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Les opérateurs télécoms ont des réserves sur l’iPad

Alors que la tablette Internet d’Apple est en précommande aux Etats-Unis, les opérateurs européens craignent que l’iPad ne sature leurs réseaux 3G et ne soit pas très rentable pour eux.

Tout auréolé du succès de l’iPhone, Apple s’apprête à commercialiser l’iPad en Europe, à la fin du mois d’avril. A ce stade, l’enthousiasme des opérateurs européens à l’égard de la tablette Internet est mitigé.

« Il y a chez les opérateurs la volonté d’être le partenaire privilégié d’Apple, tout en se disant que, finalement, ça ne vaut peut-être pas toutes les concessions », résume Virginie Lazès, directrice associée au sein du cabinet d’analyse Bryan Garnier. En France, Orange, SFR et Bouygues Telecom ont tous confirmé qu’ils négociaient la possibilité de vendre la version 3G de l’iPad, qui permet de se connecter aux réseaux télécoms mobiles.

L’iPad, « c’est l’iPhone avec un business modèle plus défavorable aux opérateurs », estime John Strand, un consultant indépendant spécialisé dans les télécoms. Certains experts estiment que le lancement de l’iPad 3G en Europe pourrait donc se faire sans subvention de la part des opérateurs, qui se retouvent exclus des fonctions les plus lucratives (voix et SMS), et que, de ce fait, la tablette risque d’être cantonnée à une niche si Apple ne leur propose pas un partage des revenus plus avantageux.

Surcharge des réseaux

Echaudés par l’expérience de l’iPhone, dont le coût de subvention a pesé sur leurs marges, « les opérateurs déchantent un peu, estime Virginie Lazès. Ils commencent à se plaindre que ce sont eux qui construisent les tuyaux, qui font les investissements, mais que ça ne leur donne pas accès à ce qui pourrait être le feu d’artifice, c’est-à-dire les services mobiles. » Selon plusieurs opérateurs, les revenus à attendre de ce type d’appareil, uniquement « data », ne justifient pas de le subventionner.

Proposant des forfaits illimités d’Internet mobile à prix fixe, les opérateurs craignent, par ailleurs, que les applications vidéo vantées par Apple sur l’iPad ne s’avèrent trop gourmandes en bande passante. « On essaie d’imaginer quel sera l’usage du client autour du produit et, en fonction de cet usage-là et de ce qu’il implique en termes de ressource réseau, on imagine quel type de marge on peut avoir », explique un dirigeant de division chez un opérateur européen, qui étudie le produit.

« L’iPad a un écran neuf fois plus gros que l’iPhone et va générer beaucoup plus de consommation vidéo. Il y a de quoi provoquer de sérieux dégâts sur le réseau mobile, qui n’a tout simplement pas été conçu pour supporter un tel flux », juge de son côté Craig Moffet, analyste chez Bernstein.

Aux Etats-Unis, Apple commercialisera fin avril l’iPad 3G en exclusivité avec AT&T, mais le PDG de l’opérateur américain a d’ores et déjà déclaré que l’appareil devrait être utilisé plutôt en connexion Wi-Fi qu’avec l’Internet mobile.

Des revenus plus juteux sur les services

Si les opérateurs font la fine bouche sur l’iPad, c’est également parce qu’ils souhaiteraient profiter des négociations actuelles pour rééquilibrer le partage de valeur, selon des spécialistes. Les groupes de télécoms souhaitent capter une partie des revenus sur les services les plus juteux, comme les applications ou les contenus, pour l’instant raflés par leurs partenaires.

« Les questions que les opérateurs se posent [avec l’iPad] sont symptomatiques de leur position actuelle dans la chaîne de valeur, et de leur volonté de ne pas être de simples tuyaux », commente Thomas Husson, analyste chez Forrester.

Les opérateurs souhaitent notamment prendre une part du gâteau dans les applications pour mobiles, un marché qui, selon l’institut d’études Gartner, devrait être multiplié par trois jusqu’en 2013, pour atteindre plus de 21 milliards d’euros.

Orange a mis sur pied son propre magasin virtuel d’applications en décembre dernier pour faire concurrence à l’AppStore d’Apple. Une vingtaine d’opérateurs se sont par ailleurs ligués en février, au Mobile World Congress de Barcelone, pour créer une plate-forme alternative open source.

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La rédaction (avec Reuters)