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L’industrie du disque contre la copie des CD

Les majors se sont lancées dans une course à la technologie miracle, celle qui rendrait incopiables les CD qu’elles produisent. Mais, outre les difficultés techniques rencontrées, ce type de solution se heurte aux droits des consommateurs.

L’industrie musicale travaille à resserrer son contrôle sur les disques compacts, qui sont de plus en plus souvent convertis sous la forme de fichiers diffusables sur Internet.Dans cette optique, quelques-unes des grandes maisons de disques travaillent avec des entreprises informatiques telles que la californienne Macrovision ou l’israélienne Midbar Technologies. L’objet de cette collaboration est de contenir le flux des copies de CD vers le MP3 ?” un format de compression numérique popularisé par Napster ?”, voire d’y mettre fin.Universal Music (détenue par Vivendi Universal), Sony Music (filiale de Sony), Warner Music, d’AOL Time Warner, EMI et BMG, de Bertelsmann AG, espèrent qu’une technologie de protection contre la copie empêchera la prolifération de clones du célèbre site d’échange californien.Mais la solution idéale ne semble pas être pour demain, estime un analyste de Jupiter, qui précise que même s’il en existait une, elle serait soumise à une violente réaction de la part des consommateurs.

La parade idéale à 0,4 % près ?


Bien que les secrets techniques soient précieusement gardés, l’idée est à présent de jouer sur la différence entre les normes des platines CD de salon et celles des lecteurs intégrés aux ordinateurs. “Nous modifions l’agencement physique de l’information du CD sur son support de manière à leurrer le lecteur [de l’ordinateur] “, explique le vice-président de la recherche et du développement chez Midbar. La société israélienne avoue par ailleurs travailler avec au moins l’une des cinq majors.Les lecteurs CD des ordinateurs sont beaucoup plus sensibles aux imperfections que les platines ordinaires, conçues pour tolérer un certain nombre d’égratignures, secousses ou poussières. Lorsqu’on ajoute des erreurs aux CD, ces derniers deviennent en théorie incopiables tout en restant audibles.Macrovision et Midbar ont toutes deux annoncé que leurs technologies avait passé avec succès l’épreuve des ” oreilles d’or “, une série de tests auprès d’audiophiles expérimentés chargés de pointer des différences d’écoute entre un disque normal et un disque ” protégé “.En pratique, le marché propose plusieurs centaines de modèles de lecteurs différents, il y a donc une chance qu’un utilisateur se retrouve un jour avec un CD que sa platine ne pourra pas lire. Un test à grande échelle conduit par BMG et Midbar en Europe, pendant deux ans, sur 130 000 CD ” protégés ” s’est soldé par un échec. Dans 3 % des cas le consommateur n’a pas réussi à écouter le disque protégé.Midbar a déclaré avoir résolu le problème et assuré une fiabilité de sa technologie proche des 100 %. Macrovision indique que des centaines de milliers de CD dotés de son système de protection contre la copie sont actuellement sur le marché et, selon son PDG, Bill Krepick, aucune plainte n’a été émise. Le meilleur cas de figure, ajoute-t-il, porte sur une fiabilité de 99,6 ou 99,7 % des CD vendus, ce qui laisse tout de même quelques milliers de copies inutilisables…

Droit d’auteur contre droit de copier

Le fait de rendre un CD incopiable ne pose pas seulement des problèmes d’ordre technique, rappelle un avocat spécialiste de la propriété intellectuelle chez Greenberg Traurig, Bobby Rosenblaum.” Une ou plusieurs personnes pourraient intenter un procès arguant du fait que les technologies [de protection contre la copie] enfreignent leur liberté d’utilisation “, dit-il, citant pour l’exemple le nombre de consommateurs qui dupliquent leurs CD afin de pouvoir les écouter sous le format MP3 sur d’autres appareils.Cette pratique deviendrait alors impossible si les systèmes de protection devenaient efficaces. Le premier vice-président de Bertelsmann Music Group, Sami Valkonen, a déclaré que BMG pouvait proposer une solution équitable : inclure deux versions des chansons sur un même CD, l’une incopiable pour l’écoute, l’autre destinée à être transférée sur un ordinateur. Cette seconde version ne serait pas au format MP3, mais plus vraisemblablement au format Windows Media Audio, de Microsoft, ce dernier incorporant des fonctions limitatives du nombre de copies.Mais c’est compter sans les pirates informatiques. Les tentatives des maisons de disques pour sceller le contenu de disques compacts déclenchent à chaque fois la recherche d’une clé de décodage par les férus d’informatique qui relèvent irrémédiablement le défi.Un article paru sur le site Internet www.cdfreaks.com laisse entendre que la technologie SafeAudio, de Macrovision, a déjà été ” crackée “.” Je n’ai jamais vu un secteur industriel aussi soucieux de faire de l’argent et de protéger par tous les moyens imaginables “ses” produits, écrit l’auteur de l’article sous le pseudonyme de DoMiN8ToR. Depuis qu’ils ont arrêté Napster, ils deviennent de plus en plus antipathiques et ne semblent pas s’en soucier. “Bill Krepick n’a ni confirmé ni infirmé quelque tentative que ce soit de contournement de la technologie Macrovision. Il a par contre admis que hackers et entreprises se livraient à un véritable jeu du chat et de la souris dans le domaine de la protection contre la copie.Cependant, la loi américaine de protection des droits d’auteur, le Digital Millenium Copyright Act (DCMA), prévoit des peines de prison à l’encontre des personnes qui contourneraient la protection d’un CD.” Notre époque est effrayante, commente Robin Gross, avocat de l’Electronic Frontier Foundation, association américaine de défense de la liberté d’expression sur Internet. Maintenant que nous avons adopté la DCMA, nous sommes soumis à toutes ses restrictions. Les ayants-droit peuvent encadrer leurs oeuvres de toutes les protections imaginables, et quiconque les contourne viole la loi ! “

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La rédaction (avec Reuters)