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La sécurité alimentaire fait déjà saliver les investisseurs

La réglementation européenne en matière d’analyse et de traçabilité renforce l’appétit des bailleurs de fonds.

Un adjectif : “juteux “. Tel sera le marché de la sécurité alimentaire. Entre la demande exigeante des consommateurs et une réglementation européenne de plus en plus pointilleuse, les industriels ont compris qu’ils devaient prendre pied sur ce créneau. Ainsi, le cabinet d’études West LB Partners Research estime que l’analyse alimentaire à elle seule représente 1,5 milliard d’euros. Pourtant, les performances en Bourse des valeurs du secteur ne reflètent pas ce potentiel.Le cours de Tracing Server, éditeur de solutions de traçabilité, a chuté de 52 % depuis janvier. Sur la même période le cours d’Alpha Mos, un fabricant de nez et de langues électroniques, a plongé de plus de 47 %. “Je m’explique mal le comportement des marchés, s’insurge Pascal Ghidaglia, directeur financier et administratif d’Alpha Mos. Juste avant notre augmentation de capital de 5,5 millions d’euros en 2001, notre cours caracolait à 10 euros. Nous connaissions pourtant des difficultés de trésorerie. Aujourd’hui, alors que nos fonds propres se montent à 4,6 millions, les investisseurs ne nous portent guère d’intérêt. ” A contrario, Eurofins Scientific et AES Laboratoire, deux bio-informatiques positionnées sur l’analyse alimentaire, bénéficient de la faveur des marchés. L’une est capitalisée à 150,4 millions d’euros, tandis que l’autre avoisine les 129 millions. De quoi en perdre son latin !

L’e-krach est passé par là

La sanction ou l’engouement des investisseurs tient aux profils très différents de ces sociétés. Ainsi, Alpha Mos et Tracing Server pâtissent du désamour que connaissent toutes les valeurs technologiques depuis l’e-krach d’avril 2000. La première s’est introduite sur le Nouveau Marché en avril 1998 pour financer sa R & D. Au lieu de rapides retombées, elle a essuyé de lourdes pertes. Si, jusqu’à l’éclatement de la bulle, les marchés ne lui en ont pas tenu rigueur “au vu de son fort potentiel”, ils demandent depuis des résultats. Résultats que la société tarde à fournir, en dépit d’une progression de 70 % de son CA au premier semestre 2002 (à 1,3 million d’euros). “Nous attendons l’équilibre promis pour la fin de l’exercice”, admet un analyste.Quant à Tracing Server, elle subit les mêmes affres que les autres SSII cotées. “Même si nous sommes sur un créneau porteur grâce à notre double positionnement sur le transport et l’agroalimentaire frais, nous n’arrivons pas à décorréler notre courbe de celle du Nouveau Marché. Quand les analystes prédisent une reprise en 2004, notre cours est sanctionné”, analyse Eric Barbier, directeur du développement. D’autant que le nouveau business model n’est pas sans incidence sur le chiffre d’affaires. Avec sa solution ASP (applications louées à distance), les clients ne s’acquittent plus d’une forte facture à l’entrée, mais d’un simple abonnement mensuel.De leur côté, Eurofins Scientific et AES Laboratoire ont le vent en poupe, car toutes deux appartiennent au secteur envié des bio-informatiques. “Et puis, elles ont largement profité de l’effet ESB [encéphalite spongiforme bovine, la maladie de la “vache folle”, ndlr], même si AES Laboratoire a été fortement attaquée en juin dernier, quand des rumeurs ont remis en cause l’efficacité de son tests Prionics”, commente un analyste. Depuis la Direction générale de l’alimentation (DGAL) a rectifié le tir, et les clients ont refait leurs stocks.

Des contrôles plus stricts

Le groupe table ainsi sur une croissance de plus de 16 % en 2003. Avec 45 millions d’euros de fonds propres et un chiffre d’affaires de 70,3 millions en 2001 (dont 65 % réalisé dans l’agroalimentaire), AES Laboratoire s’attire logiquement les faveurs des marchés. Eurofins Scientific, elle, vient de renouer avec les bénéfices au deuxième trimestre. Certes, d’une courte tête puisque le groupe affiche 0,11 million d’euros de résultat net. Néanmoins, Hugues Vaussy, son directeur financier, prévoit de réaliser une marge d’exploitation de 10 % en 2004. “Les industriels développent l’outsourcing pour effectuer leurs tests alimentaires. Demain, l’Union européenne mettra en place des normes auxquelles l’industrie agroalimentaire ne pourra se soustraire. Tous les aliments seront contrôlés.”Ces perspectives promettent un bel avenir aux valeurs du secteur. À condition toutefois que ces dernières poursuivent leurs forts investissements en R & D, seul moyen de répondre à l’hétérogénéité des barrières normatives.

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Hélène Puel