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La nouvelle économie n’est pas celle que vous croyez

Pour certains, la nouvelle économie est à l’agonie ; pour d’autres, elle ne s’est jamais aussi bien portée… Surprise : tous ont raison. Question de définition.

L’ennui, avec la nouvelle économie, c’est qu’elle ne signifie pas la même chose pour tout le monde. Une vraie tour de Babel. C’est pourquoi certains annoncent aujourd’hui qu’elle est morte, quand d’autres prétendent qu’elle ne s’est jamais aussi bien portée. Et tous ont raison. De quoi parle-t-on ? D’au moins quatre idées distinctes et pas toujours réconciliables.

La définition populaire : un phénomène boursier irrationnel.

Pour le grand public, la nouvelle économie, c’est la flambée des marchés financiers. Jusqu’en mars dernier, les sociétés internet n’avaient qu’à annoncer des pertes pour voir leur valeur grimper. Car ces déficits, dus à leurs investissements, étaient censés être à la mesure des résultats fabuleux qu’elles obtiendraient un jour… Las ! Les boursicoteurs sont retombés sur terre. Le chiffre d’affaires compte. Les profits comptent. Ce qui fait la valeur d’une société, c’est ?” et ce sera toujours ?” sa capacité à générer des bénéfices. Bref, les fondamentaux s’appliquent également au monde de l’internet. Oublions vite cette première définition. La nouvelle économie ne peut se confondre avec les caprices du Nasdaq. De même que l’avènement du chemin de fer ne s’est pas confondu avec la bulle spéculative correspondante, qui a explosé en 1848. Nous venons juste de vivre la plus belle phase de spéculation de l’après-guerre !

La définition macro-économique : une ère de croissance miracle, sans chômage ni inflation.

Ce sont les économistes américains, fascinés depuis neuf ans par ce phénomène, qui définissent le plus souvent la nouvelle économie de cette façon. Mais là encore, inutile de croire que les lois de l’économie ont changé : si le chômage a disparu et que l’inflation est contenue, c’est parce que la productivité du travail explose grâce aux nouvelles technologies. En clair, aux États-Unis, la richesse produite pour une même quantité de travail humain augmente deux fois plus vite qu’auparavant (2,8 % l’an depuis 1995 contre 1,4 % au cours des vingt années précédentes). Cela explique que les entreprises produisent davantage sans que leurs coûts (salariaux en particulier) augmentent. Mais cette définition a fait son temps : la croissance ralentit outre-Atlantique. Et la ” next economy ” y remplace déjà la ” new economy “.

La définition méso-économique : un secteur, les NTIC, qui pèse 4 % du PIB en France.

Pour les plus pragmatiques, la nouvelle économie est tout simplement un secteur : les NTIC (Nouvelles technologies de l’information et de la communication). Celui-ci ?” essentiellement des télécoms, de l’informatique et de l’internet ?” regroupe des activités aussi diverses que la fabrication de composants électroniques, la production de films, la transmission de données ou la conception de logiciels. C’est cette définition que le Bipe (société d’études et de prévisions économiques) utilise quand il annonce que la nouvelle économie va créer 435 000 emplois en trois ans en France, ou qu’elle a généré 0,4 point de croissance (sur 3,1) en 1999. C’est à la fois beaucoup et très peu : le même secteur pèse 8 % du PIB aux États-Unis. Cependant, là encore, la définition ne reflète pas la formidable diffusion du web dans la société : les NTIC ?” c’est-à-dire, en réalité, tout ce qui permet de stocker, de produire et de faire circuler des infos à la vitesse de la lumière ?” irriguent l’ensemble de l’économie.

La définition méta-économique : un nouveau monde économique transcendé par l’arrivée de l’internet.

C’est la seule définition qui prenne la mesure du phénomène. La révolution technologique ?” ou, plus précisément, la numérisation des données, l’augmentation de la vitesse de transmission et la baisse des coûts ?” transforme radicalement les métiers traditionnels. Le résultat ? Une nouvelle façon de produire, d’acheter ou de communiquer ?” en accéléré. Une autre manière de travailler, aussi, avec de nouveaux outils : e-mail, intranet, bases de données marketing, places de marché, etc. Les entreprises qui les refusent seront vite distancées, comme celles qui, il y a quinze ans, auraient snobé le fax ou le téléphone. Ce nouveau monde ne s’appellera pas longtemps ” nouvelle économie “. Mais on ne reviendra jamais, pour autant, à l’ancien.

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Christine Kerdellant