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Les développements Wap : une affaire d’ultraspécialistes

Porté au Pinacle puis précipité de la roche Tarpéienne, tout ceci en moins d’une année… Malgré les déboires, les responsables de projets Wap n’ont pas jeté l’éponge pour autant. Ils ont tout repris et réorganisé, si bien qu’aujourd’hui le mot d’ordre est unanime : le Wap n’est pas perdu, il est en mutation.

Non, le Wap n’est pas mort, car les sociétés impliquées dans le développement d’applications Wap ont tiré les enseignements des échecs de l’année dernière. Elles se sont réorganisées en conséquence. Les équipes ont été restructurées, les méthodes de travail revues et les sites Wap sont plus que jamais à la mode. Cependant, les développements sont encore bien souvent empiriques. Un contrecoup logique des évolutions techniques effrénées de ce nouveau moyen d’accès à l’information. Dans le monde du Wap, les évolutions vont vite. Très vite. Seules les start-up semblent à même de suivre le rythme. Toutes ont choisi d’aborder le problème différemment. Certaines se spécialisent dans la création de sites purement Wap, d’autres ciblent les sites multiaccès. Certaines se restreignent à quelques terminaux, d’autres se veulent universelles. Parce que finalement, c’est la diversité des terminaux qui pose problème.

Les équipes remaniées

La première leçon tirée de l’échec du Wap fut une prise de conscience : le Wap ne consiste pas à porter internet, tel qu’on le connaît sur les PC de bureau, sur des téléphones mobiles. Confier des projets Wap aux équipes qui avaient fait leurs preuves sur le web n’a pas donné les résultats escomptés. Ces équipes, pressées par des délais très courts, habituées à des outils de développement plutôt souples, à un web relativement bien normalisé, à des contenus toujours plus riches et à des ordinateurs très ergonomiques, ont très mal appréhendé le phénomène Wap. Tout d’abord, elles ont mal pensé le problème en matière de diffusion de contenus (on n’affiche pas la même chose sur un écran de téléphone portable avec 4 lignes de texte et sur un écran de 17 pouces). Ensuite, elles ont sous-estimé la variété des terminaux Wap, dont il existe autant d’écrans et de dispositifs de navigation qu’il y a de modèles. Le remaniement des équipes s’imposait donc. Patrice Slupowski, p-dg de Waptoo, une start-up qui bénéficie d’une solide expérience dans le développement de sites Wap, expose son idée quant à cette réorganisation : “Une équipe dédiée au web se compose d’un créatif, d’un graphiste et d’un développeur HTML qui sait faire beaucoup de choses sans trop se soucier du code généré. Pour le Wap, l’idéal est de faire travailler un spécialiste marketing, un véritable informaticien de la vieille époque et un ergonome ; le marketing pour donner de la pertinence au contenu, l’ergonome pour composer avec la surface d’affichage des terminaux, et le développeur pour comprendre les spécifications, à savoir que ce qui est blanc reste blanc, ce qui est noir reste noir. Il n’existe aucune nuance de gris”.

La diversification des terminaux pose problème

Le Wap, bien que normalisé avec ses versions 1.0 et 1.1 et bientôt 1.2, ne régit pas les écrans ni les dispositifs de navigation tels que molettes et boutons. Depuis que le Wap existe, les développeurs ont toujours été obligés de tester les nouveaux services Wap produits sur chaque terminal en circulation, voire sur les différentes versions d’un navigateur pour un même téléphone. À l’image de celui qui équipe le Nokia 7110 et qui en serait à sa dixième version depuis le lancement de ce téléphone. Au vue du nombre toujours croissant de terminaux, il paraît difficilement concevable que ces phases de validation perdurent encore longtemps de façon empirique. Daniel Gerges, directeur technique de Wokup, une start-up qui réalise un moteur d’extraction de données, basé sur des feuilles XSL, à destination des terminaux mobiles, s’est déjà fait une raison : “Un jour il y aura 400 terminaux sur le marché. Les gérer tous risque de devenir illusoire. Afin de conserver des temps de développement constants, et donc de maîtriser les coûts, nous limitons nos tests de validation à un nombre restreint de terminaux, que nous conseillons ensuite à nos clients en fonction d’un service Wap donné.” Chez Waptoo, Patrice Slupowski a développé un outil d’automatisation de tests faisant appel à une base de connaissance. Cela l’oblige à négocier un partenariat avec les constructeurs pour acquérir ces savoirs, mais le résultat se traduit par une réduction de près de 70 % des temps de développement. Et encore, précise-t-il, “ces tests portent principalement sur les navigateurs Nokia, Openwave et Trium, qui couvrent 93 % du marché”.

Une conception des sites à prendre très en amont

Quant à Himalaya, une SSII qui installe le moteur de Wokup dans des sites multiaccès, elle a également signé des accords avec les constructeurs de téléphone pour obtenir ces précieuses informations et ouvrir le moteur de Wokup au plus grand nombre de terminaux en circulation. Un positionnement délicat, car le métier d’une SSII n’est peut être pas de prendre en charge des développements toujours plus lourds au fur et à mesure que les terminaux se multiplient sur le marché. Un avis partagé par Bertrand Schmitt, président d’Arkadia, un concurrent direct de Wokup, qui estime que son “travail d’éditeur de logiciels est de faciliter celui des intégrateurs”.Au début, l’erreur a été de transformer du contenu web en Wap. Aujourd’hui, le risque existe encore. Pyweb, par exemple, édite un moteur d’aspiration de contenus XML pour les transcoder en WML, à l’aide d’une base de connaissance formatant le résultat en fonction du terminal détecté, une tâche que savent mettre en ?”uvre tous les éditeurs d’applications Wap. Le problème d’une telle solution est de ne pas se poser réellement la question de la pertinence du contenu. Si la requête concerne un document de 10 000 caractères, le transcodeur formate le document et l’envoie vers le terminal. En toute logique, ce désagrément incomberait plutôt au responsable du site. Himalaya, qui se spécialise dans les sites multiaccès, prend les devants et amène les fournisseurs de contenus à ajouter des informations spécifiques au Wap dans les sites web déjà existants. Himalaya se charge de la diffusion, mais ne propose pas d’outils pour gérer les contenus d’un site multiaccès, ce qui est regrettable car aucun outil de gestion de ce type n’est actuellement capable de gérer et de diffuser des contenus Wap, en plus de ceux qui sont propres au web.A priori, la conception d’un site Wap reste donc spécifique : c’est une affaire d’ultraspécialistes. Les start-up ne manquent pas de s’en féliciter, d’autant qu’en matière de Wap, le savoir-faire européen est très en avance sur celui du reste du monde. Plutôt prometteur pour une technologie soit disant morte.

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Lionel Sarrès