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Les standards idiots ont la vie dure

La micro, comme d’autres techniques, a ses égarements. Si ces derniers perdurent en dépit du bon sens, c’est parce qu’ils sont immobilisés par l’inertie.

Dans l’industrie, les incongruités à succès ne sont pas rares. Prenez le moteur à explosion, qui n’offre qu’un temps moteur sur quatre. En dépit d’un rendement énergétique de moins de 30 %, il s’est pourtant imposé aux automobiles de toute la planète.En micro-informatique, des énormités ont également survécu, plus par intérêt que par véritable impératif économique. Prenez le système d’adressage de mémoire inventé par Microsoft pour son MS-DOS. On a rarement vu un système plus crétin. Il ne s’agissait ni de 16 bits ni de 32 bits, mais d’un 20 bits bâtard : 16 bits d’adresses plus 4 bits pour définir un décalage par paquets de 64 Ko.Merci au concepteur de ce système ; il nous a fait jongler avec les Extended Memory System et autres XMS. Et, hormis pour les plus récentes versions de Windows, l’architecture des programmes est encore inspirée de ce mode d’adressage imbécile. Enfin, il aura au moins fait rire les développeurs Mac qui disposent, eux, d’un adressage linéaire sur 32 bits.La micro a bien d’autres moutons à cinq pattes. Ainsi, le clavier, quasiment le seul composant de votre PC inchangé depuis quinze ans, est également un modèle d’ergonomie à l’envers. Pourquoi le Z, lettre si peu employée, se trouve-t-elle entre le A et le E, parmi les plus utilisées ? Tout simplement parce qu’au temps des machines à écrire, il était impératif de séparer les touches fréquemment utilisées, sinon tout le bazar se coinçait.La cause a disparu, l’effet est resté : plusieurs constructeurs ont tenté de mettre à mal le standard en proposant des claviers plus ergonomiques. Consultés, des laboratoires indépendants leur ont reconnu un gain d’efficacité et de vitesse de frappe d’au moins 40 %. Mais l’Azerty, comme les cafards, a la vie dure. Il est resté, et les constructeurs de claviers exotiques ont mordu la poussière.Devant tous ces ratages, je me demande s’il était tellement difficile de faire table rase du passé. Après tout, ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles.* Chef de service à L’Ordinateur Individuel

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Etienne Oehmichen*