Passer au contenu

La CNIL exerce son droit de veto sur Election.com

La Commission nationale de l’informatique et des libertés émet un avis défavorable sur l’expérience pilote de vote en ligne prévue le 21 avril à Vandoeuvres-lès-Nancy sous l’égide de la société Election.com, à l’occasion du scrutin présidentiel.

Camouflet pour Election.com. Dans une délibération datée du 2 avril et rendue publique hier en fin de journée, la CNIL émet un avis défavorable sur la toute prochaine expérimentation de vote électronique par Internet, que la société d’origine américaine comptait lancer le 21 avril prochain à Vandoeuvres-lès-Nancy.Pour la Commission, qui n’est pas opposée “par principe” à l’expérimentation du vote par Internet, “les conditions minimales qui rendraient une telle expérimentation utiles” ne sont pas réunies. En clair, “le dossier n’était pas assez étayé au niveau technique et les commissaires ont été sensibles à ces conditions”.

Vote sous influence

Parmi les principaux griefs retenus, ” l’anonymat du vote ne serait pas garanti “ essentiellement sur le traitement des données entre la France et les Etats-Unis, où se trouvent les serveurs d’exploitation des informations personnelles d’Election.com. Cette situation géographique pose problème à la CNIL qui va même un peu plus loin : selon elle, c’est en effet l’ensemble de l’organisation du vote qui échapperait ” à tout contrôle effectif des autorités nationales “. En somme, Election.com a avant tout le tort d’être une société basée aux Etats-Unis.Enfin, dernier argument de poids, ” la possibilité de vote depuis son domicile [NDLR : retenue dans l’expérimentation de Vandoeuvres], ne garantit pas que le vote soit dégagé de toute influence ou de toute pression”. Quel que soit le cas de figure, ” il faut veiller à ce qu’il n’y ait pas un amoindrissement de la démocratie “ explique Thierry Jarlet, directeur de l’administration et de la communication à la CNIL.De son côté, Regis Jamin, vice-président Europe, Moyen-Orient et Afrique d’Election.com, estime que la CNIL vient de prendre position contre le vote par Internet à distance, et concernant le cryptage des données, qu’il s’agit-là “d’une mauvaise lecture des documents techniques”.Par ailleurs, toujours sur la question de l’anonymat du vote, le dirigeant d’Election.com prend soin de préciser que sa société a adhéré au Safe Harbor, mis en place aux Etats-Unis en écho à la réglementation européenne sur la protection des données personnelles.

Un projet concurrent à celui de France Télécom

Pour la CNIL en revanche, il s’agit d’un simple accord qui ne permet pas à un juge d’aller aux Etat-Unis pour contrôler le système et les programmes informatiques de la société américaine. Une possibilité que Régis Jamin affirme garantir par contrat à tous ses clients. Et c’est peut-être par ce côté commercial ?” accolé à l’expression et à l’intégrité du suffrage universel ?” que le que le bât blesse.Reste que la délibération de la CNIL revêt un caractère inédit. Elle coïncide avec le lancement d’un système de vote concurrent, ” e-Poll “, codéveloppé par France Télécom. De plus, l’an passé, à l’occasion des élections municipales, Election.com avait mené une expérience similaire à Voisins-le-Bretonneux, sans que la CNIL ne trouve à y redire.
” Nous avons eu l’impression d’être pris dans un sentiment d’opposition “, reconnaît Régis Jamin. Le PDG avait en effet participé, en septembre 2000, à une table ronde élyséenne sur la démocratie électronique.Au final, selon la mairie de Vandoeuvres-lès-Nancy, l’expérimentation devrait bel et bien avoir lieu, mais uniquement dans les bureaux de votes sélectionnés, et non depuis le domicile des électeurs.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Philippe Crouzillacq