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L’infogérance, grande espérance des SSII en situation de crise

Alors que les entreprises sont prêtes à externaliser les activités qu’elles maîtrisent, les offres d’infogérance s’industrialisent et s’ouvrent à l’informatique technique.

Difficile de parler d’âge d’or de l’externalisation en période de ralentissement économique. Mais le taux élevé de renouvellement des grands contrats d’infogérance laisse à croire que ce marché reste porteur en France. Alors que la croissance moyenne des services informatiques devrait sensiblement diminuer cette année (de 8 % à 6 % selon Pierre Audoin Conseil), les prestations d’infogérance se développent et représentent des revenus récurrents pour les SSII. “Tous les secteurs y viennent, même si les approches sont différentes. Les appels d’offre d’externalisation augmentent, notamment cette année dans le secteur public et dans des métiers spécialisés comme l’informatique scientifique “, explique Jean-Marie Letourneux, directeur du développement Global Services chez SchlumbergerSema.

Les activités externalisées se multiplient

Les prestations d’infogérance, qui sont évaluées à 3,5 milliards d’euros en France l’an dernier selon PAC, devraient rester, avec la tierce maintenance applicative, le principal moteur de croissance du secteur des services. A l’heure où les entreprises s’occupent de leurs grands processus métier, les spécialistes de l’infogérance, Cap Gemini Ernst & Young, Atos Origin, Steria, et autres Sopra et Euriware, prévoient de renforcer cette activité dans les deux à trois prochaines années. Car si certains secteurs d’activité sont aujourd’hui très ralentis (télécoms, finance, internet), d’autres poursuivent leur croissance, comme le domaine de l’énergie qui se prépare à la dérégulation, celui des services aux collectivités, de la santé et du secteur public, propices aux refontes de systèmes d’information.Les activités susceptibles d’être infogérées sont généralement celles qui sont bien maîtrisées par l’entreprise. “Les contrats d’infogérance se multiplient car les entreprises maîtrisent mieux leur métier. On infogère ce que l’on sait bien faire en interne. Même les applications stratégiques peuvent être externalisées, à condition que l’entreprise pilote la maîtrise d’ouvrage. Car en l’absence de pilotage, les résultats seront inexistants “, précise Jean-Luc Piedanna, responsable du pôle réseaux et informatique distribuée de Natexis Banques Populaires.Et il ajoute : “Au moyen de l’infogérance de ses services produits, la banque a évité la multiplicité des intervenants qui dégradait les gains financiers. C’est avec un objectif de transparence et de mesure des coûts que le contrat d’infogérance a été conclu avec Euriware, intégrant un périmètre précis de services, dont l’engagement sur résultat”. Mais Jean-Claude Letranchant, responsable de l’infogérance chez IBM Global Services (région Ouest) souligne les problèmes culturels persistants en France : “Moins réticentes, les entreprises acceptent le concept d’externalisation, mais le plus souvent pour régler des problèmes, alors qu’en Grande-Bretagne, l’infogérance est automatique”.Témoin, le fournisseur London Electricity, devenu depuis peu la filiale britannique du groupe EDF, qui a décidé d’infogérer son système d’information et le transfert de son personnel avec l’aide de Cap Gemini Ernst & Young. Les services d’infogérance sont devenus plus professionnels. “En termes de maturité, on note des cahiers des charges des entreprises plus précis dans un marché de renouvellement de contrats d’infogérance, face à une réelle industrialisation des services dans ce domaine. Les SSII s’engagent sur résultats, répondent aux besoins de services très spécifiques liés aux métiers des clients, et concluent des contrats d’infogérance beaucoup plus complexes “, soutient Jean-Marie Letourneux, de SchlumbergerSema.Aussi le prestataire devra-t-il s’adapter aux évolutions du contexte de l’entreprise : “La SSII adaptera le système de facturation aux variations et aux aléas rencontrés par l’entreprise “, dit Patrice Leterrier, directeur de l’infogérance de T-Systems, spécialiste du secteur des télécoms.

Les plans de progrès ont le vent en poupe

Plusieurs types de contrats d’infogérance sont à ce jour proposés aux entreprises, allant de l’infogérance classique à celle dite évolutive, destinée à améliorer le système d’information. Chez SchlumbergerSema, plutôt présent dans la banque, l’industrie et les télécoms, l’offre va s’étendre du service d’assistance aux centres de continuité des activités, en passant par l’infogérance des infrastructures réseau. Par exemple, c’est pour le compte d’une entreprise britannique que SchlumbergerSema envoie 91 000 Mo de courriers électroniques chaque mois et gère vingt-sept mille boîtes aux lettres électroniques. “Nous remarquons très souvent une extension de l’assiette de services, pour la partie applicative notamment, et qui intervient au moment du renouvellement du contrat “, détaille Jean-Marie Letourneux.Au-delà des prestations classiques d’infogérance, des services tels que les “plans de progrès”, destinés à faire évoluer l’existant, ont le vent en poupe. Spie Communications, spécialiste des infrastructures de télécommunications, vient de confier une partie de son informatique (gestion de la relation client et interfaces associées pour sept cents postes de travail répartis dans soixante-quinze agences régionales) à la SSII Euriware. Pour Olivier Parent, DSI de Spie Communications, ce sont les services d’infogérance dite “évolutive” d’Euriware, adaptés à sa gestion de la relation client et aux applicatifs de sa gestion financière, qui ont fait la différence avec les autres prestataires. Cette offre d’infogérance a été complétée par du conseil en stratégie. “Les plans de progrès sont en général prévus pour les entreprises qui ont déjà expérimenté les contrats d’infogérance “, nuance Fabio Leoni, directeur général pour l’entité infogérance chez Unisys.Parmi les gammes de prestations d’infogérance spécialisées, on note également la création d’une joint-venture entre le prestataire et l’entreprise cliente. C’est le cas du récent contrat conclu entre Atos Origin et BNP Paribas, qui inclut les services associés au télépilotage informatique des systèmes centraux de la banque. Leur joint-venture, créée à cet effet, réalisera la mise en ?”uvre d’une nouvelle organisation de production informatique. Bref, les entreprises délèguent de plus en plus de tâches de gestion pour mieux maîtriser leurs coûts et leurs procédures, pour connaître leur retour sur investissement, pour aussi coordonner les diverses demandes entre les directions informatiques, les directions financières et celles des achats. C’est le cas de la filiale espagnole de Cap Gemini Ernst & Young, qui vient de confier la gestion de son parc informatique (3 500 configurations sur deux sites) au spécialiste Parsys IT Management, sur la base d’un contrat définissant des engagements sur résultats précis (réduction des charges administratives, simplification des procédures, suivi du budget informatique) pour cette gestion déléguée des actifs informatiques et télécoms.

Le PLM et l’informatique scientifique s’infogèrent

Parce qu’elle assure des revenus récurrents, l’infogérance attire aujourd’hui la plupart des acteurs du service. Mais elle représente une activité récente pour certains, qui ont privilégié une offre très spécialisée pour pouvoir s’imposer sur ce marché. C’est le cas d’EADS Matra Datavision, qui se spécialise depuis près de deux ans dans ce métier. Selon Guillaume Barral, responsable de l’entité exploitation de la SSII :“Chez nous, l’infogérance et la tierce maintenance applicative sont deux activités récentes, devenues aujourd’hui stratégiques. Nous nous sommes lancés dans ces deux métiers avec une offre spéciale dans le milieu industriel, l’informatique technique et l’ingénierie assistée par ordinateur”. Ces services ont été proposés au CNRS (entité Soleil) et à l’une des filiales de Renault pour exploiter leur informatique technique. “Nos clients sont des grands groupes comme des PME-PMI qui souhaitent externaliser leur informatique technique “, ajoute Guillaume Barral.Autre secteur de prédilection pour EADS Matra Datavision : “La partie PLM des entreprises (solutions de gestion du cycle de vie des produits ?” NDLR) s’externalise de plus en plus. Tout comme l’informatique technique, le PLM exige des compétences pointues pas toujours gérées par les directions informatiques ou par les entreprises qui veulent se recentrer sur leur c?”ur de métier “, précise encore Guillaume Barral. Autre spécialiste du PLM et de l’informatique technique, EDS Answare. “Nous avons développé une expertise d’infogérance pour l’informatique scientifique, notamment des services d’Open Source pour la R&D. Mais il n’y a pas de terrain privilégié pour l’infogérance, tous les secteurs d’activité peuvent y aller “, signale Philippe Clément, directeur commercial d’EDS Answare.

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Clarisse Burger