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Les mesures antiterroristes peinent à entrer en application

La commission des lois de l’Assemblée nationale a présenté en début de mois un rapport sur l’application de la loi de janvier 2006 sur la vidéosurveillance et la conservation des données de connexion.

Dans le climat d’émotion créé par les attentats de Londres, en juillet 2005, la France s’attelait à la mise en place de mesures antiterroristes adaptées au monde des nouvelles technologies. Le
texte est entré en vigueur le 23 janvier 2006, avec au programme : développement de la vidéosurveillance,
lecture automatisée des plaques d’immatriculation, conservation des données de connexion et des données d’identification.Deux ans après, la commission des lois de l’Assemblée nationale tire un premier bilan, en partie parce que le gouvernement est censé remettre un rapport d’évaluation annuel de son texte et ne l’a encore pas fait. Du coup, elle a
présenté le 5 février dernier
son propre rapport, dirigé par les députés Eric Diard (UMP) et Julien Dray (PS).Premier enseignement : la vidéosurveillance avance à petits pas. ‘ Cette possibilité a […] eu peu de traductions concrètes au cours de
l’année 2006
: les ports autonomes de Dunkerque, de Strasbourg et, en Corse, plusieurs trésoreries principales et un pont routier en construction se sont équipés de la vidéosurveillance dans le cadre de cette
finalité
[antiterroriste, NDLR]. C’est à Paris que l’installation de la vidéosurveillance pour filmer la voie publique aux abords de sites sensibles a trouvé sa traduction la plus large ‘.
Onze dispositifs de vidéosurveillance ont ainsi été installés dans la capitale depuis la loi, et 123 gares sont équipées.

Le problème des coûts

Dans ce cadre, les députés se sont intéressés à une disposition qui permet à l’Etat d’imposer à des sites sensibles (barrages, centrales nucléaires…) de la vidéosurveillance. Or en deux ans, l’Etat n’a jamais fait usage de
cette prérogative. ‘ Il semblerait que certains préfets aient engagé des discussions avec des gestionnaires de sites sensibles, des transports publics principalement, mais qu’elles aient achoppé sur la question du
financement des équipements de vidéosurveillance qui seraient rendus obligatoires ‘,
note le rapport.Les problèmes de coûts sont un frein au développement d’une autre mesure. En théorie, la police peut avoir un accès direct aux images filmées par les caméras d’un organisme tiers (collectivités, régie de transports publics…) sans
avoir besoin d’une procédure judiciaire en cours. Pourtant, ‘ en novembre 2007, sur les 230 communes équipées d’un dispositif de vidéosurveillance dans les zones de compétence de la police
nationale,

seules 53 avaient organisé le transfert d’images vers les services de police. ‘ Pour mettre un coup d’accélérateur, la ministre de l’Intérieur Michèle Alliot-Marie a fait savoir que
l’Etat se chargerait de financer de nouveaux raccordements.

Zone d’ombre

Pour le dispositif de lecture automatisée des plaques d’immatriculation (Lapi), des expérimentations ont lieu en ce moment en
Ile-de-France, mais les choses sont allées un peu plus lentement que prévu là encore. Pour des raisons réglementaires, la Cnil a demandé plus de garanties quant au respect de la vie privée. Six véhicules sont équipés et
‘ des résultats encourageants ont été enregistrés par les services de police parisiens : plus de 400 000 plaques d’immatriculation ont été lues en l’espace des quelques mois
d’expérimentation en 2007,

ce qui a permis d’identifier des dizaines de véhicules volés. ‘Mais c’est le sujet sensible de la conservation de données qui semble poser le plus de problème. La loi élargit, à l’article 5, le champ des organismes censés conserver les données de connexion (les cybercafés et les bornes Wi-Fi
sont a priori concernés). Mais le flou perdure : ‘ Les services de la Cnil reçoivent une dizaine de demandes de consultation par semaine d’organismes, publics ou privés, qui cherchent à savoir s’ils relèvent
des dispositions de l’article 5
. ‘A cela s’ajoute une autre zone d’ombre. Un décret d’application sur la conservation des données d’identification des auteurs d’un contenu en ligne est attendu, dans une certaine tension du côté des prestataires Internet.
Des avant-projets n’en finissent pas de surgir (encore récemment) et d’être proches de la validation, et la Cnil n’est toujours pas
satisfaite de la version qui lui a été soumise en décembre.

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Arnaud Devillard