétisé dans celui-ci pour traduire un ensemble de données arithmétiques. Toutefois, pour obtenir ces milliards de brins, une première opération est nécessaire : le clonage des brins. Elle est assurée par un virus qui se reproduit exponentiellement et sert, en quelque sorte, de photocopieuse à ADN.
Une molécule d’ADN est composée de deux brins torsadés qui s’accouplent, s’hybrident en double hélice par appariement entre les substances azotées. L’équivalent du code binaire (0 et 1) est symbolisé par les initiales des quatre substances qui composent l’ADN : l’adénine (A), la thymine (T), la cytosine (C) et la guanine (G). Chaque association de lettres prend une valeur.
Pour l’heure, les premières tentatives d’utilisation de l’ADN portent sur le problème du voyageur de commerce : comment relier n villes en empruntant le chemin le plus court. Le calcul proprement dit met en ?”uvre une propriété inhérente à l’ADN : l’hybridation. Cette dernière opération est réalisée par des enzymes spécifiques, qui sont un peu l’équivalent des programmes logiciels.

Une bactérie pour supprimer les brins non pertinents

Pour obtenir le résultat des calculs, les chercheurs font subir une série de cycles thermiques aux brins placés dans le similiprocesseur afin de les mélanger et de les synthétiser. Une fois cette opération effectuée, la seconde étape consiste à séparer les brins pertinents, ou hybridés, des autres. Pour ce faire, les brins non hybridés sont purement et simplement éradiqués par une bactérie spécifique introduite au sein de la solution d’ADN : l’Escherichia Coli. Pour lire le résultat de l’opération, il faudra ensuite mesurer la longueur des fragments hybridés, puis les interpréter. La mesure du fragment le plus court et du fragment le plus long fournit le résultat de l’opération demandée. Pour reconna”tre et identifier les fragments, les biologistes ont recours à un procédé courant dans ce domaine : le marquage par fluorescence. Bien entendu, tout le processus de codage et de décodage est encore confié à un processeur et un ordinateur classiques.
Actuellement, on est encore loin de la lecture sur un écran. Des préoccupations plus immédiates font l’objet de l’attention des scientifiques : contrôler la vitesse de calcul, développer des programmes de correction d’erreurs, augmenter les capacités de codage… Autant de problèmes dont la résolution avance à pas de géant.
Aujourd’hui, les ordinateurs biologiques ne sont pas pleinement opérationnels et le calcul de l’itinéraire du voyageur de commerce, par exemple, prend plus de 24 heures. Néanmoins, la voie vers l’utilisation de la biologie est ouverte et, dans moins d’une décennie, les chercheurs espèrent que les ordinateurs biologiques seront opérationnels.

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GÉRALDINE LEBOURGEOIS