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Les vertus thérapeutiques cachées des chats et des blogs

Michael Stora a un credo : guérir par le virtuel. C’est d’ailleurs le titre de son dernier ouvrage, dans lequel ce psychologue-psychanalyste explique l’influence bénéfique des chats et des blogs sur ceux qui les pratiquent.

Avec une formation de cinéaste, Michael Stora est devenu psychologue-psychanalyste. Il travaille comme psychologue clinicien pour enfants et adolescents au CMP (Centre médico-psycho-pédagogique) de Pantin (93) où il a créé un atelier de
jeux vidéo. Il réfléchit depuis plusieurs années sur l’impact des jeux vidéo sur les enfants souffrant de troubles psychiques, mais aussi sur le lien interactif de l’homme à l’ordinateur et de ses conséquences sur les processus
mentaux.01net.com. Vous utilisez déjà les
jeux vidéo
comme outil thérapeutique. Comment en êtes-vous arrivé aux chats ?


Michael Stora. A partir de ma propre expérience d’utilisateur. En même temps que je travaillais sur les jeux vidéo, j’ai ouvert sur MSN une salle de discussion : ‘ Le psy vous
reçoit ‘ pour recevoir des témoignages de ‘ chateurs ‘. Et là, je me suis rendu compte que le chat permet à certains de se soigner.Comment cela ?


Le chat est le bal masqué des mots. En chattant, on flirte avec la limite de ses désirs sans la dépasser, on joue à être un autre. C’est un lieu de mise en scène de ses secrets de famille, ses répétitions névrotiques, ses quêtes
narcissiques. On y cherche aussi la valorisation au travers des mots de l’autre. Le choix du pseudo, de la police de caractère et de sa couleur vont être le révélateur de la face cachée de son Soi : idéal ou transgressif. Ainsi, une
personne qui n’osait pas assumer son identité homosexuelle a commencé à chatter en utilisant un pseudonyme féminin sur un forum hétérosexuel et, perçue comme un objet de désir, a pu plus facilement s’affirmer.En quoi ce travestissement dans un monde virtuel est-il positif ?


Le chat est une étape pour se donner du courage. Il peut aussi avoir une fonction de réparation par rapport à une personne qui trouve son physique ingrat. Cela ne veut pas dire qu’on s’affranchit de la réalité. Dans le chat,
l’autre répond. Et quelquefois, ce n’est pas ce que l’utilisateur veut entendre. Même dans un lieu virtuel, il y a un principe de réalité qui agit. De même, l’idée que l’on peut se rencontrer dans la vraie vie
apporte une désillusion, mais celle-ci est salutaire. Pour moi, le virtuel ne s’oppose pas au réel. Le chat met en scène la réalité intérieure de ses participants.Peut-on utiliser le chat en thérapie ?


Non, car il y a trop de maîtrise et de retenue à l’écrit. Il manque les lapsus et les associations libres, utiles à une thérapie classique. En revanche, c’est une façon de s’autosoigner. Elle ne convient pas à tous les
problèmes. Notamment, à ceux qui ont une conduite addictive et qui ne font reproduire sans fin les mêmes scénarios.Les blogs ont-ils les mêmes vertus ?


D’une certaine manière. Pour moi, les blogs relèvent d’un exhibitionnisme sain. Les plus beaux blogs laissent aussi une grande part de création. Or, toute démarche créative a une fonction thérapeutique par un effet de mise à
distance de soi, de l’image que l’on porte sur soi-même.Faut-il avoir peur de laisser ses enfants sur les chats et les blogs ?


Un enfant, s’il peut dialoguer par messagerie instantanée avec ses copains, n’a aucun intérêt à chatter. Un enfant qui chatte se met volontairement en danger, car il est trop livré à lui-même et n’a pas de possibilité
de communiquer. C’est un moyen pour lui d’appeler à l’aide et de faire payer à ses parents leur absence. Ou au contraire, il a des parents trop exemplaires et, du coup, il ne met pas en doute le monde des adultes et accorde sa
confiance au premier venu.Pourtant, de nombreux adolescents chattent et ont leurs blogs ?


À cet âge, le problème est différent. L’adolescence est une période de transgression. Le chat et le blog représentent alors une façon de flirter avec ses limites, mais aussi de rencontrer ses pairs. L’adolescent a aussi une
mauvaise image de lui, le blog va lui permettre de se mettre en avant avec une part valorisante. Toutefois, il faut que les responsables des blogs restent vigilants et imposent des limites, pour faire respecter le droit à l’image, par
exemple.Et comment doivent réagir les parents ?


Pour l’enfant, il faut exercer un contrôle rassurant en mettant l’ordinateur dans une salle de passage avec des filtres appropriés. Pour les adolescents, il faut respecter leur intimité et leur faire confiance sans couper le
dialogue.

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propos recueillis par Stéphanie Chaptal