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L’e-business transfigure les entreprises

Avec l’e-business, le besoin d’intégration des applications d’entreprise s’accroît. Elle s’impose comme un prérequis pour réaliser la mission de l’entreprise.

La déferlante du commerce électronique contraint les applications à dialoguer. L’intégration des applications, ou EAI (Enterprise application integration), est au coeur des préoccupations des directeurs informatiques. Sa nature s’est graduellement, mais irrémédiablement, modifiée pour constituer, aujourd’hui, la colonne vertébrale du système d’information de l’entreprise. Jusqu’au milieu des années quatre-vingt, les directions informatiques maîtrisaient l’écriture de leurs applications et les technologies utilisées.La façon standard d’intégrer des applications consistait soit en la mise en place de bases de données communes, soit en l’échange asynchrone de fichiers de données (batches). Depuis, les applications client-serveur et les logiciels bureautiques ont proliféré, et leur influence s’est accrue. Auparavant, chacune d’entre elles était connectée à plusieurs applications centrales en mode point à point, afin d’accéder aux données de l’entreprise.

Les ERP deviennent indispensables à l’entreprise

Les phénomènes ont transformé le système d’information en une véritable nasse. Face à cette accumulation hétéroclite de technologies et d’applications, rendant le système d’information de moins en moins maîtrisable, l’apparition des progiciels d’ERP a fait naître un énorme espoir dans les directions informatiques.En remplaçant de nombreuses applications par un ERP dont les différents modules partagent les mêmes technologies et le même modèle de donnée, le système d’information devait devenir beaucoup plus facile à gérer. Ainsi, les ERP ont longtemps constitué l’épine dorsale des systèmes d’information dans les grandes entreprises. Ils ont facilité l’intégration des applications, conservées avec leurs modules. Toutefois, ils se sont révélés lourds à mettre en ?”uvre et inaptes à couvrir tous les besoins métiers.’ Désormais, 90 % des grandes entreprises sont revenues du mythe de l’ERP seul et unique ‘, indique Henry Peyret, directeur technique d’Euriware. Dès lors, de nouveaux types de progiciels sont apparus : gestion de centres d’appels, de la chaîne logistique, des clients…
Selon le GartnerGroup, 80 % des grandes entreprises et 50 % des PME devront intégrer au moins un de ces progiciels autour de leur ERP en 2002. Chaque progiciel ayant ses propres interfaces et ses propres modes d’interfaçage (batch, transactionnel, Message queuing…), le besoin d’intégration s’en trouve encore renforcé.Parallèlement à la diffusion d’ERP, la mondialisation de l’économie a poussé les entreprises à s’interroger sur leur taille et à se recentrer sur leur métier de base. En vue de créer de grands groupes spécialisés, leaders mondiaux sur leur marché, les fusions et les acquisitions se sont multipliées. Ainsi, en 1994, la valeur mondiale des fusions et des acquisitions représentait environ 600 millions de dollars. Deux ans plus tard, le chiffre avait doublé.

La mondialisation a bouleversé les systèmes d’information

En 1998, la valeur des fusions et des acquisitions a atteint environ 2 500 millions de dollars (selon Securities Data Company). Le système d’information de ces entreprises morcelées et refusionnées devenait un chapelet d’applications hétéroclites, plus ou moins redondantes vis-à-vis des données manipulées et des traitements réalisés, et utilisant des technologies hétérogènes. Or, pour réussir une fusion ou une acquisition, l’intégration des différents systèmes d’information doit être réalisée rapidement. ‘ L’EAI apporte une souplesse aux directions générales pour les filialisations, les acquisitions et les fusions ‘, confirme Henry Peyret.Cela explique la forte croissance du marché des outils logiciels d’EAI. Selon le cabinet d’études WinterGreen Research, le marché de l’EAI a crû de 90 %, en 1999, pour atteindre 500 millions de dollars. Il prévoit que cette croissance s’accélérera et que ce marché atteindra 17 000 millions de dollars en 2004. Aberdeen Group estime, quant à lui, que le marché de l’EAI sera de 2 500 millions de dollars cette année. De nombreux éditeurs, tels BEA Systems, IBM, Mercator, Neon, Tibco, STC, ou Sun-Forté, proposent une offre d’EAI qui couvre tout ou partie des besoins, et simplifie le travail d’intégration entre les applications. Compte tenu de l’hétérogénéité des solutions, le terme EAI est assez confus pour nombre d’entreprises. Deux composantes principales apparaissent.Celle des données, d’une part, a pour objectif d’obtenir une consistance des informations partiellement redondantes entre les différentes applications, grâce à des fonctions de transformation des formats employés pour les décrire, d’enrichissement des données elles-mêmes et de routage des informations entre les applications (fonctions des Message brokers). La composante processus, d’autre part, vise à intégrer les applications dans les processus métiers, qui seront séquencés, par exemple, par des outils faisant appel aux technologies du workflow.

L’intégration d’applications est un choix stratégique

Peu d’outils d’EAI répondent, aujourd’hui, à tous les besoins d’intégration des entreprises. La plupart des difficultés rencontrées dans l’intégration des applications résident dans l’absence de prise en compte du problème dans son ensemble. Un système d’information comprenant des applications bien architecturées peut être complexe à maîtriser. Il faut gérer l’urbanisme du système de la même manière que l’on s’y prendrait pour organiser une ville. De la même façon qu’il existe une architecture pour chaque application, il en faut une, d’ensemble, pour le système d’information. Selon le GartnerGroup, l’erreur serait de croire que l’urbanisme de ce système n’est qu’une superarchitecture d’applicationsIl convient aussi de faire communiquer les applications qui se succèdent dans les processus métiers pour automatiser le plus possible ces derniers. Cela implique des changements organisationnels. ‘ En 2004, 70 % des entreprises qui auront affecté la responsabilité de l’intégration à une équipe centralisée réussiront à mettre en place l’urbanisme de leur système d’information. En revanche, 70 % des entreprises qui ne l’auront pas fait échoueront ‘, affirme Arthur Hoeberg, analyste du GartnerGroup.’ Le déploiement d’une solution d’EAI ne se fait pas en trois mois. Il est nécessaire de réussir l’apprentissage de la gestion au quotidien d’un Message broker, car le fonctionnement 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 impose une surveillance rapprochée de la mise en oeuvre. De plus, il faut former les personnels et mettre en place une équipe spécialisée, en charge de l’administration des échanges ‘, précise Bernard Manoeuvrier, directeur de la division Progiciels outils de Sopra.” Se contenter d’établir des liens entre les applications et les progiciels existants ne suffit pas. Il est essentiel de sortir de cette logique qui veut que l’on compte autant d’équipes que de progiciels. La démarche d’EAI doit être centrée sur des processus métiers. Il est essentiel d’avoir une vision transversale de ces derniers. Cela implique un changement organisationnel ‘, confirme Henry Peyret.

L’e-business crée de nouvelles exigences

Jusqu’à présent, peu d’entreprises avaient fait ce choix, et beaucoup ont utilisé les outils d’intégration d’applications au fur et à mesure des problèmes rencontrés. Selon le cabinet d’analyse Hurwitz Group, les entreprises étaient jusqu’alors trop occupées par le passage à l’an 2000 et par les premières expériences avec le Web pour que le choix de l’intégration d’applications soit prioritaireAvec le développement de l’e-business, la question d’une bonne intégration des applications devient essentielle. Ainsi, pour Louis Leamus, vice-président du Meta Group, l’intégration des systèmes et des processus métiers internes à l’entreprise est un préalable à tout projet d’e-business.Selon Dominique Mathot, responsable du Marketing Business Integration d’IBM France, ‘ le marché de l’EAI est encore tiré principalement par les fusions et acquisitions. Toutefois, le commerce électronique fait prendre conscience aux entreprises de l’importance de l’intégration de leurs applications. Trop de sites de commerce électronique ont été créés sans intégration, ce qui entraîne une perte de confiance des clients ‘.Avec la mise en place des sites de commerce électronique B-to-C de seconde génération, la source de différenciation par rapport aux concurrents réside dans l’intégration entre front-office (saisie de la commande) et back-office (suivi et gestion de la commande), ainsi que dans la qualité des processus métiers du back-office.Pour le cabinet Hurwitz Group, l’intégration des applications est un prérequis stratégique pour la mission de l’entreprise. ‘ Il y a deux ans, l’EAI permettait de réduire les coûts et d’améliorer les bénéfices. L’EAI n’était pas stratégique pour les entreprises. Maintenant, elles utilisent Internet pour produire et générer du chiffre d’affaires ‘, confirme Barbara Britton, présidente de la division eCommerce Integration de BEA Systems. De plus, le passage sur le Web des applications d’e-business devant être réalisé rapidement, les développements de nouvelles applications vont diminuer au profit de l’intégration de progiciels, qu’il s’agisse d’ERP, ou de gestion de la relation clients ou de la chaîne logistique…
En 2004, la plupart des entreprises se différencieront par une intégration créatrice des applications et non par des développements maison ‘, précise Yafim Natis, directeur de recherche au GartnerGroup.En outre, derrière le B-to-C apparaît le B-to-B. Et les prévisions de croissance de ce marché se chiffrent en centaines de milliards de dollars. Mais, l’intégration des applications requise pour le B-to-C semble être le fait d’amateurs vis-à-vis de celle nécessaire pour le B-to-B. En effet, dans ce cas, l’intégration entre les applications est essentielle, et oblige, dans un premier temps à ouvrir les applications de l’entreprise à ses partenaires commerciaux.Vient ensuite rapidement le besoin de faire cohabiter les applications des différents partenaires dans des processus interentreprises, pour automatiser les échanges. ‘ Par nature, le commerce B-to-B implique l’automatisation et l’optimisation des chaînes d’approvisionnement et de distribution multientreprises ‘, confirme Louis Léamus. Les échanges interentreprises entraînent notamment l’établissement de processus et de transactions électroniques impliquant les entreprises partenaires. La chaîne logistique, déjà difficile à intégrer dans une seule entreprise, est étendue aux divers partenaires commerciaux extérieurs. ‘ Avec l’émergence du commerce B-to-B, les cartes sont redistribuées. Chaque entreprise cherche sa place dans la chaîne de valeur, et étudie avec quels partenaires elle pourrait s’associer ‘, précise Henry Peyret.Le besoin de fonctions de transformation des formats de données et de routage des informations est encore accru, car les formats utilisés par les différents partenaires commerciaux ont encore moins de chance d’être les mêmes que dans le cas d’une intégration des applications internes d’une entreprise. Les processus métiers deviennent multientreprises et font appel à des applications hétérogènes situées chez les divers partenaires. Leur modélisation et leur supervision se compliquent fortement, et le recours aux standards d’échanges du B-to-B (RosettaNet, par exemple) est capital pour que les partenariats se nouent ou se dénouent aisément selon les possibilités commerciales. Face à ses besoins, les éditeurs, tels BEA, IBM, Mercator, Microsoft, Neon, Tibco, ou encore, STC, ont d’ores et déjà annoncé leurs offres dans ce domaine.

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Jean-François Masler