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Le mystère des téléchargements illégaux de l’Etat

Après l’Elysée, c’est au ministère de la Culture d’être suspecté d’utiliser ses réseaux pour du téléchargement illégal sur BitTorrent. La rue de Valois réfute ces accusations.

Le site You Have Downloaded (YHD) est en train de se faire une réputation en même temps qu’il jette des doutes sur la capacité de surveillance de TMG, le prestataire des ayants droit chargé de détecter les adresses IP qui partagent des fichiers illégaux pour les transmettre à la Hadopi. Le site créé par le russe Suren Ter a révélé il y a quelques jours que le réseau présidentiel avait été utilisé pour télécharger du contenu protégé par le droit d’auteur en a fait de même avec le ministère de la Culture.

Selon YHD, 252 adresses IP auraient été détectées pour avoir récupéré des contenus illicites. Comme le service de communication de l’Elysée l’a fait, celui de la rue de Valois a aussi purement et simplement démenti les accusations : « La direction des systèmes d’information du ministère veille strictement à l’utilisation qui est faite des ordinateurs de son parc. La configuration de son réseau empêche la connexion à des réseaux de pair à pair, ce qui exclut toute possibilité d’usage de tels réseaux à des fins de téléchargement illégal. » Voilà qui est clair.

La Hadopi met en garde

Quoi qu’il en soit, ces adresses ministérielles se retrouvent dans une liste très détaillée qui est publiée sur le site Pastebin, proche du groupe des Anonymous, qui révèle le nom et le poids des fichiers, la date et l’heure des téléchargements. Donc, soit ces sites ont créé de toute pièce des fichiers qu’ils publient, soit les réseaux d’Etat sont « hackés » par des inconnus, pour télécharger, entre autres, Conan le Barbare, soit ces téléchargements ont bien eu lieu et, si c’est le cas, mettent en mauvaise posture les architectes du processus Hadopi.

En effet, si le doute est autorisé pour l’Elysée et le ministère de la Culture, pourquoi ne le serait-il pas pour un particulier détecté par TMG ? Dès hier, le service de communication de la Hadopi a donc mis en ligne un communiqué dans lequel elle « met en garde contre toute conclusion hâtive obtenue par comparaison de deux processus incomparables dans les faits. »

La Haute Autorité chargée de la protection des droits sur Internet précise que « TMG ne se limite évidemment pas à un simple relevé des informations disponibles sur les “trackers”, ce qui la protège de l’injection de fausses informations, mais encore celle-ci s’assure bien de la réalité d’un partage non autorisé, et non de sa seule annonce. » Elle remet ainsi en doute la fiabilité de la méthode de YHD qui « n’est pas à l’abri d’injection de fausses informations et n’est en aucun cas une méthode de collecte fiable ».

En effet, des outils existent pour cela, dont Seedfuck, qui permet d’inonder les trackers Torrent de fausses adresses IP. D’ailleurs, en 2010, Bluetouf expliquait déjà la technique sur son blog et prévoyait de « se payer de bonnes barres de rire, en retrouvant par exemple les IP de la rue de Valois dans les plus gros téléchargeurs ». Contacté par nos soins ce vendredi 30 décembre, le service de communication du ministère de la Culture nous a déclaré qu’il « n’envisage pas, pour l’instant, d’intenter une action » même pour tirer l’affaire au clair.

2012 sera une nouvelle bataille pour Hadopi

Le site Numerama précise pourtant que « la méthodologie de TMG ne fait l’objet d’aucune certification, ni d’aucun contrôle du processus alors même que ses constats sont utilisés comme preuves dans le cadre d’une procédure pénale. Elle paraît donc au moins suspicieuse, d’autant que la Cnil a dénoncé l’absence de contrôle de TMG ».

Ce n’est pas (encore) une affaire d’Etat, mais ces anecdotes de fin d’année devraient alimenter le débat sur la Hadopi en 2012 pour relancer une bataille rangée antis contre pros. Il y a de fortes chances que cela devienne un enjeu politique. Les candidats à la présidentielle aborderont-ils le sujet ou vont-ils l’éviter ?

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Pascal Samama