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Les grands débuts du vote en ligne ne récoltent pas les suffrages

La première expérience officielle de vote électronique ne s’est pas soldée par un net accroissement de la participation, comme l’espéraient les promoteurs de ce service.

En théorie, le vote électronique doit revitaliser la vie politique française en ramenant aux urnes les électeurs qui s’en détournaient. Mais, pour son
premier test grandeur nature, le vote en ligne est resté virtuel. Expérimenté pour les élections 2003 des représentants au CSFE (Conseil supérieur des Français à l’étranger) des
expatriés Français aux Etats-Unis ?” élections qui se sont terminées ce week-end ?” ce nouveau mode de scrutin n’a pas déplacé les foules.Le taux de participation est en effet modestement passé de 14 % en 2000 à 16,5 %. Un progrès, puisque ce pourcentage ne cessait de décroître avec les élections. Mais un échec, comparé aux ambitions du projet.
‘ On espérait un bond nettement plus important ‘, explique Christophe Monier, tête de liste ADFE(1) pour la côte Est. De fait, les défenseurs du vote en ligne en assuraient la
promotion d’abord en promettant un taux de participation nettement plus important.Pas question ici d’accuser l’informatique. ‘ Techniquement, cela a extrêmement bien fonctionné ‘, juge Renaud Granel, membre du conseil d’administration de
l’UFE(2) à New York. ‘ Les gens qui ont voté en ligne sont très contents. ‘La simplicité du dépouillement a, elle aussi, été appréciée. Finies les soirées passées à vérifier les bulletins un par un et à discuter sans fin sur les enveloppes conformes ou non. A New York, dix minutes ont suffi pour obtenir
les résultats des deux bureaux de vote de la circonscription.

De nombreux ‘ cafouillages ‘ ont réduit la participation

Mais, si le système a fonctionné dans son ensemble, les détails sont, eux, moins reluisants. Le vote en ligne demande encore de nombreux affinages. Tenus au courant par un courrier accompagnant les listes électorales, certains électeurs
n’ont tout simplement pas noté la disponibilité de ce nouveau service. Et ceux qui l’ont remarquée n’ont pas tous pu aller jusqu’au vote.Pour remplir son devoir électoral, un code secret était en effet nécessaire et devait être révélé en grattant une zone de la feuille d’information. Mais, en grattant trop fort, certains ont effacé le code en même temps que sa
protection. Et ont découvert qu’Election.com, le prestataire chargé de cette élection, était incapable de leur fournir un nouveau code.Les femmes mariées ont, elles, eu du mal à voter en ligne : les courriers contenant l’identifiant ont été envoyés sous leur nom de jeune de fille et ne sont donc pas arrivés la plupart du temps. La procédure de vote, elle-même,
n’était pas exempte de tout reproche. Pour éviter qu’un même électeur s’exprime deux fois, en ligne et dans les urnes physiques, il avait été décidé que le vote Internet serait clos le samedi midi pour donner aux responsables des votes physiques une
liste des votants. Impossible, donc, de voter le dimanche, ce qui a surpris certains électeurs.

Un coût supplémentaire important

Quant aux recommandations de la Cnil, elles ont été purement et simplement ignorées. La commission s’était ainsi inquiétée de l’emplacement des serveurs, implantés aux Etats-Unis pour une élection concernant la France. La Cnil avait
aussi demandé que les courriers contenant le code soient envoyés en recommandé pour avoir la certitude que les identifiants parvenaient à leur destinataire. Un surcoût que les autorités ont évité.Économiquement, le vote en ligne est loin d’avoir convaincu. ‘ Le problème de l’élection par Internet, c’est qu’il s’agit d’un coût supplémentaire pur, qui vient en supplément aux autres formes de vote et ne se
substitue pas à elles,
explique Christophe Monier. A 2 500 votants par Internet, on doit au moins avoisiner les 20 euros par vote. ‘Les participants à cette élection n’enterrent pas pour autant le vote électronique. Parce qu’il s’agit d’une première. Et parce que les électeurs perçoivent mal l’intérêt des élections au CSFE, un organisme qui joue pourtant un rôle
important dans le quotidien des expatriés et qui désigne les neuf sénateurs les représentant.Reste que le CSFE était un terrain très favorable au vote en ligne, puisqu’il s’agit de la seule institution acceptant le vote par correspondance. ‘ Dans ma circonscription, à Washington D.C., on trouve des gens
situés à 500 kilomètres du consulat, donc du bureau de vote
‘, précise Renaud Granel. Des cibles de prédilection manquées par le vote en ligne.(1) Association démocratique des Français à l’étranger(2) Union des Français à létranger

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Ludovic Nachury