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Le torchon brûle entre l’Icann et ses membres

Association à but non lucratif fondée en 1998 et autoproclamée ” gouvernement de l’Internet “, l’Icann voit sa légitimité et sa politique de gestion contestées par ses propres membres.

L’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (Icann) est à nouveau remise en question. Et cette fois il s’agit des quelque 240 structures dédiées au NIC (Nommage Internet en coopération) responsables des suffixes nationaux (“.fr “, ” .nz “, ” .uk”) qui assurent son financement.Pour le lancement de l’Icann en 1998, ses dirigeants avaient tablé sur un budget exceptionnel de 5 millions de dollars, qui provenait de cotisations (35 % pour les NIC) et de donations diverses. Pour ce premier exercice, les responsables européens s’étaient acquittés d’une donation de 850 000 dollars pour promouvoir ” le gouvernement de l’Internet “.Or stupeur, lors du dernier sommet de l’organisation à Yokohama (Japon) en juillet, les responsables de l’Icann ont reconduit les dispositions financières du premier exercice fiscal et augmenté les cotisations de leurs membres sans aucune consultation préalable.Mécontents, les responsables des suffixes nationaux élèvent la voix. Certains d’entre eux, comme le représentant néo-zélandais Peter Dengatethrush, brandissent même la menace de créer une alternative à l’Icann.Plus pragmatique, Elisabeth Porteneuve, consultante pour l’Afnic et représentante européenne au Domain Name Supporting Organization (DNSO)?” l’instance de normalisation de l’Icann chargée des noms de domaine ?” préfère parler d’un déficit de concertation et de représentativité au niveau des structures dirigeantes de l’organisation. ” Les européens sont aujourd’hui sous-représentées et, selon nos informations, cela ne risque pas de s’arranger “, précise-t-elle.

La contestation s’organise

Cette décision pourrait être la goutte d’eau qui fait déborder le vase. En un mois, c’est la troisième fois que l’organisation est accusée de manque de transparence. La première fois, cela concernait la reconduction à leur poste de certains membres du comité directeur au-delà de la période prévue. Puis, ce fut le choix des sept nouvelles extensions, qui a suscité un tollé de protestations.Cette décision arbitraire renforce le sentiment que l’Icann serait en réalité soumise aux intérêts commerciaux des grosses entreprises américaines. Si tel était le cas, il s’agirait d’un juste retour aux sources. En effet, si l’Icann affiche officiellement des prétentions universelles, elle a été créée à l’initiative du gouvernement américain.Ainsi, alors que les possibilités techniques le permettaient, une proposition comme celle d’un “.health “, soutenue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), n’a pas été retenue. De même, les raisons ayant poussé l’Icann a rejeter l’extension “.union” pour les syndicats, n’ont pas convaincu. Enfin, l’un des sept nouveaux suffixes, à savoir le “.biz”, est déjà déposé et commercialisé depuis plusieurs années par une société californienne, PacificRoot Network. Un cafouillage qui fait désordre lorque l’on sait que la vocation de l’Icann était précisément de centraliser l’ensemble des noms de domaines.Pour finir, un autre reproche formulé contre l’Icann est son manque d’ouverture au niveau juridique, et commercial. Outre le fait que la notion de la politique commerciale ne va pas naturellement de pair avec les objectifs d’une association à but non lucratif, beaucoup de membres de l’Icann ont du mal à admettre que l’ensemble des contrats passés avec ” le gouvernement de l’Internet ” soient placés sous l’égide du seul droit californien.

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Philippe Crouzillacq