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Le ” telco ” Wind veut croire aux bons vents boursiers

Le troisième opérateur italien sera bientôt coté à Milan. L’opération met à jour l’absurdité de certaines valorisations.

“Nous sommes prêts à nous lancer dans cette aventure, après avoir entendu l’avis des principales banques d’affaires européennes”, avoue Tommaso Pompei, administrateur délégué de Wind, troisième opérateur italien des télécommunications. Ce qui sera peut-être la plus grosse introduction de l’année dans les TMT (technologies, médias, télécoms) européennes est bien dans les tuyaux.L’opération pourrait débuter à la mi-mars, en juin au plus tard, selon les turbulences boursières. Si le patron de cette filiale à 73 % d’Enel, l’électricien italien (et à 26,4 % d’Orange) souhaite “tenter l’aventure”, c’est que, malgré la déprime actuelle des marchés, la fourchette des valorisations théoriques annoncées est plutôt flatteuse.

24 millions de clients

Qu’on en juge : les banquiers qui se sont penchés sur le prétendant ?” Mediobanca, Unicredito, mais aussi la Deutsche Bank, Merrill Lynch, Crédit agricole-Indosuez, BNP Paribas, Lazard…?” ont estimé le groupe entre 15 et 18 milliards d’euros, non loin de la valorisation produite en interne, c’est-à-dire 19 milliards. Avec ses 24 millions de clients, Wind, troisième sur son marché derrière Telecom Italia et Omnitel-Vodafone, dispose, certes, d’une position intéressante, et connaît une croissance spectaculaire. Mais sa taille reste relativement modeste en regard de ses grands concurrents européens, et même italiens. Avec un chiffre d’affaires attendu de 4,6 milliards d’euros cette année, soit 6,7 fois inférieur à celui de Telecom Italia (environ 31 milliards), Wind vaudrait donc à peine 3,5 fois moins que l’opérateur historique. Un ratio qui s’obtient en retenant une valorisation de 17 milliards d’euros par rapport à la capitalisation de Telecom Italia, soit 58,5 milliards d’euros.Et que dire de l’opérateur France Telecom, avec plus de 43 milliards de chiffre d’affaires, qui ne pèse que 35 milliards en Bourse ? Deutsche Telekom, de taille comparable, “mérite” encore, sur les marchés boursiers près de 39 milliards d’euros.Selon un autre critère classique, Wind semble là aussi inexplicablement favorisé : ses 15 millions d’abonnés vaudraient donc une somme coquette de 15 à 18 milliards d’euros, quand les 100 millions d’abonnés de Vodafone, le numéro 1 mondial, valent 58,9 milliards. Pourtant, Vodafone est l’un des opérateurs qui affiche l’Arpu (le revenu moyen par abonné) le plus important…La prime un peu élevée, quelle que soit la mesure, au bénéfice de Wind, s’explique par le poids de l’endettement des grands opérateurs, un critère qui ne cesse de prendre de l’importance. Telecom Italia, lourd de 21,9 milliards d’euros de dette à la fin de l’année dernière, est ainsi pénalisé par rapport à sa filiale mobile, TIM, peu endettée, et forte d’une capitalisation supérieure (43,8 milliards d’euros) à sa maison mère. De même, France Telecom a beau s’être fixé comme priorité la réduction de son endettement (environ 60 milliards d’euros), son titre est à peine plus lourd que celui d’Orange (34,3 milliards d’euros en Bourse). “Ces estimations deviennent aberrantes lorsque l’on compare globalement les différents acteurs, mais aujourd’hui, être endetté, dans le secteur des télécommunications, c’est être puni à coup sûr”, regrette amèrement un analyste.

Offensive en perspective

Le phénomène s’est effectivement accentué depuis les ennuis juridico- financiers des Enron et autres Global Crossing. Du coup, Wind pourrait profiter de ce concours de circonstances pour s’engouffrer dans la brèche et tenter de jouer un rôle dans un paysage italien en pleine recomposition. La sortie récente de Telecom Italia de la holding BDT, qui détient 55 % de Bouygues Telecom, pour 750 millions d’euros, valorise au passage l’opérateur mobile français à un peu moins de 7 milliards d’euros. Engagé dans un allégement de son bilan, Telecom Italia mène néanmoins une politique agressive visant à conserver sa première place au hit-parade des télécommunications transalpines. Face à ce mastodonte, Wind mise sur sa situation financière saine, qui lui a déjà permis d’obtenir un prêt de 5,5 milliards d’euros pour financer son déploiement dans l’UMTS.Mais Tommaso Pompei mise également sur son troisième pôle d’activité : internet. “Nous estimons à quelque 5 millions le nombre de nouveaux utilisateurs, privés et entreprises confondues, d’ici à la fin de cette année sur la toile à large bande, lADSL”, assure-t-il.à Rome

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Ariel Dumont*