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La radio, parent pauvre numérique

Alors que l’offre télé explose grâce à la diffusion numérique, la radio cherche encore la technologie idéale.

Une fois encore, la télévision prend le pas sur la radio. Pouvoirs publics et industriels de la communication s’emploient quasi quotidiennement à critiquer ou à défendre une révolution inéluctable : celle de la télévision numérique terrestre (TNT), qui offrira au téléspectateur, dans un délai certes flou, de nouvelles chaînes de télévision sans abonnement au câble ou au satellite. Mais quid de la radio ? Dans l’ombre de la TNT, elle joue les parents pauvres avec une offre de programmes inchangée en FM, pour cause de saturation des ondes,et aucun des services qu’elle décline sur internet. “ Les propriétaires de radios veulent aujourd’hui investir la télévision en obtenant un canal sur la TNT. C’est leur principale préoccupation“, commente un observateur, en déplorant que “ la révolution numérique de la radio [ne soit] pas pour demain“.

La norme DAB patine

Cela fait pourtant dix ans qu’elle s’annonce et qu’elle joue les prolongations sous divers vocables qui renvoient à autant de technologies. Des solutions testées et qui permettent d’enrichir l’expérience radiophonique pour l’auditeur, en lui apportant des par exemple des animations graphiques, des photos, des playlists… Mais, à l’image des difficultés que rencontre la TNT, la radio numérique peine à faire émerger une norme.À la frontière de la télévision, de la radio et d’internet, le DAB (Digital Audio Broadcasting)(*) ne “dispose toujours pas de cadre législatif, de loi pérenne“, déplore Marc Rennard, directeur général de TDF. Pourtant, la norme existe depuis 10 ans. Plus encore, elle est effectivement exploitée depuis 5 ans, la diffusion radio en mode DAB s’opérant dans le cadre de la loi du 10 avril 1996 relative aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l’information, deux fois prorogée et qui arrivait à échéance le 31 décembre 2001. On attend aujourd’hui une modification de la loi, “ sans trop y croire, la période de précampagne électorale étant peu propice“, confie-t-on au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). À défaut, grâce à un amendement, le gouvernement s’orienterait vers un prolongement de la durée d’expérimentation du DAB jusqu’à la fin 2002. Dans l’attente, le CSA ?” faisant suite à l’appel à candidature lancé le 9 septembre 2001 pour l’exploitation des services DAB en région parisienne ?” a réparti pour une durée de 5 ans l’usage des 9 “blocs” disponibles entre 8 opérateurs : RTL Group, Lagardère Active Broadcast, Tower Cast, Numéricast, TDF, Seconde Génération, VDL et Radio France (2 blocs). À eux de constituer leurs bouquets de services. Comme pour la TNT, nombreux sont les éditeurs et diffuseurs ?” même candidats ?” à critiquer la technologie. “C’est gratuit et ?” qui sait ? ?” demain les fréquences DAB auront peut être une valeur“, explique un éditeur.”Dans la dernière décennie, les évolutions technologiques ont été majeures, mais le DAB, lui, n’a pas bougé“, note Jacques Roques, président de Tower Cast et vice-président de Club DAB. Le marché pourrait décoller si les constructeurs automobiles intégraient en “première monte” des récepteurs DAB dans leurs véhicules neufs. “ Mais, s’interroge-t-il, pourquoi investir sur une norme non évolutive, dans un monde numérique en constante évolution ? ” Faute d’économies d’échelle, les récepteurs DAB restent coûteux, de 230 à 915 euros environ (1 500 à 6 000 francs).

La DRM tente sa chance

Dès lors, l’avenir de cette norme semble compromis pour le grand public, d’autant qu’aujourd’hui, seules les stations de Radio France diffusent en FM et en DAB, Europe 1 et NRJ ayant cessé d’utiliser cette norme au 31 décembre. Car une autre technologie ratisserait plus large : la DRM (Digital Radio mondiale).Cette norme, séduisante car techniquement simple à mettre en ?”uvre, réunit autour d’un consortium international des industriels et éditeurs chinois, japonais, européens ou américains. “ On ne change pas d’émetteur, précise Denys Didelon, PDG de Bravo Production. On modifie le pilote donnant la fréquence. ” Du coup, la radio peut diffuser en parallèle en analogique et en numérique, sans demander de nouvelles fréquences au CSA. Et les récepteurs ne coûteraient pas plus de 90 euros… On est loin des tarifs prohibitifs du DAB.De plus, la DRM pourrait résoudre, à court ou moyen terme, un des problèmes majeurs de la radio d’aujourd’hui : la saturation de la bande FM. Faute de nouvelles fréquences à attribuer, certains souhaitent utiliser la modulation d’amplitude (AM) qui, une fois numérisée, permet d’obtenir une qualité sonore proche du CD. Qui plus est, Radio France qui bénéficiait de l’essentiel des fréquences AM depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, les a remises à la disposition du CSA il y a six mois.Aux sages de lancer un appel à candidature. Il était prévu pour septembre 2001, avant d’être repoussé… Et à présent ? “ Le CSA n’a aucune logique entrepreneuriale. Il peut prendre le temps qu’il veut“, déplore un éditeur. Dominique Baudis, président du CSA, tranche mollement et joue les prolongations : “ L’appel interviendra avant la Coupe du Monde de Football, soyez-en sûr !
(*) La norme DAB est opérationnelle en région parisienne, à Lyon, à Marseille, à Nantes, à Toulouse et sur l’axe Tours-Poitiers (sur l’autoroute A10). Selon le Club DAB, elle touche une audience potentielle de 15 millions de personnes.

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Amaury Mestre de Laroque