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L’Ircam recherche la chaîne hi-fi du futur

L’Institut de recherche en acoustique musique veut intégrer, dans le cadre d’un équipement de salon, de nouvelles pratiques d’écoute et de partage de musique. Dont le peer-to-peer et la spatialisation du
son.

Sur votre chaîne hi-fi, vous écoutez un trio de jazz. Sur l’écran de votre téléviseur, trois icônes correspondant aux musiciens apparaissent : le pianiste, le contrebassiste, le batteur, plus une icône représentant l’auditeur,
vous. Au fil de l’écoute, avec la télécommande, vous déplacez les icônes. Le piano passe derrière la rythmique : il sonne plus éloigné. Vous écartez batterie et contrebasse l’une de l’autre : la rythmique se fait moins dense. Vous avancez
votre propre icône vers la contrebasse : vous n’entendez quasiment plus que cet instrument.C’est ce qu’on appelle la spatialisation du son, créée pour l’auditeur lambda… sur une chaîne hi-fi qui n’existe pas encore. Ce genre de fonction fait en effet partie des pistes explorées par l’Institut de recherche et
coordination acoustique-musique (Ircam), à Paris, dans le cadre du projet européen SemanticHiFi. L’enjeu ? Intégrer dans un équipement de salon les fonctions et les pratiques dues à la généralisation des technologies numériques.Présenté mercredi par l’Ircam, ce projet bénéficie notamment de partenariats avec le Fraunhofer, centre de recherche allemand créateur du MP3, Native Instruments, société spécialisée dans les applications audio, et Sony, censé concevoir
la chaîne proprement dite. Les travaux, étalés sur trente-six mois, prendront fin en novembre 2006.

Adapter le matériel aux usages

L’Ircam a, lui, mobilisé six équipes dont les thèmes de recherche vont de l’acoustique des salles en passant par les services en ligne ou les applications temps-réel. ‘ Depuis quarante ans, on a une relative
stabilité des formats de production et de diffusion musicale ‘
, estime Hugues Vinet, directeur scientifique de l’Institut. Cela se résume en un signal audio stéréo, d’abord analogique puis numérique, avec le CD.
Les usages sont limités : réglages de balance et de volume, avance, retour, changement de piste et c’est tout. ‘Premiers changements de mode d’utilisation à prendre en compte : la diffusion par titre, au détriment de l’album, et la personnalisation de la diffusion (compilation perso, ordonnancement changé…), permises par la souplesse du
numérique et par le peer-to-peer. D’où l’idée d’une chaîne avec disque dur, base de données musicale et fonction de recherche multicritère.Un ‘ google musical ‘ rendu possible par l’association aux fichiers musicaux de toute une série de données : titre et nom de l’artiste, mais aussi instruments joués (ou logiciels utilisés dans le cas de
musiques électroniques), paroles, partitions, genre, tempo… Ce qu’on appelle les métadonnées. Celles-ci peuvent très bien être produites par l’utilisateur lui-même (définition du genre, mise en relation avec d’autres morceaux, d’autres
interprétations…).

Une chaîne hi-fi qui se rapprochera du PC

La chaîne devra disposer d’une connexion Internet et, plus osé, d’une fonction de peer-to-peer. Mais pas question d’engager déjà un bras de fer avec l’industrie musicale sur les droits d’auteur :
‘ On ne partagera que les métadonnées, suggère Hugues Vinet. L’utilisateur à qui on les enverra ne pourra en profiter que s’il a le morceau original. ‘Tout n’est bien sûr pas entièrement nouveau. Ce qui l’est, c’est de pouvoir en bénéficier sans passer par un ordinateur et, surtout, sans être ni technicien ni professionnel. ‘ Sous le capot [de la
chaîne, NDLR], ce sera assez proche d’un PC, admet Hugues Vinet, avec une connexion IP et une visualisation graphique nécessaire. Ce qui fait débat, en revanche, c’est l’interface de manipulation. Il n’est pas
question, par exemple, de proposer une souris. ‘
On peut en revanche imaginer de passer par la télécommande de la télévision.Reste à savoir si les maisons de disques seront convaincues par ce genre de matériel, qui implique de nouvelles habitudes d’écoute. Et donc, de nouvelles pratiques d’enregistrement par les artistes. L’industrie du disque n’est
décidément pas au bout de ses remises en cause…

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Arnaud Devillard