Passer au contenu

Les sites de sports lorgnent le pactole de la Française des jeux

Faute de pouvoir proposer des paris en ligne, les sites sportifs nouent des partenariats avec des bookmakers étrangers.

Le secteur des jeux en ligne est lucratif. D’ici à la fin de l’année, il devrait peser 12 milliards de dollars estime le cabinet Christiansen Capital. Les sites sportifs nationaux entendent bien tirer leur épingle du jeu, même si
en France ce domaine est soumis à un monopole.En effet, les jeux d’argent sont fortement réglementés dans l’Hexagone. Une loi de 1891 interdit toute prise de paris sur les courses hippiques en dehors des autorisations délivrées par le ministère de l’Agriculture. Quant à
l’organisation de loteries ou de jeux de hasard payants, elle n’échappe pas non plus à la législation. Elle a été confiée en 1936 à la Française des jeux. Cette dernière, comme le PMU, n’hésite pas à
poursuivre en justice les contrevenants.Malgré ce cadre rigide, les acteurs du sport en ligne semblent avoir trouvé une parade pour contourner la loi. Plutôt que d’organiser eux-mêmes les paris, ils ont choisi de générer du trafic sur des sites de jeux hébergés à l’étranger,
tels MrBookmaker et Betandwin. Ce partenariat prend généralement deux formes : la vente d’espace publicitaire ou l’affiliation. Dans ce dernier cas, les sites sportifs sont rémunérés en fonction du trafic ou du chiffre d’affaires dont ils sont
à l’origine. Ainsi, les sites de sport proposent des services de paris à leurs lecteurs, tout en ne les hébergeant pas sur leurs propres serveurs.Ni Sporever, ni Sport24 ou encore Sports.fr n’ont souhaité s’exprimer sur cet épineux sujet. Mais leurs partenaires, eux, sont bien conscients de la limite de la légalité de leur activité sur le territoire français. Dans ses conditions
générales d’utilisation MrBookmaker se dédouane : ‘ […] la participation à des paris et/ou jeux de hasard peut être soumise à des restrictions légales et même être interdite dans certains pays. Le parieur qui prend part
aux services de paris en ligne offerts par MrBookmaker accepte seul la responsabilité en ce qui concerne la légalité de ses agissements par rapport à la loi qui lui est applicable. Le parieur prend également note que MrBookmaker ne détient en aucun
cas une obligation d’information envers les parieurs quant à la légalité de leurs agissements sur ce site
.

La peur de perdre

Qu’en est-il des sites français mettant des espaces publicitaires à la disposition de bookmakers étrangers ? ‘ Nous n’avons jamais été saisis en ce domaine. Si tel avait été le cas, nous
n’aurions pu émettre qu’un avis défavorable à une telle publicité. Les sites français qui acceptent ces campagnes pourraient être poursuivis par l’Etat, par les organismes monopolistiques comme le PMU ou bien encore par un internaute qui aurait
perdu de l’argent
‘, estime Jérôme Constant, juriste conseil du Bureau de vérification de la publicité.Pourtant, la Française des jeux a choisi à ce jour une autre option : ‘ Nous avons entamé une procédure judiciaire à l’encontre de MrBookmaker et BetandWin. La publicité pour ces sites, dont l’activité est
illégale en France, est également interdite
‘, rappelle Béatrice Mottier son porte-parole. La société fait pression sur les sites dédiés au sport et leurs régies publicitaires par l’envoi régulier de
recommandés avec accusé de réception. Mais semble hésiter à mettre en branle la machine judiciaire.Certains évoquent l’absence de poursuites pour justifier la légalité de leur activité. ‘ En attendant une jurisprudence sur la publicité, nous avons choisi d’accepter les campagnes de sites de paris sportifs. J’ai
toutefois appelé la DGCCRF pour vérifier la légalité de la vente d’espaces publicitaires en ce domaine ‘
, explique David Tomaszek, le directeur général de sport.fr. Contactée à ce sujet, la Direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes n’a pu à ce jour confirmer ces propos.Eric Barbry, avocat au cabinet Bensoussan, éclaircit : ‘ Même s’il n’existe pas de texte de loi qui interdise clairement la publicité pour les paris en ligne via des sites étrangers, on peut difficilement
promouvoir une activité interdite. Si les sites sportifs français ne sont pas poursuivis, c’est avant tout parce que les organismes monopolistiques craignent la jurisprudence qui pourrait découler de décisions de justice. D’autant quau niveau
européen, les décisions de justice ont plutôt été en leur défaveur
. ‘

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Hélène Puel