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Les maux de la micro

Le temps passé devant son ordinateur peut être à l’origine de troubles physiques. Avec quelques bonnes pratiques, vous regarderez votre écran d’un autre œil.

Fixes ou portables, les ordinateurs sont devenus omniprésents aussi bien dans notre environnement professionnel que privé. Le nombre de personnes passant plusieurs heures par jour devant un écran est en progression constante. Avec l’explosion d’Internet, l’ordinateur a modifié de façon notable les modes de vie et de travail, son temps d’utilisation par les salariés ayant doublé en dix ans. Les conséquences ne se sont pas fait attendre et diverses pathologies liées à son usage se sont développées. Avec plus de 30 millions de PC en service dans l’Hexagone (source Gartner), les Français ne sont pas épargnés par ces petits maux qui perturbent la vie au quotidien : fatigue visuelle, troubles musculo-squelettiques (TMS) ou stress… Ils ont pour cause une activité intensive devant un écran sans précautions préalables.Depuis l’implantation du poste de travail à la posture adoptée devant l’écran, une série d’éléments entrent en jeu qui favorisent ou limitent ces troubles. “ J’ai fait une ou deux tendinites au poignet droit à des époques où j’abusais de la souris. Puis j’ai commencé à avoir les avant-bras crispés et douloureux lorsque je tapais après de longues périodes d’utilisation de l’ordinateur… La douleur dans mes avant-bras est chronique. Si je passe quelques jours sans toucher du tout à un ordinateur, j’ai nettement moins mal. Par contre, si je me mets à taper, à écrire ou à utiliser la souris, j’ai très vite assez mal pour arrêter ”, témoigne Stéphanie Booth sur son blog, dans un billet consacré aux TMS.

Et si vous faisiez une pause ?

En informatique, le poste de travail comprend écran, clavier, souris et bien sûr fauteuil, élément essentiel à la posture du corps. L’aménagement conjugué de tous ces éléments est déterminant pour limiter fatigue visuelle et symptômes divers. Parmi ces derniers se distinguent les troubles musculo-squelettiques.Ce terme générique désigne un ensemble de douleurs bénignes et de pathologies inflammatoires et dégénératives de l’appareil locomoteur, qui affectent les muscles, les tendons et les nerfs des bras et de la colonne vertébrale. En France, 5 % des TMS déclarés sont attribuables au travail sur ordinateur et reconnus au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles. Le syndrome du canal carpien est le plus répandu. Il est causé par la compression du nerf médian dans le poignet. Il provoque des douleurs et des fourmillements aux mains et poignets, et une perte de force musculaire. L’épicondylite (ou tennis-elbow) se déclare aussi chez les gros utilisateurs du clavier et de la souris. D’autres parties du corps comme les épaules, le cou et les trapèzes sont sujettes à des douleurs, notamment lorsque l’écran est positionné trop haut ou trop bas par rapport aux yeux. Le port de lunettes à verres progressifs accentue la pression sur les cervicales, car il faut lever le menton pour adapter la correction à l’écran.En cause également, le stress ou une très forte concentration qui augmente les tensions musculaires. Au tableau des pathologies répertoriées s’ajoutent les douleurs lombaires et les tendinites liées à un mauvais positionnement par rapport au clavier et à la souris. Ces affections sont dues le plus souvent à une méconnaissance des bonnes pratiques face à un ordinateur. Grégory Ehleringer, conseiller en hygiène et sécurité pour le Ciamt, Centre interentreprise et artisanal de santé au travail, travaille sur l’ergonomie des postes de travail : “ Les Français ne sont pas suffisamment sensibilisés aux questions d’ergonomie. Ils subissent donc des pathologies qui les handicapent dans leur travail quotidien. Nous intervenons en entreprise pour sensibiliser les responsables et les salariés sur ce type de problèmes. Le travail sur ordinateur peut en effet provoquer des troubles qu’il est facile de minimiser pour peu qu’on les traite en amont. ” Ainsi, le réglage de la hauteur d’un fauteuil, de la distance d’un écran ou d’un clavier sont des adaptations simples à mettre en place. Il est conseillé de faire des pauses régulières et “ actives ” de cinq à quinze minutes toutes les deux heures, autrement dit, de se lever de son fauteuil et de faire quelques pas pour se dégourdir les muscles et les articulations. “ Nos recherches portent sur les causes de ces troubles qui, le plus souvent, sont dus à un mauvais positionnement des bras, des poignets, de la nuque ou du dos, précise François Cail, physiologiste à l’INRS. Les recommandations pour y remédier concernent l’organisation du travail ainsi que la disposition et l’utilisation des matériels informatiques. ”Il existe des normes internationales pour le travail sur ordinateur. La norme ISO 9241 prend en compte tous ces aspects avec des recommandations sur l’affichage, le clavier, la souris, l’environnement physique, le dimensionnement du poste de travail et le logiciel.

Être détendu devant l’écran

Contrairement aux idées reçues, une activité continue sur ordinateur n’altère pas les capacités visuelles. Mais, sollicitant la vue de manière intensive, elle peut révéler de petits défauts. Et provoquer une fatigue visuelle, qui se traduit par des maux de tête, des picotements, des éblouissements, une lourdeur des globes oculaires. Rien de tout cela n’est bien grave pour peu que l’on mette ses yeux au repos.En revanche, ces maux peuvent devenir récurrents si l’individu n’observe pas des temps de pause réguliers. “ Il arrive aussi que l’accommodation se fasse mal par rapport à l’écran. Des céphalées se déclarent, ou une gêne visuelle comme le fait de voir flou. Ces désagréments peuvent disparaître avec quelques séances d’orthoptie qu’il est bon d’effectuer ensuite régulièrement ”, constate le Dr Vieille, médecin du travail au Ciamt.Pour un meilleur confort visuel, l’idéal est de quitter l’écran des yeux de temps en temps, cligner des paupières et regarder au loin. Cela permet de relâcher l’accommodation et constitue une pause bienfaitrice pour le regard. Le syndrome de l’œil sec avec ses sensations de brûlures ou picotements est, lui, lié le plus souvent soit à la climatisation qui assèche l’air, soit à un écran placé trop haut par rapport au regard ou encore à la rareté du clignement des yeux. La luminosité joue aussi un rôle dans les troubles oculaires. Reflets et éblouissements sont des gênes fréquentes qu’il est facile de faire disparaître en procédant à quelques adaptations : placer son écran perpendiculairement aux fenêtres, réduire les sources de lumière trop puissantes qui provoquent des reflets et altèrent la vision. Les écrans mats ? comme les LCD ? apportent un confort visuel supérieur à celui des écrans cathodiques. Mais François Cail déplore “ la réintroduction des reflets miroir sur les écrans d’ordinateurs portables, qui sollicitent une accommodation permanente de l’œil ”.Les portables n’ont pas que ce seul inconvénient. Les médecins incriminent ce type de matériel pour les postures particulières qu’il génère. En cause, leur clavier rattaché à l’écran et qui, de ce fait, se trouve forcément placé trop bas par rapport au regard, surtout lorsque l’ordinateur est posé sur les genoux. Là c’est le dos qui souffre. Leur miniaturisation, à l’image des mini-portables, nécessite un effort d’attention plus soutenu, en particulier pour la lecture de texte à l’écran. Ici, ce sont les yeux qui peinent.

Efforts de prévention

Tous ces facteurs de troubles sont bien identifiés et de nombreuses préconisations sont maintenant dispensées au grand public pour y remédier, notamment par le biais de la médecine du travail. “ On part de loin en France. La sensibilisation au problème n’est pas encore prioritaire, même si les entreprises se sentent davantage concernées ”, reconnaît Grégory Ehleringer. Un abondant travail scientifique portant sur les troubles musculo-squelettiques liés au travail sur ordinateur a été réalisé. Il met l’accent sur l’efficacité de la prévention. Et, le plus souvent, ces recommandations ne nécessitent pas d’investissement financier. Restent le stress engendré par l’attention et la tension, la pression du temps ou encore le confinement, le quel demeure un facteur non négligeable de maux induits par l’utilisation de l’informatique.

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Frédérique Crépin