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Le MP3 sur la sellette

Parce qu’il ne permet pas la protection des droits d’auteur, le format de compression MP3 est aujourd’hui remis en question par les grandes majors. Lesquelles travaillent à lui préparer un successeur.

Bien qu’il figure au palmarès des mots les plus recherchés sur le Web par les internautes, le MP3 (MPEG Audio Layer 3) est menacé. En effet, ce standard de compression audio, utilisé aujourd’hui par la plupart des sites de musique, ne permet ni de gérer, ni de protéger les droits d’auteur. Un handicap rédhibitoire aux yeux des maisons de disques qui lui cherchent un successeur.Dans un premier temps, les majors se sont désintéressées du circuit de distribution Internet, ne lui reconnaissant pas d’avenir. Cette situation a favorisé le développement sans contraintes des sites MP3. Mais le succès de ces derniers auprès des internautes, la généralisation de l’accès à Internet et les progrès des techniques de transmission ont obligé les majors à revoir leur stratégie. Plus question pour elles de laisser les droits de leurs artistes, et par conséquent leur chiffre d’affaires, filer dans la nature. Elles ont décidé de reprendre la main sur les formats de diffusion de musique sur Internet.” Désormais, la bataille du futur standard se jouera sur le terrain des maisons de disques. Ce sont elles qui définiront les spécifications “
, reconnaît Frédéric Durand, directeur de RealNetworks ?” éditeur, entre autres, de lecteurs audio et vidéo ?” pour l’Europe du Sud. Afin de mieux défendre leurs intérêts, les majors se sont regroupées dès le 15 décembre 1998 pour créer SDMI
(Secure Digital Music Initiative). Ce projet de spécification pour la diffusion de musique sur Internet prendra en compte la gestion des droits d’auteur. SDMI rassemble également des éditeurs, des fabricants de matériel et des fournisseurs d’accès à Internet.

On ne pourra écouter que les musiques autorisées

Le groupement a prévu de mettre en place son standard en deux temps. Première étape, engagée depuis plusieurs mois : les appareils d’écoute compatibles avec le standard accepteront les plages musicales, piratées ou non. La deuxième phase doit démarrer le 18 juin prochain. A partir de cette date, les utilisateurs de lecteurs de fichiers musicaux pourront faire évoluer leurs appareils afin de les rendre compatibles avec les nouvelles spécifications. Ils ne pourront plus, dès lors, écouter que les musiques autorisées.” Les maisons de disque attendent que le SDMI finalise ses recommandations “, explique Benoît Valtel en charge du développement commercial de l’audio numérique au sein de Thomson Multimédia (TMM). Ce qui n’empêche pas les éditeurs de logiciels de proposer d’ores et déjà leurs propres solutions et formats sécurisés (c’est-à-dire capables de protéger les droits d’auteur) aux maisons de disque. ” Nous avons signé avec quatre labels : Warner, Sony, BMG et EMI “, claironne-t-on chez Microsoft qui soutient son format WMA (Windows Media Audio). Microsoft n’est pas le seul éditeur à se battre sur ce marché : WMA est directement concurrencé par rmx, de RealNetworks, ou encore lav, de Liquid Audio.Bien qu’ils ne soient pas encore conformes à SDMI, ces nouveaux formats présentent un autre avantage par rapport au MP3 : ils autorisent, accompagés du lecteur ad hoc, l’écoute en direct des fichiers musicaux. Ils exploitent en effet la technologie du streaming, qui ne permet pas à l’utilisateur de garder le fichier sur son ordinateur. Or, aujourd’hui, le streaming est très présent sur les sites payants. Et les éditeurs le savent.“Nous pensons offrir la possibilité aux utilisateurs de RealJukeBox de diffuser de la musique en streaming “, explique le directeur de RealNetworks. Microsoft, qui partage cet avis, estime même que l’avenir est à une solution qui prenne en compte non seulement “l’audio, mais aussi la vidéo et les eBooks”.

Le MP3 : trop bien implanté pour être remplacé facilement

” Le MP3 ne devrait pas disparaître avant deux ans “, tempère Xavier Bringué, chef de produit des technologies Internet chez Microsoft. Ce format semble en effet trop bien implanté pour être remplacé si facilement. Ainsi, malgré les poursuites judiciaires engagées par les majors de l’industrie du disque, les sites de MP3 n’ont jamais connu autant de succès, que ce soit en terme d’audience ou de financement. En outre, les logiciels pour enregistrer, gérer et distribuer des morceaux dans ce format foisonnent sur le Web.De fait, aujourd’hui toutes les solutions logicielles et matérielles sont compatibles avec le MP3. “L’avenir est aux solutions qui sauront également lire du MP3. C’est pour cela que nous distribuons l’interface la plus ouverte possible”
, estime-t-on chez Real. La société vient même de passer un accord avec Microsoft pour que RealJukebox puisse lire les fichiers au format WMA.Pour s’imposer, les successeurs du MP3 devront donc, en plus de proposer un système de rémunération aux artistes, être gratuits et se révéler aussi faciles à utiliser que le standard actuel. Microsoft?” avec un logiciel permettant une bonne qualité sonore et surtout, le respect des droits d’auteur ?” semble bien placé dans la course au remplacement du MP3. Ses concurrents estiment en revanche “qu’il ne devrait pas exister un format unique, mais plusieurs, correspondant à différents modes de diffusion des fichiers musicaux”.

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Renaud Edouard