Passer au contenu

Les formations de troisième cycle ont pris le train des nouvelles technologies

Fille douée de la veille, l’intelligence économique a résolument pris le train des nouvelles technologies. Les formations de troisième cycle aussi.

Pour autant, les outils y sont considérés comme des moyens. On ne s’attarde pas à savoir comment ils ont été développés. Au mieux, les écoles forment à la manipulation fine de logiciels existants. Au pire, l’essentiel des cours porte sur la stratégie d’entreprise, les réseaux de connaissance, la qualification de l’information.Bref, tout ce qui peut servir à replacer l’information au c?”ur des projets de développement. Relativement récentes, les formations longues (DESS, DEA, mastère ou diplôme d’Etat) doivent s’adapter constamment à l’évolution des outils, mais aussi et surtout aux mentalités des entreprises. Les cadres salariés ou étudiants de niveau bac +4 peuvent y prétendre. Mais quelle est leur plus-value sur un curriculum vitæ déjà bien fourni ?

Plus de modules de veille dans les cursus

” Les informaticiens ne sont pas tellement représentés dans les promotions, regrette Jean-Pierre Bernat, vice-président de l’Association des professionnels de l’information et de la documentation, intervenant au DESS de Poitiers et ancien responsable du centre de documentation du siège du groupe Elf. D’abord, ils trouvent assez facilement un emploi. Ensuite, la veille pâtit d’un manque de visibilité dans leur secteur d’activité. “ Une méconnaissance qui, heureusement, s’estompe.De plus en plus d’écoles d’ingénieurs ou de formations informatiques incluent aujourd’hui des modules de veille ou d’intelligence économique dans leurs cursus. C’est le cas du DESS management des systèmes d’information et d’organisation de l’université de Grenoble. Mais ces sensibilisations sont encore méprisées par les futurs ingénieurs informaticiens.” Ils n’ont souvent que faire de veille et de stratégie “, déclare un responsable de formation. S’ils n’ont que peu de chances d’être formés de manière exhaustive aux métiers de la veille durant leurs études initiales, les informaticiens peuvent trouver un complément intéressant dans les formations spécifiques à l’intelligence économique.

Des programmes plus ou moins techniques

Norbert Lebrument, fraîchement émoulu du mastère intelligence économique et stratégie d’entreprise de l’Ecole supérieure de commerce de Toulouse et agrégé de philosophie, confirme : “Dans ma promotion, 1999-2000, deux ingénieurs informaticiens arrivés là par intérêt pour la stratégie ne désiraient pas s’en tenir à un cursus technologique. D’un autre côté, l’intelligence économique n’impose pas de bases solides en informatique.”Malgré tout, certains programmes se révèlent plus techniques. Le DESS d’Angers déclare à travers sa plaquette former “des spécialistes aptes à […] mettre en place un intranet en entreprise”. Contrairement à d’autres, qui insistent plus sur la stratégie et l’organisation, on se focalise davantage ici sur les outils et leur mise en ?”uvre.Henry Samier, responsable de la formation, teste ainsi avec ses étudiants la plupart des outils de veille du marché ?” Digout4U, Bullseye, Webspector, etc. En outre, la vingtaine d’étudiants du DESS (dont 75 % de professionnels en formation continue) suivent des cours tels que la mise en place de systèmes de travail de groupe sous Lotus Notes ou de la modélisation de systèmes d’information.
Toutefois, ” ce n’est pas une formation de génie logiciel, précise un ancien étudiant. L’enseignement touche plus à l’utilisation des logiciels qu’à l’algorithmique “.

Des compétences informatiques pointues ne sont pas nécessaires à l’entrée des formations

Dans les formations plus colorées ” technologies “, on trouve le DEA du Centre de recherche rétrospective de Marseille (CRRM) de l’université d’Aix-Marseille-III ainsi que le mastère de l’Ecole supérieure d’ingénieurs en électrotechnique et électronique.Le premier, l’un des plus anciens (1992), forme des bataillons de futurs thésards. Sur le papier, il ressemble au DESS d’Angers, tout en étant très pointu sur les aspects bibliométrie (exploitation statistique de documents permettant de les analyser à la fois quantitativement et qualitativement).Le second considère comme l’un de ses principaux objectifs pédagogiques d’être capable de ” choisir les outils informatiques et les systèmes de communication les plus pertinents “. Il accorde de ce fait une large place à tout ce qui touche l’automatisation de la collecte et du traitement de l’information.Quels que soient les cursus envisagés, des compétences informatiques pointues ne sont pas nécessaires à l’entrée des formations.

” A ma connaissance, ma promotion ne comportait aucun informaticien
, se souvient Geneviève Carentz, DESS d’Angers, ingénieur au centre de recherche Henri-Tudor (Luxembourg). Mais tous étaient intéressés. Certains suivaient des cours du soir, et plusieurs sont même devenus des professionnels de l’informatique.”En fait, des formations de ce niveau, c’est-à-dire recrutant à partir de bac +4 ou 5, doivent plutôt se concevoir comme des compléments. Sans ériger le principe en règle, un non-informaticien aura plus intérêt à se diriger vers une formation technique, tandis que le technophile trouvera davantage son intérêt dans un diplôme plus orienté sur la stratégie d’entreprise.A contrario, la maîtrise technologique au sortir de la formation peut se comparer à celle de l’anglais. On en a besoin tous les jours, mais elle doit se faire oublier.

Les formations les plus connues ont la cote

Dans la division de Valeo Thermique Moteur, chargée des questions de propriété industrielle et de la veille concurrentielle, un étudiant du DEA d’Aix-Marseille (CRRM) a été embauché en 1998.Selon Anne de Cagny, responsable de cette division, une appétence technologique est appréciable : “Notre DEA a participé activement à la réalisation d’un intranet, mais cela ne faisait pas partie intégrante de sa formation. Il s’était formé lui-même aux bases Notes et à l’administration de serveurs web.”Aujourd’hui, les formations à l’intelligence économique les plus connues ont la cote. Les employeurs commencent à les mentionner dans leurs propositions de postes. Chacune tente de se distinguer des autres : Poitiers insiste sur son côté multiculturel ; le CRRM est connoté ” techno “, avec l’avantage d’être une formation pionnière ; l’Ecole de guerre économique, elle, se veut offensive.Toutes forment des cadres capables de gérer des projets de mise en place de cellule de veille, voire de se comporter en véritables conseillers stratégiques. Mais, pour les anciens élèves et les étudiants stagiaires, le plus difficile reste à faire évoluer les mentalités des entreprises hexagonales.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Philippe Billard