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Logos maudits

La personnalisation des téléphones portables est un marché de gadget. Principales caractéristiques : c’est un business qui ne dure pas longtemps et qui énerve vite ses utilisateurs. Jusqu’au divorce.

” I’m a barbie girl “ en huit tons chaque fois qu’on t’appelle, ” Anelka I love u “ en deux couleurs comme fond d’écran pour faire second degré et Chantal Goya sur
ta messagerie. Je n’en peux plus. Oui, je sais, mon amour, il faut bien faire tourner l’économie de notre brave pays surtout que nous aussi, nous frôlons la récession.Alors que, entre parenthèses, les soi-disant experts ricanaient encore début décembre de ” l’insolente croissance française “. Tout ce que tu veux, d’accord. Mais là, tu arrêtes avec tes logos,
sonneries et fonds d’écran, je sature. Vraiment.Tout a commencé quand un jour un brave type. Euh… peut-être pas brave. Un type quoi. Bref un vicieux a eu l’idée de faire des logos et des sonneries pour téléphones portables. C’est pas non plus l’invention du siècle, mais c’était
bien trouvé. Le mobile, au début, c’était l’objet qui distinguait les types branchés des crétins sans le sou.Et puis un jour, même les crétins sans le sou ont pu s’en payer un. Ce jour là, le téléphone mobile est devenu banal. Donc pas branché du tout. Et le vicieux ?” enfin l’enfoiré là ?” il a eu l’idée de créer une nouvelle
” distinction “, avec des sonneries criardes et des logos tous moches. Chacun sa ” distinction ” certes. Ca n’a pas empêché ce business de devenir sacrément rentable.Tous ses copains ont suivi, et certains amassaient en pleine période de gloire près de 150 000 euros (le million de francs) par jour en logos, sonneries, machin. Génial, ça crée des emplois et tout et tout. Par contre, le revers de la
médaille, c’est que je suis en dépression nerveuse depuis que toi aussi tu as téléchargé toutes ces c****** sur ton téléphone. C’est franchement insupportable.Et puis maintenant, réfléchis, c’est plus du tout branché les logos, les sonneries et tout ça. Tout le monde en a. Oui, d’accord, il y a des sonneries polyphoniques. Mais moi, je te dirais que même Aqua en huit tons, ça me cassera
toujours moins les pieds que huit Corses la main sur le c?”ur chantant dans ton portable.Déduction : c’est outdated, voire ringard. C’est même devenu la tarte à la crème de tous les start-uppers sortant de l’Essec : “Monsieur l’investisseur, financez mon site de pêche à la mouche. Vous
inquiétez pas, ce sera rentable dans trois jours grâce à mes sonneries imitant le chant de la carpe, mes logos de poissons panés Vivagel et mes répondeurs avec la musique d
‘Histoires naturelles. Sauf qu’en ce
moment, les chiffre d’affaires de ce secteur se casse la figure pour une simple et bonne raison : tout le monde a fait comme toi et a téléchargé ses ” bip-bip ” et ses images pas belles.Le marché du logo est saturé comme n’importe quel marché de gadget qui connaît le succès : ça dure un an. Du coup, les pionniers ?” eux ?” sont déjà passés à autre chose. Alors, si tu veux faire ” hype ”
aujourdhui, vire moi tous ces trucs et reviens à la sonnerie discrète de base. Tu verras que tout le monde te remarquera. Dans le cas contraire, ce sera un motif de séparation. Et je te préviens : je ne veux ni la garde du logo ni celle de la
sonnerie.

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Alain Steinmann