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Les brokers pistent les parts de marché en Europe

Alors que la cession de l’Allemand Consors est proche, les courtiers Fimatex et Cortal réaffirment leurs visées à l’échelle européenne. En France, la concurrence s’élargit.

Une année noire. Pas un courtier n’a échappé au cataclysme boursier en 2001. Pas même les géants allemands Consors, Comdirect et DAB, qui avouent ensemble près de 500 millions d’euros de pertes en douze mois pour des commissions nettes cumulées d’à peine 300 millions d’euros !Des résultats catastrophiques, causés en grande partie ?” mais pas exclusivement ?” par les performances exécrables de leurs filiales européennes. Même Comdirect a dû passer une dépréciation de 100 millions d’euros liée à sa filiale française Self Trade. ” Les grands courtiers allemands se sont rendu compte qu’il n’est pas forcément simple de créer un marché unique du courtage en ligne, commente sobrement Clémence Decortiat, déléguée générale de l’association française Brokers on line. Les économies d’échelle sont encore difficiles à mettre en ?”uvre en Europe, en raison de l’hétérogénéité des systèmes de compensation, des systèmes de négociation ou des réglementations.”

Retour à domicile

La politique d’expansion tous azimuts s’est donc muée en un repositionnement sur les marchés domestiques. Conséquence : Comdirect vient de céder sa filiale française à Pro Capital et Self Trade, filiale française du groupe DAB, se sépare de sa succursale italienne, considérant que ” ni la croissance organique, ni la croissance externe ne paraissaient des options viables, offrant des perspectives de rentabilité à court terme “.En vingt mois d’activité, Self Trade n’avait ouvert que 818 comptes en Italie… DAB Self Trade continue néanmoins à affirmer sa volonté de ” créer le leader européen du courtage en ligne “. Coprésident de DAB, Matthias Kröner explique que ” l’orientation européenne de DAB a été un facteur clé de son succès en 2001 “. Un ” succès” mesuré surtout à l’aune de la conquête de 128 000 nouveaux clients, et non à la perte nette de 196 millions d’euros…Quant à Fimatex (Société Générale), qui a décidé de diversifier ses revenus en rachetant le site d’informations financières Boursorama, il s’est résolu à fermer ses succursales en Espagne et en Grande-Bretagne. Et pour cause : les activités internationales ont généré les deux tiers des pertes (51,7 millions d’euros) enregistrées en 2001.Reste le cas de Consors. Avec à peine 66 000 comptes en France, en Suisse, en Espagne et en Italie, ses opérations européennes sont peu significatives, d’autant que ses activités en Suisse et en Italie ” n’ont pas atteint en 2001 une masse critique suffisante” pour envisager un point mort proche. Le nouveau propriétaire du courtier s’en accommodera-t-il ? La question est ouverte.

Les atouts des Français

La prééminence du courtage en ligne allemand?” qui accapare la moitié des 4,8 millions de clients européens ?” avait fini par faire oublier que les acteurs français disposent aussi de solides atouts. Fimatex et BNP Paribas (au nom de sa filiale Cortal) l’ont rappelé en disputant la reprise de Consors aux Américains E-Trade et Schwab, ou à l’Allemand Comdirect. L’affaire n’est pourtant pas donnée, puisque la capitalisation boursière de Consors tourne autour de 650 à 700 millions d’euros.La chasse à la part de marché reste donc ouverte. Elle n’est pas un luxe inutile pour les courtiers en ligne français, confrontés à une activité nationale en forte baisse. Selon Brokers on line, la part de marché des courtiers en ligne dans l’Hexagone ne dépassait pas 13,8 % des ordres passés sur Euronext Paris en février, alors qu’en avril 2000, elle avait atteint un sommet de 25,3 %.” La clientèle des courtiers en ligne se compose exclusivement de particuliers, qui se comportent en acheteurs, explique Clémence Decortiat. Quand le marché baisse, ils se retirent.” En outre, les 485 000 ordres exécutés en février font pâle figure à côté du sommet historique de 1,33 million d’ordres, atteint en mars 2000.À l’évidence, de tels niveaux ne suffisent pas à assurer la rentabilité des sociétés de courtage en ligne, même si ces dernières se sont imposé de rudes efforts de restructuration en 2001 : licenciements, suppression de budgets marketing, gel des investissements. Et, comme l’avoue Clémence Decortiat, ” les tarifs vont augmenter chez les courtiers en ligne dans les mois à venir. Les services offerts ont un coût qu’il est impossible de rentabiliser avec des prix discount “.La marge de man?”uvre semble d’autant plus étroite pour les sociétés de courtage, que les grandes banques de détail peaufinent aussi leur offre d’intermédiation boursière. Ainsi, la Société générale vient-elle de lancer ” Passeport Bourse”, défini comme ” une offre de services gratuits pour faciliter aux particuliers leurs investissements en Bourse “. ” Notre banque de détail n’était pas forcément au top en termes d’offre boursière, reconnaît Bernard Suard, en charge du projet à la Société générale.
Or, avec 1,5 million de comptes-titres, nous disposons d’un vaste potentiel commercial pour développer la Bourse en ligne. “ D’autres grands groupes bancaires intègrent ces services dans leur offre, qu’il s’agisse de BNP Paribas (BNP Net Trade) ou du Crédit Lyonnais. Danger pour les courtiers en ligne ?  ” Les grandes banques à réseaux accusaient un retard dans ce métier, tempère Clémence Decortiat. Et leur stratégie est plutôt défensive qu’offensive. “Et puis, les courtiers en ligne n’hésitent pas non plus à porter la concurrence sur un terrain plus bancaire, par exemple, quand Self Trade promeut l’épargne salariale… La bagarre ne fait que commencer.

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Michel Gassée