Passer au contenu

Les futurs créateurs de jeux vidéo se font la main

Les étudiants de l’Ecole nationale du jeu et des médias interactifs numériques présentaient leurs projets de deuxième année. Reportage.

A Angoulême, l’Ecole nationale du jeu et des médias interactifs numériques (ENJMIN) forme ceux qui créeront les jeux de demain. Chef de projet, game-designer, graphiste, sound-designer, programmeur et ergonome, tous les métiers qui interviennent dans une équipe sont enseignés au sein de cette jeune école qui a ouvert ses portes en 2004.
En deuxième année de master, les étudiants se regroupent en équipes et s’attellent à un premier projet de jeu vidéo. L’objectif de l’exercice est d’atteindre le stade de la pré-production : une idée bien ficelée, un prototype, un embryon de plan marketing qui pourrait servir à convaincre un studio d’investir plusieurs millions d’euros dans le projet. Au mois de mars, les jeunes créateurs présentaient leurs projets devant un jury de professionnels présidé par Serge Hascoët, créateur en chef chez Ubisoft.

« Mu » : un jeu de puzzle en 3D dans une cité malade

Dans « Mu », le joueur incarne un jeune homme emprisonné dans une gigantesque cité abandonnée. Son objectif est de guérir la cité en atteignant ses niveaux cachés et en ouvrant des puits de lumière. Pour cela, il doit modifier l’architecture en entrant en synergie avec des éléments et en les déplaçant. Mathieu Gasperin, un des graphistes de l’équipe, avoue que l’inspiration est venue de jeux fétiches comme Shadow of the Colossus et ICO.
« On ne développe pas un jeu tout seul. On travaillait tous ensemble dans la même salle. Chaque spécialité doit comprendre les contraintes des autres », explique-t-il. Même si l’équipe sait que son projet ne sera jamais finalisé, elle espère le faire vivre encore un peu sur un blog dédié. Un stage professionnel, dernière étape de la formation, va bientôt disperser les étudiants à Paris, Lyon ou Montpellier, les hauts lieux de la création de jeux vidéo en France.

« Everfall » : en chute libre dans un monde apocalyptique

Eva, bannie pour avoir dérobé des prophéties secrètes, est en chute libre dans un environnement post-apocalyptique dans lequel elle cherche des indices pour décrypter les prophéties. La perspective fuyante de ce monde bleu-gris, l’univers sonore, tout contribue à une sensation de chute dans un jeu qui se joue seul ou à deux. « On pourrait s’en servir pour ceux qui souffrent de vertige », réagit immédiatement Michaël Stora, psychologue spécialiste du jeu et membre du jury. « Une mécanique viscérale », renchérit un autre membre du jury.
« Je joue depuis que je suis tout petit », raconte Christopher Gardinier, le chef de projet d’« Everfall », qui est passé par une école de commerce avant de rejoindre l’ENJMIN. « Je pensais que le jeu vidéo était à la fois plus artistique et plus industriel. En fait, c’est très artisanal et la difficulté est de faire cohabiter des talents différents. »

Alliance
Alliance

« Alliance » : la stratégie à la portée de tous

« “Alliance” est un jeu de stratégie simplifié, un duel entre deux joueurs. Il y a une phase de tour-par-tour où chacun se construit un squad” et une phase en temps réel pour le combat à la souris ou à la manette », explique Jean-Philippe Durand, le chef de projet d’« Alliance », sur scène devant le jury.
Puis l’un de ses coéquipiers continue en anglais (pour tester la compréhension des étudiants, amenés à évoluer dans un monde anglophone, l’école leur impose de faire une partie de leur présentation dans cette langue). « On a trois types d’unités (tank, mage et soldat) et trois couleurs qui représentent trois différentes intelligences artificielles : agressivité, défense et collaboration », continue le game-designer, Alexandre Wyns. La présentation finie, Alexandre explique son envie de créer des jeux vidéo. « J’aime créer une expérience, la partager, faire vivre quelque chose aux joueurs », raconte celui qui a grandi avec Mario et Zelda.

« Tempus Fugit » : retour dans le passé

Après avoir inventé le voyage temporel, une société très policée l’a interdit pour éviter toute tentation de modifier le passé. Le héros du jeu est un agent de la police temporelle qui pourchasse ceux qui enfreignent la loi. Dans des séquences de jeu de 2 minutes, le joueur peut retourner en arrière et se créer plusieurs alter ego qui vont l’aider dans sa mission. Un alter ego peut par exemple faire diversion. Le jeu, prévu pour PC et Xbox 360, est fondé sur l’infiltration, l’action et la stratégie. Les membres du jury ont paru apprécier ce projet ambitieux. Le voyage temporel semble dans l’air du temps.

« Sound Cities » : une bataille de DJ

Sound cities
Sound cities

Deux joueurs s’affrontent aux platines (le jeu nécessite des platines Bitmania) dans ce jeu de tactique musicale. En prenant le contrôle du potentiomètre et des faders, un des joueurs finit par réduire son adversaire au silence. Il gagne la bataille. Destiné à une niche assez étroite, le jeu a laissé le jury quelque peu perplexe.
Une partie de l’exercice consiste à monter un plan marketing et à estimer le budget. En ajoutant le nombre de mois-homme, les licences pour les outils et autres coûts annexes, les équipes arrivent à des budgets compris entre 1,5 et 4,5 millions d’euros, des sommes que les professionnels dans la salle jugent sous-estimées. Et pourtant il faudrait déjà vendre 500 000 exemplaires pour rentrer dans les frais ! Une façon d’aborder la dure réalité économique du monde du jeu.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Isabelle Boucq